Point de vue de Damien
Je redescends dans mon bureau à grands pas. D'un geste, je fais valser une pile de documents qui se trouve sur le meuble. Je suis furieux. Tout est flou et tremblotant devant mes yeux, et je ne sais pas si je dois blâmer la colère ou l'alcool pour cela. Une deuxième pile de feuilles vient rejoindre la première au sol, puis une autre, puis encore une autre jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien sur le bureau sauf mon téléphone dont le journal d'appels reste désespérément vide.
Je m'assois sur le fauteuil et prends ma tête entre mes mains. Je suis incapable de rien faire, que ce soit me calmer ou aller me coucher. Je n'ai d'autre choix que de subir cette attente insupportable en essayant de contrôler la pression qui court dans mes veines.
Soudain, la sonnerie de mon mobile résonne. Le nom de mon frère cadet Victor s'affiche sur l'écran. Je le déverrouille le plus rapidement possible.
-Allo ? je demande, le cœur battant.
-Damien ? C'est bon, mes hommes ont retrouvé le gars que tu cherches.
Un sourire nait sur mes lèvres.
-Où ?
-Il essayait de passer la frontière vers l'Italie. Je te le ramène, il sera chez toi demain matin.
La bulle de joie dans ma poitrine gonfle encore. J'ai tellement hâte de l'avoir entre mes mains...
-Victor ? je l'interpelle avant d'oublier ce que j'ai en tête.
-Oui ?
-Fais-moi une faveur. Ne le tue pas. Affaiblis-le si ça te chante, mais laisse-moi prendre en charge les choses sérieuses.
Je l'entends ricaner à l'autre bout du fil.
-Entendu, répond-il. Il est tout à toi.
Nous raccrochons. Un rire dément me secoue. Je vais enfin pouvoir avoir ce que j'attends depuis des jours et faire taire cette colère qui ne me quittait pas. J'ai l'impression qu'un poids immense s'enlève de ma poitrine. Maintenant que je peux dormir sur mes deux oreilles, la fatigue accumulée des derniers jours me tombe dessus et je décide d'aller me coucher.
Je veux être en forme pour recevoir mon invité.
Point de vue de Maëva
La porte de ma chambre se déverrouille et je vois Damien entrer. Mon cœur rate un battement. Il vient sûrement finir ce qu'il a voulu commencer hier.
Toutefois, lorsqu'il se retourne, je vois que ce n'est pas son intention. Il s'est rasé et bien préparé, rien à voir avec l'ivrogne qui m'a rendue visite la veille. Je déteste ce côté bipolaire qu'il a. Je ne sais jamais clairement quelles sont ses intentions ou son état lorsqu'il vient me voir, et cela m'effraie. Aujourd'hui, il a l'air d'excellente humeur, ce qui ne laisse présager rien de bon. Il tient une tablette dans la main. Il s'avance dans la pièce en souriant.
-Tu ne viens pas me dire bonjour ?
Je lâche mon livre et me dirige timidement vers lui pour poser mes lèvres sur les siennes. Il m'embrasse plus sauvagement pendant de nombreuses secondes. Quand il me laisse enfin, je suis à bout de souffle. Il va s'assoir sur le canapé en tapotant à côté de lui pour que je vienne le rejoindre.
-J'ai un cadeau pour toi, dit-il d'un air satisfait qui ne me rassure pas du tout.
Il me tend la tablette. Je la déverrouille d'une main tremblante. Un long gémissement de plainte s'échappe de mes lèvres alors que les larmes se mettent à couler sur mes genoux.
Alex est là, sur l'écran, à peine reconnaissable à cause de ses blessures. Son corps est ensanglanté, et son visage boursouflé à cause des coups qu'il a reçu. Ses deux yeux sont au beurre noir, sa lèvre fendue, on le reconnait à peine.-Tu n'es pas contente ? Je t'avais bien dit que je le retrouverais, me murmure Damien à l'oreille.
Je ne l'écoute pas. La culpabilité m'étreint le cœur. Tout est de ma faute si Alex se retrouve dans cette situation. J'ai l'impression de ressentir sa douleur. Je fais un effort surhumain pour me tourner vers l'homme que je déteste le plus au monde et le supplier :
-C'est moi, c'est ma faute...C'est moi que tu dois punir, laisse-le partir, je t'en supplie...
-Enfin, mon amour, me répond-il en me caressant la joue, je ne peux pas te blesser comme ça. Tu es si belle, je ne veux pas t'abîmer. En revanche, j'ai un marché à te proposer.
Je m'accroche désespérément à ses paroles. Je ferais tout pour aider Alex.
-J'accepte de le laisser partir, de ne jamais essayer de le retrouver et d'oublier tout ce qui s'est passé. C'est un marché plus qu'équitable pour toi...
-Qu'est-ce que je dois faire ? je souffle.
Un sourire cruel étire ses lèvres. Et il prononce les deux mots qui mettent fin à tous mes espoirs.
-Non, je réponds par réflexe.
Je me lève et vais me placer à l'autre bout de la pièce. Je ne supporte plus d'être près de lui. Il vient se placer derrière moi.
-Non ?
Je suis paralysée. J'essaye de faire fonctionner mon cerveau pour trouver un argument rationnel pouvant me sortir de ce pétrin.
-Je...je suis trop jeune.
-Tu as l'âge légal, c'est suffisant.
Je m'assois à même le sol alors que les sanglots me secouent. Il vient s'accroupir à côté de moi.
-Tout mais pas ça, s'il-te-plait.
Un soupir de mécontentement et d'impatience lui échappe. Je l'entends alors sortir son téléphone de sa poche et composer un numéro.
-Jonathan ? Maëva est quelque peu indécise. Je pense que dix coups seraient bien pour lui faire comprendre sa situation.
-Non ! je m'écrie. Ne le mêle pas à ça, il n'y est pour rien !
-Tais-toi, me dit-il durement. Si j'entends un seul bruit ou si je te vois détourner les yeux, je dis à Jonathan de continuer.
Sur ce, il m'attrape par l'arrière du crâne et me force à fixer l'écran de sa tablette. Je vois Jonathan s'approcher tout sourire d'Alex et le frapper avec je-ne-sais-quoi. La vidéo a beau être en noir et blanc, je peux voir clairement les dommages que l'instrument lui cause. Je m'efforce de rester silencieuse pour ne pas aggraver son sort, mais je ne peux m'empêcher de gémir à chaque fois que la main du bourreau s'abat. Les coups s'arrêtent enfin de pleuvoir sur Alex, mettant fin à mon supplice.
-Alors, me demande Damien d'une voix doucereuse, tu hésites encore ou tu as pris ta décision ?
-C'est...c'est bon, je sanglote. J'accepte.
-Excuse-moi ? prétend-il de ne pas avoir compris. Qu'acceptes-tu exactement ?
Mon cœur se brise dans ma poitrine.
-J'accepte de t'épouser.

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Je suis ton ombre
Romance-Je n'appartiens à personne, espèce de taré ! -Pour l'instant peut-être. Mais tu verras que tu finiras par être entièrement à moi. Corps et âme...susurre-t-il. Vois-tu, je trouve ça terriblement excitant de savoir que tu ne veux pas de moi mais que...