Point de vue de Maëva
Je cours sans m'arrêter. Dans la nuit noire, les murs du labyrinthe s'élèvent autour de moi, menaçants.
-Maëva !
Sa voix se rapproche un peu plus à chaque fois. J'étouffe un sanglot en arrivant à une intersection. Ma robe est toute déchirée et couverte de terre et de sang, tout comme le reste de mon corps. Le sol est parsemé de pierres aussi tranchantes que des lames de rasoir. Je suis pieds nus. Une traînée écarlate s'écoule dans mon sillage.
-Maëva, reviens, je n'ai pas fini de jouer avec toi !
J'ai mal et je suis à bout de souffle, mais il faut continuer. S'il me retrouve, il continuera à me faire du mal. Je dois trouver la sortie, c'est la seule solution. J'interroge la pleine lune avant de prendre à gauche.
Je cours à en perdre haleine en faisant abstraction de la douleur lancinante dans mes pieds. Je tourne à droite, à gauche, encore à droite. Je désespère de trouver une issue lorsque je tombe sur une grande allée. Au bout, une lumière aveuglante. Mon salut. Je m'y engage à toute vitesse, mais le sol semble devenir spongieux. Je m'enfonce dans le sol, et chaque pas est un effort immense pour m'y arracher. Les murs se resserrent autour de moi. Des branches en sortent et viennent griffer mon visage, ralentissant encore ma progression. Je continue toutefois à avancer, coûte que coûte. Je ne peux pas abandonner maintenant.
Je progresse de quelques mètres, quand je sens les broussailles s'agiter derrière moi. Je jette un coup d'œil en arrière et voit une forme noire écarter les branches aussi simplement que s'il s'agissait de toiles d'araignée.
-Maëva..., chantonne-t-il.
Une peur panique s'empare de moi et je me mets à lutter encore plus désespérément contre les obstacles qui m'entourent. J'avance lentement, centimètre par centimètre. Soudain, la pression autour de moi disparait, je suis libre. Je sprinte vers la lumière qui est plus proche que jamais, mais je ne peux pas m'empêcher de me retourner pour regarder où il est. Ma cheville se coince dans un caillou et je m'étale de tout mon long. Je n'ai pas été assez réactive, et les pierres viennent entailler mon visage. Je gémis et me traîne au sol pour passer la porte de sortie. Mais il n'y a plus de lumière, juste un mur. Un mur immense qui s'élève jusqu'au ciel. Un cul de sac.
-Non...je souffle.
Sa voix moqueuse retentit derrière moi.
-Maëva...Tu pensais vraiment pouvoir t'en aller ?Je me retourne sur les coudes et regarde avec appréhension la silhouette de Damien qui se découpe par-dessus la lumière de la Lune s'approcher lentement de moi. Son visage est plongé dans l'obscurité, mais à mesure qu'il se rapproche je peux voir ses dents blanches qui brillent dans la nuit. J'essaye de reculer davantage, mais des ronces viennent s'enrouler autour de mes chevilles, et je ne parviens qu'à me blesser davantage en essayant de me dégager.
Damien me rejoint tranquillement et s'agenouille à mes côtés. Un frisson me parcourt tandis que mon regard remonte de son sourire carnassier à ses yeux. J'y lis de l'excitation, mais surtout une cruauté et un sadisme sans nom qui me paralysent de terreur.
Toujours en souriant, il prend mon menton dans sa main. Son pouce vient caresser une coupure assez profonde qui traverse ma joue, ce qui me fait gémir de douleur. Il rapproche alors son visage du mien et sa langue entre en contact avec la plaie. Je m'efforce de taire mes plaintes, mais je ne peux retenir mes halètements de souffrance.
-J'adore quand tu gémis ma belle...murmure-y-il.
Mes doigts se crispent sur le sol, et ma main se referme sur une pierre ciselée.
L'attention de Damien passe de ma joue à mes lèvres qu'il se met à suçoter pour en extraire toute trace de sang. Je profite de sa distraction pour lever mon bras et abattre le silex dans son dos, mais sa main jaillit aussi vite que l'éclair et intercepte mon poignet avant que j'aie pu aller au bout de mon geste. Il le tord violemment, ce qui m'arrache un hurlement. Il en profite pour se jeter sur ma bouche et y introduire sa langue. Lorsqu'il me laisse enfin respirer, je suis sur le point de m'évanouir. Sa voix parvient toutefois très distinctement à mes oreilles.
-Je vais te faire du mal, susurre-t-il. Je vais te faire tellement de mal que tu souhaiteras ne jamais être née...
Je perds conscience.
***
-Maëva !
Je me réveille en sueur. Un haut-le-cœur me soulève et j'ai à peine le temps de me précipiter aux toilettes avant de rendre le contenu de mon estomac. Toute tremblante, je peine à retrouver mon souffle. La main de Lucas vient se poser dans mon dos et entame un mouvement régulier qui m'aide à retrouver un rythme cardiaque plus ou moins normal.
-Encore un cauchemar ? me demande-t-il enfin.
Je hoche la tête. Il m'aide à me relever et m'accompagne jusque dans la cuisine. Je m'assois sur un tabouret tandis qu'il s'affaire derrière les fourneaux. Quelques instants plus tard, il dépose une tasse bouillante de chocolat chaud devant moi, ce qui me tire de ma torpeur. Je le remercie d'un regard.
Nous restons un long moment l'un en face de l'autre sans parler, nous n'en avons pas besoin. Le jour se lève lentement. Nous avons rendez-vous pour l'audience à 9h. Je me concentre sur la lumière rose qui passe par la fenêtre et m'imagine rassembler toutes mes émotions en un petit tas dans ma tête. Je récupère ensuite celui-ci et le dépose dans un petit coffre que je ferme à clé avant de placer la clé dans un endroit inaccessible pour le moment. Il ne faut pas que je laisse mes sentiments prendre le dessus maintenant. Je m'en occuperai après la condamnation de Damien.
Lucas se lève en face de moi, signe que nous devons nous préparer. Je me rends dans ma chambre pour enfiler la tenue que j'ai soigneusement préparée. Un tailleur et un pantalon cigarette tout à fait adaptés pour ce genre de situation mais qui ne laissent rien percevoir de mon corps. Je ne veux plus jamais faire cet honneur à Damien.
Une fois que nous sommes prêts, nous descendons. Mon avocat nous attend devant sa voiture. Il s'approche de moi et me sonde du regard. Il ne me demande pas si je suis prête. Nous savons tous les deux que je n'ai pas le choix, cette journée est capitale. Sur le chemin, il me pose quelques questions pour vérifier que j'ai bien mon témoignage en tête. Je réponds mécaniquement. J'ai beau m'efforcer de rester la plus neutre possible, je sens les couleurs quitter mon visage et mon cœur se mettre à battre plus vite à mesure que nous nous rapprochons de notre destination.
Lorsque nous nous garons devant le Palais de Justice, mes jambes ne sont pas plus solides que du coton. Mon avocat me lance un dernier regard encourageant, et nous entrons dans le bâtiment.
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Je suis ton ombre
Romance-Je n'appartiens à personne, espèce de taré ! -Pour l'instant peut-être. Mais tu verras que tu finiras par être entièrement à moi. Corps et âme...susurre-t-il. Vois-tu, je trouve ça terriblement excitant de savoir que tu ne veux pas de moi mais que...