Chapitre 18

675 77 9
                                    

Quitter une prison pour se rendre dans un autre. J'ai l'impression que ma vie n'est faite que de ça : des prisons. Différentes, certes, mais au final le résultat reste la même : je suis enfermée sans aucun moyen de me défendre.

En voyant ma fille dans les bras d'un inconnu, inconnu qui affirmait haut et fort que cet enfant n'était pas le mien, je n'ai pas réussi à me maitriser. J'ai littéralement foncé sur celui-ci dans le but de lui reprendre. Bien sûr, j'aurais dû me douter que je n'y arriverais pas, passerais juste pour une folle, et risquait de compliquer la situation. Mais sur le coup, ma seule et unique préoccupation était de récupérer Madi.

Ils n'ont pas eu beaucoup de mal à me stopper dans ma progression. Ce n'est pas pour autant que je me suis calmée, bien au contraire : je me débattais comme une furie dans les bras de l'homme qui me retenait. Tant et si bien qu'il a fallu m'assommer pour m'emmener.

Quand je me suis réveillée, j'étais dans cette cellule, seule. Un pantalon et un pull simples étaient placés juste à côté pour me permettre de ne pas rester en chemise de nuit peignoir jusqu'au procès.

Je n'ai pas le droit de sortir de ce petit espace. Pour ma propre protection apparemment. Mes repas me sont donc apportés et je reste sur place. Pas même une petite sortie. J'ai véritablement l'impression que je ne reverrais jamais la couleur du ciel.

De toute façon, je doute qu'on m'aurait laissée dehors : je suis incontrôlable. J'attaque presque toute personne entrant dans l'espoir de d'avoir des informations. Au point où j'ai été déplacée dans une pièce isolée de tous où seul une ampoule accrochée au plafond me permet d'avoir de la lumière. Et ma nourriture m'est apportée par une petite trappe dans la porte. De toute façon, je refuse de manger. Je n'ai plus aucune raison de vivre, plus rien à quoi me raccrocher.

Clarke Griffin aurait pu avoir une petite chance de s'en sortir. Joséphine Lightbourne n'en a aucune. Et je n'ose pas révéler ma véritable identité. Si jamais, par je ne sais quel miracle, je venais à sortir de cet endroit, je serais sûrement aussitôt tuée. A choisir, je préfère encore être condamnée pour un crime que je n'ai pas commis. Même si je doute de survivre d'ici mon jugement.

Je ne prends pas soin de mes blessures. Si je compte correctement, deux semaines se sont écoulées depuis mon arrivée ici. Et elles continuent de saigner à certains moments. Elles sont peut-être infectées. Je m'en fiche totalement.

Quand ils ont remarqué que mes vêtements étaient imbibés de sang, ils ont essayé de m'emmener à l'infirmerie. Mais comme à mon habitude, je me suis débattue. Alors ils ont simplement laissé tomber. Tout comme moi j'ai laissé tomber l'idée de vivre.

Au moins, Madi aura certainement une meilleure vie que celle que je pouvais lui offrir malgré tous mes efforts. Dans une famille aimante, loin du danger. Raven s'en est plutôt bien sortie les premières années de sa vie avant d'atterrir dans le piège du clan Arkadia.

Je me suis assise par terre, roulée en une petite boule au fond de la pièce, attendant simplement la fin. C'est pourquoi je ne relève pas la tête lorsque la porte s'ouvre. Parfois le plateau repas est trop loin pour qu'ils l'atteignent depuis la trappe et ils sont obligés d'entrer pour récupérer les restes, histoire d'éviter les odeurs de pouriture. Enfin, l'entièreté vu que je n'y ai pas touché. Je n'y touche jamais.

Ce n'est que lorsqu'elle se referme que je comprends que cette visite n'est pas comme les autres. Une personne est toujours présente.

Instinctivement, je resserre mes bras contre mes jambes bien que cela me fasse mal. J'ai peur. D'habitude, quand ils me veulent quelque chose, il y a toujours au moins deux gardes et ils m'annoncent de suite de quoi il en retourne. Cette fois, rien ne me donne d'indication sur le motif de la venue de cet inconnu.

- Clarke ?

C'est une voix douce, calme et qui se veut rassurante. Mais surtout, ce quelqu'un connait ma véritable identité. Mais mon cerveau est bien trop épuisé pour l'identifier.

J'entends de pas se rapprocher avant qu'un corps ne se laisse tomber à mes côtés.

- Tu as encore perdu ta langue ? Je vais vraiment finir par croire que tu m'en veux. Remarque je suis un peu responsable sur le coup.

Ce n'est pas possible. Elle ne peut pas être là. Il n'y a qu'une seule personne qui pourrait me parler ainsi.

J'ose finalement lever les yeux.

- Alexandra ?

La brune me sourit doucement. Elle a changé depuis la dernière fois que nous nous sommes vues. Son visage est marqué par pas mal de blessures et elle semble avoir encore perdu du poids.

- Je sais, c'est pas beau à voir, elle rit. Une de ces foutues étagères m'est tombée dessus. Je t'avais dit qu'elles étaient bancales. Mais bon, ce n'est pas aussi grave que ça en a l'air. Et certainement moins que lorsqu'on refuse de se soigner un minimum.

- Je suis en plein délire.

Ce n'est pas possible autrement. Comment expliquer sa présence alors qu'elle est censée être enfermée dans les bâtiments du clan Arkadia ? Je suis certainement tombée endormie. Ou alors peut-être suis-je aux portes de la mort ?

- C'est vrai que ça parait un peu irréel. Pourtant je suis bien là. Je t'avais bien dit qu'ils ne pourraient pas se cacher éternellement.

Mais à quoi joue mon inconscience ? Et pourquoi de tous est-ce elle qui m'est venue à l'esprit ? Parce qu'elle est médecin ?

- Non, je murmure.

Je me relève rapidement en retenant un cri de douleur. Aussitôt, elle me rattrape avant que je ne manque de tomber. Ses bras me maintiennent debout et instinctivement je m'accroche à elle en l'enlaçant. Elle est là, elle est vraiment là.

- Personne ne s'y attendait, une équipe complète a été déployée à l'extérieur et une autre à l'intérieur. Tous les gardes ont été maitrisés en un rien de temps. Et puis nous avons été libérés. Certains sont rentrés chez eux, d'autres ont disparu dans la nature.

Tout en parlant, elle me caresse délicatement le dos. Enfin, surtout le haut, là où je n'ai reçu presque aucun coup. Et je craque. Toute la pression que j'ai accumulée depuis plusieurs semaines s'échappe d'un seul coup.

- C'est terminé, elle chuchote. Tout est fini, tu n'as plus rien à craindre.

- Ils ont... Madi est...

- Elle va bien. Je suis en train d'essayer de la récupérer.

- Ils ne t'écouteront pas, je sanglote, ils pensent que je ne suis pas sa mère.

- Ne t'inquiète pas, j'ai quelques amis qui pourront me donner un coup de main. Pour l'instant, le plus important, c'est ta santé.

- Je vais bien.

Je ne veux pas que l'on perde une seule seconde pour retrouver ma fille.

- Aussi bien que quelqu'un qui a son t-shirt taché de sang et qui n'avale rien du tout depuis un moment.

Elle se détache légèrement de moi, m'obligeant à la regarder dans les yeux.

- Une nouvelle vie t'attends Clarke. Une vie où tu seras libre, où tu pourras offrir ce futur dont tu rêves à ta fille.

- C'est vrai ?

Depuis toutes ces années, j'ai perdu espoir d'un jour revoir la couleur du ciel sans barreaux. Est-ce que c'est possible ? Et surtout, est-ce que je serai capable de m'adapter à ce nouvel environnement ? Après tout, beaucoup de choses ont dû changer entre-temps.

- Je te le promets. Maintenant, il faut que tu me laisses te soigner et que tu manges un petit peu. Et je reviendrai dès que possible pour te faire sortir de là, je ne vais pas te laisser te morfondre dans une prison alors que tu n'as rien fait. Tu vas sortir d'ici en un rien de temps et mettre cette histoire derrière toi de manière définitive.

Double jeu ✔️Où les histoires vivent. Découvrez maintenant