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Le son des scouts étouffait l'étonnant silence régnant sur le désert de terre aride constituant l'espace entre les cités. Ces bolides à deux roues enchâssés dans des carrosseries d'une couleur métallique surréaliste possédaient une maniabilité peu égalée. Ils n'avaient aucun mal à encaisser les impacts des rocailles et de gravats soulevés par leur passage tonitruant. Pourvu d'un avant affuté capable de transpercer un skryn à pleine vitesse, ces quasi-cercueils roulant n'avaient pour eux que la majesté des hommes et des femmes qui étaient en mesure de les conduire sans s'effondrer.
La seule couleur visible à la surface de ces monstres grisâtres étaient les rainures parcourant la carrosserie, d'avant en arrière, en de savantes lignes horizontales finement tracées. Ces dernières se paraient, tous comme les armes des hellions, de la teinte associée à leur conducteur relié à elles par les manettes disposées sur le tableau de bord. En définitive, ces engins hérités des motos tant appréciées il y a des années de cela avaient rejoint le bestiaire des outils à la disposition du Centre.
Fonçant à toute allure, le duo n'avait pas pris le temps de faire la moindre pause depuis son départ de Noth. Les crinières éclatantes de rubis et de nacre virevoltaient au vent tandis que leurs propriétaires traversaient les étendues stériles de ce monde aujourd'hui soumis à des tourments ignorés du grand public. Ren ne s'était jamais véritablement arrêté à la contemplation de ces lieux désertiques. Pour permettre l'approvisionnement des citées-boucliers, l'Empire avait concentré les forces de production au sein d'immenses tours entièrement automatisée.
La nourriture, l'eau, le recyclage des déchets. Toutes les fonctions nécessaires à la marche du quotidien humain étaient réunies en ces grands bâtiments culminant à des hauteurs mirobolantes mais suffisamment éloignés des lieux d'habitations pour n'être jamais visible. Leur fonctionnement complexe, hérité d'un âge perdu, était un mystère pour la quasi-totalité des êtres humains mais l'effet de leur présence était clairement visible.
Le sol payait le prix de l'intensif usage énergétique de ces petits miracles de consommation et alors que les zones immédiates aux pieds des greniers se paraient d'une végétation florissante, les kilomètres alentours se transformaient en un désert inhospitalier. Telle était la réalité derrière les villes indépendantes où une population bien dressée et régulée vagabondait entre ses étroits murs, heureuse d'être protégée par sa technologie.
A bien y réfléchir, le roux trouvait cela absurde mais pas plus que la multiplication débridée des champs, des villes et des routes que les anciens avaient maladroitement tentés de contrôler avant la crise. Il s'étonnait, d'ailleurs, de ne jamais trouver de ruines ou de terrains abandonnés au fil de son voyage. L'Empire avait-il tant recyclé les structures du passé qu'il n'en avait point laissé une seule ? Pas le plus petit témoignage ? Cela lui paraissait étrange mais au fond, un siècle avait déjà passé et l'effort de guerre avait nécessité bien des sacrifices. Cela n'en était qu'un de plus sur la longue liste consentie de force par le genre humain.
S'il était absorbé dans la contemplation malsaine du monde dans lequel il vivait, Ren n'en oubliait pas pour autant de lorgner en direction de son capitaine dont le scout devançait le sien de très peu. Il était venu le trouver à Noth et l'avait aidé à sortir des débris pour lui ordonner de le suivre en arguant que les recrues ainsi que ses pairs s'en tireraient sans lui. Il avait tout d'abord espéré avoir des détails mais les heures passant lui avaient finalement données tord. Le Corbeau n'avait pas pipé mot et s'était contenté de les conduire en direction de la cité en ruines de Shion sans jamais évoquer la raison profonde qui motivait ce choix.
Il avait beau n'être, par moment, qu'un ensemble taciturne de décisions d'un sadisme rare, cet homme ne s'était jamais montré stupide. Aussi, Ren était-il résolu à comprendre quelle intuition l'avait poussé à ignorer jusqu'aux ordres de repli de Kain. Tout ça pour s'élancer à travers les villes, tout droit, à l'origine des troubles qui secouaient la sérénité de leurs contemporains depuis tant de mois.
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Hellions : partie 2
Ficção CientíficaDisclaimer : ceci est la seconde partie de Hellions ! Si vous n'avez pas lu la première, rendez-vous ici : https://w.tt/37JvCUS Un monde hostile. Un quotidien brisé. Une jeune fille blessée. Une tragédie. Amélia et ses pairs ont traversé l'horreur d...