Un vacarme assourdissant sévissait sur le champ de bataille. Les grandes ruelles parsemées de débris était le théâtre de combats grotesques et sanguinaires. Aux hurlements des monstres se substituait le bruit retentissant des canons et des bolters. Perchées sur leur ligne de front, les troupes impériales faisaient feu de toute leur puissance et envoyaient commando après commando pour tenter de reprendre les décombres de ce qui avait été l'une des villes les plus rayonnantes du secteur. Dans les cieux hurlaient les moteurs de vaisseaux à l'aspect surnaturel avant qu'il ne s'abandonne à une chute mortel, recombinant leur aspect aérien pour celui d'un marcheur de combat lourdement caparaçonné.
Au front, de sordides sous-officiers maugréaient des ordres à des soldats trop peureux pour se rebeller et trop braves pour abandonner. Pour une section sacrifiée, les skryns tombaient par centaine sous les obus et les canons à impulsions. Armé de fusils-mitrailleurs, de bâtons à énergie et de boucliers à gravité augmentée, les simples humains s'abandonnaient à quelques frappes chirurgicales dans les dédales les plus obscurs de la cité-ruche. Qu'attendaient-ils ? Un espoir peut-être. La plupart tombait sans même avoir réellement compris le sens de leur sacrifice, ils ne vivaient que pour servir et défendre l'Empire, aveuglés par un désir de croire en un Empereur divin et bienveillant.
Le sang, rouge ou noir, se répandait abondement. Comment leur avait-on vendu cette boucherie ? Comme un acte charitable pour protéger les leurs ? Comme une nécessité pour sauvegarder la race humaine ? Comme un élan chevaleresque et nationaliste pour reprendre ce qui leur appartenait de droit ? Peut-être les trois à la fois. Dans ce chaos à peine nommable certains, plus grands et plus forts, résistaient mieux aux embuscades skryns avant de tomber à leur tour pour protéger la nouvelle vague d'assaut. Les Cores, sacrifiés en nombre, étaient pleinement conscient de la tragédie qui les entouraient mais ne pouvaient guère faire davantage qu'espérer une mort rapide pour se libérer d'une existence misérable. Trop monstrueux pour retrouver leur humanité, trop faibles pour être jamais des hellions à part entière.
"Hellions" ... ce mot seul excitait les fantasmes les plus extrêmes au sein des esprits noués de soldats à qui l'on ne confiait que si peu de secrets. Sur la façade sud de Noth, comme prévu, une ligne gargantuesque de machines de guerre et de marcheurs de combat haut de deux à trois mètres pilonnait sans cesse les positions Skryns pour permettre à toujours plus d'escouades d'envahir le site. Mais ce n'était pas la violence des combats, l'aspect gigantesque des canons ou les dernières avancées technologiques en terme de robotique qui faisait le plus parler les sections de soldats désabusés. Leur fascination était captivée, si ce n'est totalement absorbé, pas les deux étranges individus vêtus de noir qui avait tenu la ligne de front seul pendant la mise en place des bataillons de l'infanterie impériale.
On avait interdit le moindre commentaire sur leur façon de procéder et sur leurs étranges capacités. Le peu d'entre eux à avoir eu le privilège de jeter un oeil dans la pente désertique du cratère menant à Noth au moment où ces deux forcenés s'étaient attaqués aux Skryns s'étaient pliés à un mutisme sans faille depuis leur excursion, troublés par ce qu'ils n'auraient pas dû voir. Qui étaient-ils ? Le nom "Hellions" avait été murmuré mais personne ne se serait risqué à aller parler à ceux que même le Général en chef ne regardait pas dans les yeux. Pourquoi les avait-on démobilisé pour sacrifier des vies humaines alors qu'ils tenaient la situation entre leurs mains ? Certaines questions avaient été soulevé mais les réponses ne seraient sans doute jamais apportées.
Ces deux ombres s'étaient enfuies vers l'intérieur de Noth une fois les troupes en place et la base d'opérations sécurisées. Tout ce que les soldats retiendraient jamais serait sans nul doute les courbes généreuses de la jeune femme aux longs cheveux noirs que l'on avait aperçu s'enfuir au loin... et la glaçante sensation qui les avait envahi en apercevant son compère qu'ils avaient à peine pu détailler au vu de la distance qui les avait séparé. Cet homme dont ils n'auraient même pas pu faire une description plus précise que celle d'une silhouette enveloppé de noire les avaient paralysé d'effroi. Il s'était dégagé de sa présence lointaine comme une sombre aura engloutissant tout ce qui entrait en contact avec elle.
