Hellions : partie 2

Chapitre 8 - #22

Esath s'élança, ses griffes prêtes à frapper. Il n'y avait qu'un seul  moyen de gagner cet affrontement : l'écourter au maximum. Elle ignorait si elle serait en mesure d'anticiper l'assaut des orbes mais elle prendrait leurs attaques sans discontinuer au besoin. Comme prévu, la sphère dans la main du Fantôme disparut et le premier flash frappa. Elle ne vit pas l'orbe et ressentit une vive douleur à la jambe droite, manquant de trébucher. Refusant de flancher, elle poursuivit son avancée ce qui fit tiquer Ith. D'autres flashs éclatèrent. Son corps subit alors traumatisme après traumatisme. A plusieurs reprises elle dévia, manqua de tomber, se rattrapa et reprit sa course. Jamais quelques mètres ne lui avaient paru si longs.

Surprise que son adversaire ne mobilise pas ses deux sphères restantes, elle demeura alerte et renonça à esquiver les attaques. Elle sentit ces dernières s'intensifier lorsqu'elle entra dans sa zone de confort. D'un hurlement rageur, elle frappa du poing dans sa direction. Ith leva la main droite et, dans un flash, la seconde orbe disparu alors qu'un mur dorée translucide apparaissait entre eux. L'attaque d'Esath s'y écrasa avec force, y laissant de très légères fissures dans un bruit cristallin. Elle n'eut pas le loisir de porter un second coup car les flashs et les assauts reprirent dans son dos ainsi que sur ses flancs, l'assaillant avec cruauté. Le bouclier éclata sous ses yeux et elle vit son adversaire rétracter le bras avec un air satisfait. Sa prochaine offensive serait emprunte de toute sa force et elle le savait, préparant déjà ses bras en croix pour recevoir ce déluge de puissance.

- Cette fois, je te tiens. Lui lança-t-il avec mépris en abattant son attaque.

Ce fut à cet instant précis que le sol lui-même se mit à vibrer et à gargouiller, des lianes créées à partir de celui-ci émergèrent alors et attrapèrent son bras puis se rependirent sur l'ensemble de son corps. Le Fantôme, prit de court, fut presque désemparé d'être ainsi maintenu. Les appendices, issus de la Ruche, possédaient la même consistance et les mêmes couleurs que les skryns. Esath et Amélia n'en croyaient pas leurs yeux. L'antre qui abritait les êtres qu'elles avaient juré de détruire était-elle en train de leur offrir une fenêtre d'ouverture ? Un signe de Nueh ?  Il n'était pas temps d'y réfléchir, l'orbe avait cessé ses attaques à la suite de la stupéfaction de son propriétaire.

La demi-humaine ne rata pas l'occasion et élança tout d'abord sa queue qui, de son bout tranchant, lacéra le capitaine à deux reprises avant qu'elle ne vienne écraser son poing en plein dans son visage. Animée par la rage et l'envie de se venger des injustes considérations de cet orgueilleux capitaine, Esath savoura l'impact de sa chair sur sa face. Consciente qu'elle ne disposait que d'un temps très limité, elle termina son adversaire en le frappant au flanc d'un coup de sa jambe lancée à pleine vitesse. Arraché aux tentacules, le Fantôme fut projeté de côté et roula à terre, envoyé au tapis pour la première fois de ce combat.

Autour de lui, d'autres appendices sortirent de terre pour s'élancer dans sa direction avec la ferme intention de le transpercer. D'un revers de main, cependant, il convoqua à lui son orbe qui trancha nettes toutes les tentacules qui avaient eu l'impudence de s'élancer contre lui. Dans un bruit rocailleux et gargouillant, Esath aperçut les parois latérales de la chambre s'ouvrir comme l'aurait fait une poche de mucus prête à expulser un organisme quelconque. C'est ainsi que des skryns, en chair et en os, apparurent. Elle en compta cinq qui, ignorant cordialement sa présence, se jetèrent en direction du Fantôme.

L'esprit jumelé fut secoué d'une envie contradictoire. Amélia était prise d'angoisse pour cet homme qui lui avait autrefois sauvé la vie. Allait-elle véritablement le laisser là ? Il avait déjà prouvé sa force et cette fenêtre d'action serait la seule qu'elle posséderait sans doute pour s'enfuir avec l'acolyte du Nueh. L'indécision aurait pu la guider mais Esath ne lui laissa pas le loisir de retourner à ses vieux penchants. Elle prit la décision pour deux, se tourna et se rua en direction du noyau où sa monture l'attendait fidèlement. Il n'était pas temps de se mordre les doigts.