Chapitre 74

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J'éternue en entrant dans la pièce : notre passage a soulevé une certaine quantité de poussière. En même temps, nous sommes parties il y a quelques semaines maintenant.

- A tes souhaits, rit Lexa. Je pense qu'on va pouvoir commencer pas laver les lieux.

- Personne n'est venu entre-temps ?

- Presque. Anya est passée quelques fois mais n'est jamais entrée. Il fallait donner l'illusion que les lieux n'étaient pas abandonnés.

- On dirait pourtant.

- C'est vrai.

Je regarde l'appartement. J'ai l'impression de le redécouvrir. C'est magique, comme une seconde libération.

- Tu es sûre qu'on ne risque plus rien maintenant ?

- Le risque zéro n'existe pas. Mais les choses se sont améliorées, sinon on n'aurait pas été autorisées à rentrer.

- Tu as sans doute raison.

Les coups frappés à la porte du bunker nous ont fait peurs. Aucune visite n'était prévue, nous avions encore largement de quoi manger pour encore quelque temps. Et vu la réaction des deux espionnes, aucune demande particulière n'avait été faite.

C'est donc l'arme au poing que Luna s'est avancée tandis que Lexa se tenait un peu en retrait. C'était un homme, grand, le crâne rasé. Il m'a tout de suite donné froid dans le dos. Pourtant les filles ont aussitôt abaissé leurs pistolets en soufflant. De ce que j'ai compris, il s'agit d'un certain Titus. Certainement un agent du FBI vu leur réaction.

Il est entré mais ne s'est pas installé avant de nous demander de faire nos bagages. Nous avions moins d'une demi-heure. Et autant pour mes propres affaires, c'est largement suffisant, autant pour démonter le lit et rassembler les jeux de Madi éparpillés un peu partout, ça a été beaucoup plus compliqué. Heureusement, toutes m'ont apporté leur aide et nous avons pu être prête dans les temps.

Dans un garage sous-terrain, deux voitures aux vitres teintées nous attendaient. C'est là que le groupe s'est séparé en deux. J'ai presque pleuré en enlaçant Raven. Elle est ma meilleure amie, ma seule amie durant des années. Et là, on sortait d'une nouvelle épreuve, encore. En fait, on se retrouve chacune de notre côté lorsque les choses s'améliorent. Et j'espère vraiment que le plus difficile est définitivement derrière nous.

Je suis montée à l'arrière, aux côtés de Lexa. Laquelle n'a d'ailleurs pas hésité à me prendre dans ses bras en voyant mes larmes qui menaçaient de sortir. Nous avions un chauffeur, la voiture de Lexa étant restée dans son parking.

Malgré les verres sombres, la lumière du jour m'a éblouie lorsque nous nous sommes retrouvées dehors. C'était la première fois depuis plusieurs jours et je ne pourrais certainement plus jamais me passer de ce ciel. Peu importe qu'il soit bleu ou nuageux, il est et restera à tout jamais un synonyme de liberté pour moi.

- Si c'est comme ça maintenant, je n'imagine pas l'état quand tu es rentrée du clan, j'essaie de plaisanter.

La brune rigole.

- C'est vrai. Mais Anya s'en était chargée. J'étais blessée et elle ne voulait pas que je force. Quand elle a une idée en tête, c'est difficile de lui retirer. Même si sur le coup ça m'arrangeait bien, j'ai pu me concentrer sur ta recherche.

J'acquiesce, préférant ne pas penser à ce qui aurait pu m'arriver si elle m'avait trouvée peu de temps après. Peut-être qu'elle n'aurait pu récupérer qu'un corps froid.

Je secoue vivement la tête pour me sortir de ces sombres pensées. Le meilleur est à venir. Quant au passé, il reste dans le passé. Je ne l'oublie pas ; même si je le voudrais, j'en serais incapable, mais j'avance. J'avance avec, en me souvenant de tout ce que j'ai traversé et de tout ce que j'ai perdu durant ces longues années. Mais je n'oublie pas non plus les bonnes personnes j'ai pu rencontrer. Certes, c'est faible par rapport au négatif, cependant je ne serais pas celle que je suis actuellement sans.

Raven, ma meilleure amie, ma confidente, mon pilier. Je ne sais pas comment je pourrais la remercier pour tout ce qu'elle a fait pour moi. Sans elle, jamais je n'aurais survécu.

Finn, aussi étrange que cela puisse paraitre, reste un souvenir. Plutôt doux-amer, il n'empêche que ce que j'ai vécu à ses côtés était une petite parenthèse, bien qu'il soit celui qui a éclaté notre petite bulle de bonheur. Et puis, je ne serais jamais tombée enceinte dans le cas contraire.

Madi, ma fille, mon rayon de soleil. Un petit regain d'espoir dans cet univers sombre dans lequel j'ai été plongée. J'ai été plus qu'effrayée lorsque j'ai su que j'allais l'avoir, mais finalement je ne doute pas que j'aurais sombré sans elle.

Et enfin Lexa. Cette fille que je ne supportais absolument pas au départ m'est rapidement devenue indispensable dans ma vie. Si elle n'avait pas été là, je serais morte sans aucun doute. Mais elle s'est incrustée dans mon quotidien sans même que je ne m'en aperçoive. Elle m'a permis de m'en sortir et j'ai fini par me rapprocher d'elle. Au point de tomber amoureuse, moi qui ne voulais plus de la moindre relation.

Il ne nous faut pas énormément de temps pour tout remettre en ordre. L'appartement n'était pas vraiment sale, il y a juste une couche assez impressionnante de poussière. On voit que les lieux ont été abandonnés pendant un moment.

Les fenêtres sont grandes ouvertes pour apporter un peu de fraicheur. J'en profite pour me pencher à celle-ci, observant les gens en contre bas. Ils marchent tous, ayant certainement un but. Ce ne sont pas des zombies comme ceux que je croisais auparavant. Ont-ils conscience de la chance qu'ils ont de pouvoir se promener librement, même s'ils se rendent au travail ?

- Clarke, tu sais venir m'aider à changer le lit ?

- J'arrive.

Madi, que nous avons installée dans son parc, se relève à mon approche.

- Désolée ma puce. Je n'en ai pas pour longtemps.

Lorsque j'entre dans la chambre que nous allons partager avec Lexa, je marque un léger arrêt. Ce sera notre chambre. Bien sûr, nous dormions dans le même lit depuis quelques temps, mais c'était plus par nécessité. Et surtout, nous n'étions pas vraiment ensemble. Je sais que c'est idiot de penser ainsi, mais c'est plus fort que moi. La situation a changé et bien que je sache pertinemment que la brune ne me fera rien qui pourrait me déplaire, je reste légèrement anxieuse.

- Hé, tout va bien ?

Je sors de mes pensées au son de sa voix pour lui offrir un petit sourire timide.

- Oui je... Je vais bien.

Elle fronce les sourcils, pas convaincue du tout.

- Qu'est-ce qui te gêne ? Tu te rappelles qu'on doit tout se dire pas vrai ?

Elle s'avance jusqu'à n'être plus qu'à quelques centimètres de moi.

Je sais qu'on doit tout se dire, surtout dans notre situation pour éviter les malentendus, mais ça me semble tellement risible comme réaction que je n'ose pas.

- Tu veux retourner dans ton ancienne chambre, elle demande doucement.

- Comment tu...

- Je commence à bien te connaitre. Si tu trouves que c'est trop tôt, je comprendrai sans problème.

- C'est juste étrange... La situation est étrange... En fait notre relation même est étrange. Je ne sais même pas ce qu'on est vraiment.

- Je suppose qu'on est un couple un peu atypique.

- Un couple ?

- Ce n'est pas ce que tu voulais ?

Elle semble inquiète maintenant.

- Si, bien sûr que si mais...

Qu'est-ce que je peux répondre à ça ? Evidemment que c'était ce dont je rêvais sans me l'avouer.

- Je ne sais pas si c'est ça qui t'inquiète mais... je ne te ferais rien sans ton consentement explicite. Jamais.

- Je sais, je murmure.

Lentement, sans faire de mouvement brusque, elle m'enlace avant de déposer un baiser sur mon front.

- On ira à ton rythme. Tant que je peux t'avoir dans mes bras, alors le reste est superficiel.

- Merci, je chuchote en l'enlaçant à mon tour.

C-2

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