Je suis ton ombre

Partie 15

Point de vue de Maëva

C'est la première fois que je me retrouve hors de la propriété. La grille s'ouvre sur un cour extérieure en graviers. Plusieurs voitures de luxe sont garées le long du mur. Une route fine bordée d'arbres serpente de la maison jusqu'à rejoindre ce qui doit être une route départementale. Les seuls traces d'habitation humaines que je vois se résument à des formes indiscernables au loin. Nous sommes facilement à plusieurs kilomètres du village le plus proche.

Damien ne me laisse pas le temps de réfléchir à la question. Nous contournons la maison, Jonathan derrière nous. Un petit chemin en terre traverse les champs et conduit à un bâtiment qui semble immense. Nous nous y engageons et marchons un bon quart d'heure avant d'y parvenir. L'édifice est effectivement très, très imposant. Il me fait penser à...un complexe sportif ?

Damien me lance un regard malicieux avant de sortir la clé qu'il a été cherchée de sa poche pour ouvrir la porte.

Ma première intuition était la bonne. Nous pénétrons dans un gymnase de la taille d'un terrain de hand, qui fait aussi office de terrain de basket grâce aux paniers accrochés au mur. Mais ce n'est pas tout. Au même niveau se trouvent également un dojo et une salle de gymnastique remplie d'agrès. Deux portes fermées par -quelle surprise- un digicode mènent respectivement à des vestiaires et à une salle remplie d'équipements située en sous-sol. Je reste ébahie à mesure que je découvre les salles. Après avoir traversé le bâtiment, nous passons une porte et nous retrouvons en extérieur. Je me trouve face à un terrain de foot, une piste de course et un terrain de tennis. L'espace a beau être entouré d'un grillage, je me sens bien plus libre que dans la maison et je me rends compte que je souris sans le vouloir depuis un moment.

-Une dernière chose, me dit Damien, le sourire aux lèvres, en me ramenant à l'intérieur.

Il me précède jusqu'à une porte que nous n'avons pas encore ouverte et me fait un signe de tête pour m'inviter à entrer. Je m'engage dans la pièce. Celle-ci est énorme, rempli de plusieurs murs d'escalade de difficultés variables. Ma bonne humeur grandit encore. Damien m'entoure de ses bras par derrière.
-Alors, par quoi veux-tu commencer ?

                                     ***

Nous passons toute la journée ici. Je cours, saute, me défoule comme jamais je ne l'ai fait.
Le sport m'avait énormément manqué, et depuis que je me suis faite enlevée je n'ai jamais respiré si librement. A l'heure du déjeuner, Jonathan nous abandonne le temps d'aller chercher le repas que nous mangeons sur place. Mon humeur est au beau fixe et se reflète sur celle de Damien qui semble ravi de l'effet de sa surprise sur moi. Après une pause écourtée à ma demande, nous reprenons l'exercice. Damien me surpasse dans presque toutes les disciplines, mais cela m'est complètement égale. Je me sens vivante, et c'est tout ce qui compte. L'après-midi avance à la vitesse de l'éclair. Alors que je viens de perdre un match de tennis, je m'allonge sur le sol, exténuée et en sueur. Damien vient s'accroupir à côté de moi.

-Tu as encore des progrès à faire on dirait, me nargue-t-il.

Je pousse un grognement. Il rigole et se jette sur moi sans que je l'aie vu venir. Il me plaque sous son corps et commence à me chatouiller. Je me débats en poussant de petits cris et en lui demandant d'arrêter entre deux rires.  Il s'esclaffe en ne met fin à mon supplice que quelques minutes plus tard. Il s'allonge à mes côtés et me prend ses bras. Il me laisse reprendre ma respiration puis me dit :

-J'ai une proposition à te faire.

Je le regarde d'un air intrigué.

-J'ai une autre surprise pour toi, mais il va falloir que nous sortions. Tu comprends ce que ça implique ?

Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. Il caresse ma joue.

-Maëva, j'ai besoin que tu me jures que tu n'essaieras pas de t'en aller. De toute façon, des hommes à moi seront présents tout du long. Tu ne pourras pas t'échapper et même si par miracle tu y parviens, je te retrouverai et la sanction ne te plaira pas. Sans compter que si tu tentes quoi que ce soit, il y aura des blessés. Alors tu me promets d'être raisonnable ?

Je réfléchis quelques secondes avant de répondre doucement.

-Je te le jure.

Il se penche pour m'embrasser.

-Bien. Je te fais confiance, ne me le fais pas regretter.

Je hoche la tête. Nous nous relevons. Nous rangeons les équipements puis quittons le complexe et prenons le chemin du retour. Une fois à destination, Damien m'accompagne jusqu'à la porte de mes appartements.

-Prépare-toi, me dit-il affectueusement. Je repasse dans une heure.

Il dépose un baiser sur ma joue puis me laisse.  Je me dirige vers ma chambre. Une magnifique robe de soirée est posée sur mon lit, mais je suis trop fatiguée pour essayer de deviner où Damien compte m'emmener. Je palpe le tissu et fronce les sourcils en sentant une petit boule dure dans un des plis. Il me faut plusieurs secondes avant de réaliser qu'il s'agit d'une puce de géolocalisation. Cette découverte me conforte dans l'idée que je ne tenterai rien ce soir et profiterai de l'occasion pour renforcer la confiance de mon ravisseur à mon égard. Je file sous la douche et me détends sous le jet d'eau chaude jusqu'à ce que ma peau devienne rouge. Je sors en serviette. Il est dix-sept heures, il me reste une demi-heure pour me préparer. J'enfile rapidement la robe ainsi que la paire d'escarpins qui l'accompagne puis me sèche les cheveux et me maquille avant d'attendre son retour.

Il n'arrive que quelques minutes plus tard. Il ne fait aucun commentaire sur ma tenue mais je vois l'émerveillement dans ses yeux. Il porte quant à lui un costume noir et une chemise blanche, et je suis obligée d'admettre qu'il est très séduisant.

-Prête ?

Je lui réponds par un sourire. Il m'aide à enfiler une veste qu'il a apportée puis va ouvrir la porte de la chambre. Il m'invite à avancer d'un geste de la main.

-Si Mademoiselle le veut.

Je sors de la chambre. Nous descendons les deux étages puis sortons de la maison et de la propriété. Jonathan, en costume également, nous attend à côté d'une grosse voiture noire à vitres teintées. Il m'ouvre la portière arrière et je prends place dans le véhicule. Damien vient s'installer à côté de moi et Jonathan s'assoit à l'avant. Nous démarrons.

Nous empruntons les routes que je voyais depuis l'enceinte de la propriété. Il se passe peut-être un quart d'heure avant que nous atteignions un premier village, puis encore quelques minutes avant le second. J'essaye de me concentrer pour avoir une indication quelconque de l'endroit où nous sommes, mais la fatigue et le bercement de la voiture ont raison de moi et mes yeux se ferment tous seuls.