C'est dans ce décor apocalyptique qu'avait débarqué l'équipe des Fantômes dont Allen s'était rapidement séparé pour s'élancer à toutes jambes vers son objectif. Vif comme l'éclair, le sabre dégainé, il se servait des épaves comme tremplin et utilisait le moindre débris comme une propulsion supplémentaire pour tonifier sa course. Bénéficiant d'une endurance à peine limitée de par sa condition, le borgne aux cheveux d'argent profitait des fugaces tentatives d'embuscade skryn pour trancher quelques abominations sans même qu'il ne se sente en danger. Rien ne lui paraissait plus important que la mission cruciale qui lui avait été confié par Ith.
Il n'avait cure des soldats dont il sentait les derniers instants effroyables et dont il entendait les hurlements malgré la prodigieuse distance qui le séparait d'eux. Au sol, les restes humains dévorés des civils abattus lors de l'invasion côtoyait les restes des skryns pris dans les bombardements. Noth ressemblait davantage à un cimetière qu'à une cité et le Fantôme avait peine à croire qu'un tel lieu puisse abriter la vie après tout ce qu'il s'y était passé. Cette Réalité l'ennuyait, pire peut-être, le dégoûtait dans des proportions qu'il n'aurait su expliquer. Comment concevoir l'inconcevable ? Comment vivre avec ce qu'il savait ? Il était des secrets si bien cachés que même Ith ou Meta n'auraient été en mesure de les débusquer ; encore moins d'en assumer la charge écrasante.
Bientôt, il fut en vue de ce qu'il était venu chercher. Étalée sur le sol, la carcasse métallique d'un gigantesque marcheur de combat de cinq mètres de haut dont l'aspect pourrissant traduisait tout l'intérêt que les skryns avait porté à sa dépouille. Si la théorie que lui avait confié Kain était exacte alors il savait déjà ce qu'il trouverait, ou plutôt, ce qu'il ne trouverait pas en ses entrailles. Un skryn bondit depuis le sol en le voyant approcher tentant de l'attraper au vol. D'un double coup de sa lame, Allen trancha la gueule du monstre en trois et retomba tranquillement à terre. Sans perdre un instant, il grimpa sur la machine détachant les monceaux d'amas noirâtres et gluants qui y avaient été déposé lors du processus de colonisation.
Le Fantôme grimpa au niveau du plexus du colosse et déblaya le mucus couleur encre à grand renfort d'épée. Après avoir créée une brèche dans la chair immonde qui constituait désormais l'essentiel de l'intérieur du cadavre, il y plongea la main sans rechigner... pour ne rien en sortir. Il retira son bras en pestant. "Kain avait raison" pensa-t-il en laissant le Venom constituant sa tenue dévorer le mucus resté accroché à lui. L'espace d'un instant, il abaissa sa garde pour savourer cette petite victoire. La seconde suivante, une sensation monstrueuse le traversa de part en part tandis que chaque vertèbre de sa colonne se mettait à vrombir de terreur. Une voix glaçante s'éleva derrière lui.
- Le coeur nucléaire a donc bien disparu. Intéressant. Avait-on sifflé sans qu'il n'eut le moindre doute sur l'identité de l'inconnu qui avait profité de son relâchement pour se glisser dans son dos.
Il resserra sa main sur la garde de son arme et pivota. Son regard croisa alors les pupilles améthystes de celui que nul ne souhaitait croiser en pareil instant. Drapé dans son manteau noir, le Corbeau le fixait avec cet air sordide qui le caractérisait si bien.
Que faisait-il ici ? Qu'allait-il exiger, cette fois... ?
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Hellions : partie 2
Fiksi IlmiahDisclaimer : ceci est la seconde partie de Hellions ! Si vous n'avez pas lu la première, rendez-vous ici : https://w.tt/37JvCUS Un monde hostile. Un quotidien brisé. Une jeune fille blessée. Une tragédie. Amélia et ses pairs ont traversé l'horreur d...