Chapitre 28

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Au petit matin, Mia ouvre un œil avec une sensation désagréable. Cela se confirme quand elle découvre son ami, les larmes aux yeux, assis sur la chaise de son bureau.

- Axel!!!

- je veux que tu t'en ailles Mia...

- quoi?

- va t en d'ici... tout de suite...

- mais qu'est ce qui t'arrive???

- je veux que tu te barres d'ici, là maintenant.

- tu... tu ne veux plus de moi...

- voilà aller va t en...

Sans plus un mot, la jeune femme, livide, rassemble ses affaires de cours et quitte les lieus... Par la fenêtre, Axel la voit démarrer, et suit des yeux la petite voiture qui quitte la cité... Le cri de rage et de douleur qui s'échappe de sa gorge réveille Hervé.

Il reste un moment pétrifié d'impuissance devant cet homme blessé, brisé, écroulé par terre terrassé de chagrin.

- tu l'a fichue dehors...

- ... oui...

- il la menaçait?

- oui...

- pourtant d'habitude, il ne s'en prend aux gens que si on désobéit...

- ...

- tu m'expliqueras... lève toi gamin et viens te recoucher, t'es pas en état d'aller en cours...

- je vais y aller... Hervé, je vais y aller parce que, à part avoir ce foutu diplôme, y a plus aucune raison que je reste en vie...

La mort dans l'âme, il le regarde partir en se tenant au mur... le bras gauche replié sur ses cotes douloureuses.

Le soir, il avait préparé le repas, aéré l'appartement et s'était inscrit à quelques concours en ligne. Il avait réfléchit toute la journée à ce qu'il voulait dire à son jeune colocataire.

- Axel... j'ai parlé à Mendez... Mia n'était pas menacée si on se tient à carreau...

- tu es sorti???

- il était en bas, tu n'avais pas parlé de l'augmentation de loyer... je lui ai fait un chèque des 100 euros de plus avec ma pension d'invalidité... et j'ai posé la question... en plus, le fait que Gino s'en soit mêlé le fiche mal à l'aise... ne me dis pas que tu l'as fichue dehors sans véritable raison...

- 'sans véritable raison'!!! si c'est pas notre proprio qui lui tombe dessus, ce sera un autre!!! hier elle a été frappée!!!

- elle te manque pas?

- à en crever... mais si un connard la bute ou la viole... ça sera pire...

- et si, d'ici septembre, tu as un bon boulot et les moyens d'aller vivre dans un endroit paisible... comme on avait dit... tu la voudrais pas près de toi là bas???

- ...

- 6 mois à faire profil bas... c'était jouable...

- ferme ta gueule Hervé...

- sa cousine au nom étrange... Ana quelque chose... a appelé... Mia est chez elle, elle n'a pas été en cours, elle a loupé deux tests et a pleuré toute la journée...

- ...

- c'est toi qui lui a fait du mal... pas Mendes... pas un dealer... c'est toi... si elle loupe des tests, elle pourra pas les rattraper... c'est pas la cité qui met ses études en danger, c'est toi...

Axel, blême, se lève et quitte l'appartement, il fait tout le trajet à pied, faute de bus à cette heure, malgré ses blessures et le froid. Il arrive devant la faculté de médecine et se laisse tomber contre un mur... laissant ses larmes couler... toute la nuit...Quand le soleil se lève, les premiers étudiants arrivent, le secrétariat ouvre et Axel s'y traîne.

- oh mon dieu!! s'alarme la femme à l'accueil, vous avez été agressé?

- oui mais ça ira, je viens à propos de l'absence de Mia Herpin.

- oh.

- j'ai été agressé et elle aussi, elle est bouleversée... on a oublié de prévenir pour son absence... elle a loupé des tests, je crois...

Coup de chance, le doyen passe avec le responsable de la formation... La secrétaire explique la démarche du jeune homme qui les suit dans le bureau. Mia est une étudiante brillante et la venue en personne de son ami en si piteux état les incite à ne pas prendre en compte les tests ratés hier et aujourd'hui... Le responsable insiste sur la nécessité de la reprise de la jeune femme, Lundi sans faute.

Axel attrape un bus et se rend en bas de l'appartement de Anahéra. Toute cette marche et le froid de la nuit, le ventre vide ont raison de ses forces... la tête lui tourne, l'air se raréfie... sa dernière pensée est qu'il était vraiment un chien galeux errant venu loyalement mourir sous les fenêtres de sa maîtresse... Il perd connaissance...

Quand il revient à lui, Anahéra et Mia sont penchées sur lui... des hommes en uniforme de pompiers également.

- je vais suivre les pompiers, tranche Mia, et toi Anahéra, file tu vas louper tes cours...

- parce que pas toi?

- file...

Ils l'embarquent. Mia, sans  avoir dit un mot au jeune homme, monte en voiture, après avoir expliqué aux secouristes la nature de ses blessures... Axel sombre de nouveau.

Son réveil au chaud dans une chambre d'hôpital, sous perfusion, est pénible... Ils ont visiblement traité ses douleurs physiques mais son cœur en morceaux menace de lui broyer la poitrine.

- j'ai croisé le doyen, tu es allé excuser mon absence... lance Mia assise au pied de son lit.

- oui.

- pourquoi?

- tu mérites pas tout ça...

- tu veux dire je mérite pas d'être désespérément amoureuse de toi?

- oui...

- comment as tu pu me mentir... à ce point...

- j'ai pas menti...

- comment je pourrais te croire...

- je comprends...

Son regard perdu et résigné la poignarde en plein cœur, elle fond en larmes... Il se redresse maladroitement et passe le bras autour de ses épaules. Elle ne lutte pas et se laisse enlacer.

- quand Mendez a eu fini de regarder ses gars m'en foutre plein la gueule, il a voulu jouer à la roulette russe... raconte t il d'une voix morte, ils m'ont jeté à terre et il a pointé son arme sur moi... trois fois de suite en rigolant et en me disant que la prochaine fois, ce serait toi, à ma place... toi, Mia...

Elle ne pleure plus, les yeux dans les siens...

- tu sais ce qu'on ressent par terre comme un chien galeux à abattre, sans pouvoir se relever pour au moins mourir dignement?? tu sais ce qu'on ressent?? non! Et je ne peux pas t'imaginer vivre ça, il faut que tu t'éloignes!! J'en ai cauchemardé toute la nuit... je te voyais à ma place... c'était insupportable... il fallait que je t'éloigne...

- tu te trompes Axel, tranche t elle, je sais exactement ce que tu as ressenti... quand tu m'as rejetée comme une moins que rien indigne de ton amour, j'ai ressenti ça, exactement ça...

- je l'ai compris... Hervé me l'a fait comprendre... c'est personne d'autre que moi qui t'ai blessée... je t'ai fait du mal...

- oui...

- je voulais que tu sois en sécurité...

- tu sais ce que j'avais fait hier avant de venir te chercher? Je suis passée chez ma cousine, j'avais besoin de parler avec elle... de sa première fois au lit avec un homme... je me faisais du souci... parce que de plus en plus quand tu me prenais dans tes bras, j'avais envie de... enfin de plus... et toi... et ben toi... tu...

- pardonne moi...

Il faut y croire.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant