Chapitre 9 - #12

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Ren restait interdit alors que l'abominable créature, totalement restaurée, rôdait derrière Amélia. La jeune fille croisa les bras, un air déterminé sur le visage. Le Spectre, lui, tentait de juguler sa colère manifeste et les multiples informations qu'il venait d'apercevoir. La régénération du skryn avait été la cause des pouvoirs de sa protégée, ça n'était plus à démontrer. Avait-elle, en définitive, acquis quelque chose de l'ordre du soin le plus irréel possible ? Rare mais déjà vu. Sa résonnance accentuant peut-être ses pour les élever en des sommets différents. Le roux n'avait pas souvenir d'avoir jamais ressenti ce qui l'avait traversé lorsque la lueur nacrée était apparue.

Une sensation pour le moins difficile à percevoir, proche d'une paix, d'une sorte de béatitude. Une impression bienfaisante s'était dégagée de cette expérience et le fait qu'elle est servie à remettre sur pied un skryn pour le moins dangereux heurtait ses convictions avec fracas. Il la revoyait encore, beuglant sa haine et sa colère. Son don particulier avait finalement émergé au moment le plus inattendu. La vie avait parfois le don de faire émerger de drôles de coïncidences. Son bras meurtri avait amorcé sa régénération, il sentait ses tissus se ressouder et reconstituer leur vigueur originel. Pour autant, il n'était pas tiré d'affaires.

Le visage de la jeune fille ne laissait transparaître aucune de ses expressions traditionnelles. Il ne parvenait pas à déterminer avec précision si elle s'apprêtait à le confronter ou non. La tension générée par son arrivée avait été supplanté par le calme blanc mais celui-ci terminé, la situation s'enlisait à nouveau pour ne plus être qu'une bulle en suspension prête à éclater. Il fronça les sourcils et prit sur lui de briser le silence.

- Amélia, débuta-t-il cherchant à poser sa voix sur un timbre neutre, j'ignore ce que tu as en tête mais je t'assure qu-...

- Ren, coupa-t-elle, je n'ai pas le temps de discuter philosophie. J'ai beaucoup de choses à faire ici, plus que je ne l'imaginais. Elle jeta un regard vers le trou béant menant à l'intérieur de la gare. Je n'ai pas plus le temps, ni l'envie, de justifier tous mes choix. Jusqu'ici, j'ai souvent suivi et j'ai peu agi quand on dresse le bilan. J'ai décidé de remédier à ça en faisant quelque chose qui me paraît utile et juste.

- Si tu te penses légitime à faire ce que tu fais... laisse-moi, au moins, t'aider. Il la regarda, décernant une faille ou peut-être un renouveau de confiance devant la situation insoluble. J'ai bien entendu ce que tu as dit tout à l'heure. Tu ne veux plus être une enfant à qui l'on donne des ordres ? Très bien. Je veux bien t'accompagner et trouver ce qu'il est advenu de ton grand-père. Je peux t'y aider.

- Tu fais rarement les choses par hasard, qu'attends-tu de moi ? Elle remonta ses bras sous sa poitrine.

- Quand tu auras tes réponses, accepte d'entendre mon point de vue sur tout ceci. Je te laisserai faire ce que tu veux par la suite et libre à toi de voguer à ton destin. Je n'ai aucune envie de me battre avec toi.

Amélia entendit, et hésita. Elle savait qu'elle obtiendrait ses informations par son biais et il paraissait logique de lui soutirer un maximum d'éléments comme l'avait préconisé Esath. Pour autant, ses doutes n'étaient pas levés et passer plus de temps avec lui permettrait à son bras de régénérer ses forces. La voix de sa jumelle s'était tût pour l'heure et ce, depuis sa migraine. Dommage, quelques conseils auraient été utile. Le skryn, lui, restait désormais au plus près d'elle comme le ferait un animal de compagnie. Elle repensa à ce qu'il s'était passé : comment l'expliquer ?

La douleur et la peine qu'elle avait ressenti lui avait inspiré des pensées claires. De ces dernières et de sa volonté avaient émergé cette lueur au sein de laquelle elle s'était sentie chez elle. Les bribes de ses pouvoirs avaient montré le bout de leur nez et son compagnon d'infortune avait retrouvé toute sa vitalité, peut-être plus. Fait marquant : cette lumière blanche ressemblait aux zébrures lézardant habituellement sur le corps de sa moitié. Fallait-il y voir un lien ? Et que penser de cette émotion qui l'avait parcouru ? De cet équilibre créateur dans lequel elle avait cru se noyer, en terme de confusion, y pénétrer serait revenu à plonger dans le Grand Tout. L'expérimentation de son don la troublait, tout autant que les sentiments qu'elle avait éprouvé pour le skryn blessé.

Hellions : partie 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant