Chapitre 21

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- Maintenant il ne reste plus qu'à attendre quelques jours. En général ça ne prend pas très longtemps, mais tu n'es pas la seule dans le cas et ils ne peuvent pas se permettre de se tromper.

Je soupire. Même si j'en comprends totalement la raison, l'attente est insupportable.

La nuit a été mouvementée, comme je m'y attendais. Et j'ai réveillé à plusieurs reprises celle qui dormait en face, pour mon plus grand malheur. Je ne veux pas être une gêne pour elle, déjà qu'elle m'accueille sans rien demander d'autre en retour.

Au réveil, et après quelques coups de fils de la part de la brune, nous avons appris que pour récupérer Madi, j'allais être obligée de passer un test ADN. Rien de bien méchant en soit, un simple prélèvement de salive, mais il va falloir patienter jusqu'aux résultats. Je préfère quand même ça que de savoir ma fille dans les bras d'une autre femme prétendant être sa mère.

- Clarke, elle commence presque timidement, je sais que tu viens de sortir de quelque chose de marquant et que tout ça est encore dur pour toi. J'ai remarqué que tu avais du mal à ce qu'on te touche, même pour simplement te soutenir...

- Viens en aux faits s'il te plait.

Je la sens nerveuse et cela déteint sur moi.

- J'aimerais que tu voies un médecin, elle lâche.

- Tu es médecin. Et puis je vais faire attention maintenant, je te le promets.

Tout plutôt qu'un inconnu ne m'examine. Surtout que je devrais certainement retirer mes vêtements, c'est plus facile pour examiner mes blessures, ce qui va à coup sûr me ramener en arrière. Je n'ai pas envie de faire une crise d'angoisse alors que je peux l'éviter.

- Je n'ai pas fini mes études, elle répond avec un sourire doux. Et je pensais plutôt à un spécialiste... Celui qu'on va voir normalement quand on attend un enfant.

- Non.

Je bondis littéralement de ma chaise en secouant la tête. Si le généraliste était déjà compliqué à envisager, ça il en est hors de question.

- Clarke s'il te plait...

- Non. Je ne veux pas qu'on me touche là... qu'on me regarde là... On l'a déjà trop fait.

Alexandra se lève à son tour et tente de s'approcher mais je recule immédiatement, assaillie par des images toutes plus horribles les unes que les autres.

- Je ne veux pas, je sanglote en me laissant glisser contre le mur que j'ai finalement atteint.

- D'accord, calme-toi. Je ne vais pas te forcer si tu ne t'en sens pas capable.

- Tu me le promets ?

- Tu devras y aller à un moment, mais quand tu le sentiras et pas avant. Si ça peut te rassurer, je pensais t'emmener chez une personne de confiance. Anya lui envoie souvent des personnes comme toi, qui ont du mal. Je ne peux pas t'assurer que toutes se sont senties détendues, mais elle a su les mettre en confiance. Elle est humaine et, de ce que j'ai compris, elle prend le temps de discuter un long moment avant. Je crois que certaines visites ont été annulées si elle estimait que c'était trop tôt.

- Donc... Je peux... au dernier moment refuser ?

- Evidemment.

Elle s'assoit à côté de moi en laissant une certaine distance entre nous. Sans doute à cause de mon récent rejet. J'aimerais lui dire que ce n'est pas de sa faute, mais j'en suis pour l'instant encore incapable.

- Tu as vécu un véritable traumatisme et ça ne se guérit pas en quelques jours. Il faudra du temps mais tu n'es pas seule. Tu ne l'es plus. Madi sera bientôt à tes côtés et on va retrouver cette Raven.

- Et toi ? Tu seras là ?

- Bien sûr. Autant qu'il le faudra.

- Si je décide de... Enfin tu vois... Tu voudras bien m'accompagner ? Pas à l'intérieur mais...

Je tremble de tout mon corps. L'idée d'aller voir une gynécologue me donne des cauchemars mais peut-être est-ce mieux de passer cette étape avant que Madi ne soit assez grande pour s'en souvenir par la suite. Je sens que je ne serai pas bien après et je ne veux pas que ma fille me voie dans cet état.

La brune attrape ma main et je ne me dégage pas.

- Sans aucun problème. Je serais là avant pour t'aider à penser à autre chose et après pour te changer les idées.

Je souffle doucement.

- Alors peut-être que...

- Pas tout de suite, elle me coupe immédiatement.

- Tu ne sais même pas ce que j'allais dire.

- Tu allais suggérer d'y aller au plus tôt.

- Ce n'est pas ce que tu voulais ?

Je suis complètement perdue là.

- Clairement, le plus tôt sera le mieux. Mais trop tôt ne fera qu'empirer les choses. Il n'y a qu'à voir ta réaction quand je t'en ai parlé.

- C'est comme un sparadrap. Il faut l'enlever d'un coup sec, je réplique.

Je ne supporte pas qu'on me prenne pour quelqu'un de faible. Oui, je ne suis certainement pas dans un état normal à cette idée, mais ce n'est pas une raison pour me materner comme j'ai l'impression qu'elle le fait actuellement.

- Je pense plutôt que ce serait comme retourner le couteau dans la plaie. Je n'ai pas envie de le retrouver une Clarke vide de l'intérieur. Tu n'es pas brisée, tout du moins pas totalement, et on va éviter d'en arriver là.

- Mais...

- Crois-moi, je connais le sujet assez bien.

Son regard semble se perdre un instant dans le vide, comme si elle revivait un moment pénible. Est-ce pour ça qu'elle a décidé d'intégrer le clan Arkadia en plus de ce qu'elle m'a déjà dit auparavant ? A-t-elle perdu quelqu'un d'important ?

- Et après tu oses encore affirmer ne pas être psychologue mais médecin généraliste, je bougonne dans l'espoir de la tirer de ses pensées qui semblent moroses.

Un léger sourire s'affiche sur ses lèvres, signe que j'ai réussi mon coup.

- Qui sait ? Tu ne sais pas tout de moi.

- J'ai bien l'intention de mener mon enquêter. Je suis sûre que tu me caches quelque chose.

Presque imperceptiblement, je la sens se crisper. Sans sa main dans la mienne, je doute que je l'aurais remarqué.

- Bonne chance dans ce cas. Je suis plutôt douée pour garder des secrets. Sans vouloir me venter bien entendu.

- Et moi je suis douée pour fouiner. Enfin je l'étais avant... Bref je trouverais.

- Je n'ai plus qu'à te souhaiter bonne chance dans ce cas.

Elle se relève et m'aide à en faire de même.

- Bon, ce que je propose maintenant c'est de vérifier tes blessures puis de faire cette fameuse mousse au chocolat.

- Tu comptes les regarder tous les jours ?

- Tant qu'elles ne seront pas correctement cicatrisées, oui. Et on va dire qu'une nuit agitée n'aide pas vraiment. Tu risques de m'avoir sur le dos encore un bon moment.

Elle rigole.

- Pardon, je grimace. Tu n'as presque pas pu dormir à cause de moi.

- On s'y fait à la longue. Et j'ai eu droit à un repos forcé avant de pouvoir venir te chercher alors mes batteries sont chargées à bloc. Et puis, ça ne me dérange pas tant que ça de m'occuper de toi.

Je détestais quand ma mère me couvait. Mais avec Alexandra, c'est différent. Peut-être cela vient-il simplement du fait qu'elle est l'une des rares à me laisser être qui je veux, sans m'imposer quoi que ce soit. Et puis, elle a ce don inexplicable pour m'apaiser.

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