Partie 14

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Point de vue de Maëva

      Je ne sens pas la chaleur de son étreinte lorsque je me réveille. Je me redresse en m'attendant à le voir assis sur le bord du lit à m'observer comme il le fait parfois, mais je suis seule. Je me lève et vais me mettre à la fenêtre. La lumière du jour est magnifique. Et dire que je ne peux pas profiter de l'été... Je me perds dans mes pensées, si bien que je n'entends pas Damien entrer. Je sursaute lorsque je le sens m'entourer de ses bras. Son souffle me chatouille le cou.

-Bon anniversaire mon ange ! chuchote-t-il au creux de mon oreille.

Ses paroles me mettent un coup de massue. Nous sommes le 24 juillet. Moi, qui avait perdu le compte des jours, je suis désormais plus éclairée. Cela va faire presque un mois que je suis là. Les larmes me montent aux yeux, mais je les refoule.

-Merci, je réponds en me forçant à sourire.

Il me retourne pour que nous soyons face à face. Il a l'air radieux.

-Je voulais t'apporter le petit-déjeuner au lit, mais je suis arrivé trop tard, me dit-il avec un petit sourire contrit.

Effectivement, je vois un plateau posé sur le lit couvert de choses plus appétissantes les unes que les autres et d'un bouquet de fleurs.

-Ce n'est pas grave, je réponds. C'est l'intention qui compte.

Je dépose un rapide baiser sur ses lèvres. Il place sa main derrière ma nuque pour me garder près de lui et m'embrasse avec plus de passion. Je lui réponds du mieux que je peux en m'efforçant de contrôler le sentiment de peur et de dégoût qui m'habite toujours lorsque nous sommes proches -même si je dois avouer qu'il embrasse extrêmement bien. Il finit par se détacher.

-Ecoute, dit-il, le regard pétillant. Je dois te laisser, il me reste quelques petites choses à régler. Prépare-toi pendant ce temps, j'ai une surprise pour toi. Je vais demander à Chloé de t'amener une tenue confortable. Je me dépêche, promis.

Il m'embrasse une dernière fois puis s'en va. Je vais m'enfermer dans la salle de bains et ouvre le pommeau de douche pour étouffer le bruit des pleurs que j'ai retenus jusque-là. Les choses ne devraient pas se passer comme ça. Je devrais fêter mes dix-huit ans avec mes parents, mes amis, avec Lucas. Il me manque tellement...Au lieu de ça, je suis enfermée avec un psychopathe qui me prend pour son animal de compagnie et qui a l'intention de me garder prisonnière pour toujours. Je pleure jusqu'à épuiser mon stock de larmes puis me douche et me shampouine avant de sortir, enroulée dans un peignoir.

Chloé est déjà passée puisque je vois des vêtements posés sur mon lit. Je m'approche et constate avec surprise qu'il s'agit d'une tenue de sport : short, brassière, débardeur et...des baskets. Pas de talons aiguilles ni de décolletés. Ma curiosité est piquée. Quelle est donc cette surprise ? Je m'habille rapidement puis ramène mes cheveux en queue de cheval et me maquille très légèrement -juste assez pour cacher mes yeux rougis – avant de manger un bout. 

Quelques minutes plus tard, Damien entre de nouveau dans mes appartements. Il s'est changé et est maintenant lui aussi en tenue de sport. Je le dévisage de haut en bas en m'efforçant de ne pas m'attarder sur son t-shirt blanc à col V qui met merveilleusement en valeur sa musculature et sa peau bronzée, mais il faut croire que je ne suis pas très discrète. Il s'approche de moi tout sourire et me caresse le menton.

-Ne te gêne surtout pas pour regarder.

Mes joues deviennent rouge tomate.

-Je ne regardais pas, je mens.

Il éclate de rire. Il s'écarte ensuite et me prend la main pour m'inviter à le suivre.

-Allez, viens.

Il m'entraine hors de la chambre. Nous descendons les deux étages et nous dirigeons vers la porte d'entrée mais il se ravise au derrière moment. Il lâche ma main et fouille dans ses poches.

-J'ai oublié la clé...Suis-moi.

Il me précède jusque devant la porte de son bureau. Il l'ouvre et entre dans la pièce. Je le suis timidement. Je ne suis jamais venue ici. La pièce est grande, impeccablement rangée. Un énorme bureau en bois verni croulant sous les piles de papiers trône devant des fenêtres qui font toute la hauteur de la salle. Des plantes vertes exotiques apportent de la couleur à l'endroit. Une bibliothèque couvre tout le pan gauche du mur. Je m'en approche tandis que Damien fouille dans les tiroirs du bureau.

Le meuble est rempli de livres, bien entendu, mais aussi de babioles et de photos. L'une d'entre elles en particulier attire mon attention. J'attrape le cadre dans lequel elle est fixée pour la regarder de plus près. Le cliché me semble être une photo de famille. Au premier plan se tiennent trois garçons d'une dizaine d'années qui se ressemblent beaucoup. Je reconnais aisément Damien parmi eux. Derrière eux, un homme en costume adresse un large sourire à l'objectif. Sa main est posée sur l'épaule d'une femme. Cette photo pourrait être magnifique, à un détail près. Le visage de la femme est entièrement gribouillé au marqueur noir.

-Qu'est-ce que tu fais ?

J'avais presque oublié sa présence. Je me retourne.

-Ce sont tes frères ? je lui demande en lui montrant la photo.

-Oui, répond-il sans même lui jeter un regard.

-Et...

-Ma mère, achève-t-il à ma place.

Son sourire l'a quitté et son regard s'est assombri, mais je ne me laisse pas impressionner et pose la question qui me brûle les lèvres.

-Pourquoi est-elle cachée ?

Il pose sur moi un regard noir. Je m'efforce de ne pas broncher. Je commence à désespérer d'avoir une réponse lorsqu'il ouvre enfin la bouche.

-Je ne la considère pas comme étant de la famille. Elle est partie sans un mot du jour au lendemain et n'a plus donné signe de vie depuis.

Il prend le cadre de mes mains et le remet à sa place. Il se retourne, un rictus cruel aux lèvres.

-Chose que tu ne feras jamais.

Je ne réponds pas et me contente de baisser la tête pour ne pas montrer l'effet que ses mots me font. Damien s'aperçoit de mon changement d'humeur et il s'adoucit. Il dépose un baiser léger sur mon front et me tire hors de la pièce.

Nous retrouvons Jonathan devant la porte d'entrée et il nous suit à l'extérieur. Damien me tient pas la main et nous avançons en direction de l'enceinte. Je m'attends à ce que nous nous arrêtions à un moment ou un autre mais nous arrivons à l'entrée de la propriété sans marquer d'arrêt. Mon ravisseur fait un geste de tête à son homme. A ma grande surprise, Jonathan s'approche du digicode à côté de la grille, rentre un code qui me parait très long et complexe puis s'écarte.

Le portail s'ouvre.

Je suis ton ombreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant