14- Le doute

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- Lys -

J'inspire un grand coup alors que la vente s'apprête à commencer. Le commissaire dans sa veste à liseré rouge présente les objets.

Après avoir trouvé le moyen d'apposer une autre identité au signataire, je les ai fait passer pour diverses formes d'arts, du conceptuel au patrimoine traditionnel. A estimer la quantité et la taille des figurines, il n'y a pas beaucoup de drogue. Enfin pas autant qu'Esteban doit avoir l'habitude d'écouler...

La vente terminée, je congédie tout le monde pour me charger des preuves d'achat. La salle se vide tandis qu'un homme brun dans son vieux jean avance dans ma direction. Un sourire presque pervers se dessine sur son visage lorsqu'il arrive à mon niveau. Si prévisible.

- On m'avait pas prévenu que la nouvelle avait aussi belle gueule. C'est quoi ton p'tit nom ? lâche-t-il d'une voix mielleuse écœurante.

Je tends la main en ignorant sa question.

- T'es pas très bavarde, hein ? J'aime ça chez une femme.

Je le dévisage. Il retire une enveloppe de sa poche. A la seconde où elle se trouve entre mes mains, je compte les coupures de deux cents pour vérifier la somme. En refermant l'enveloppe, mes yeux croisent à nouveaux les siens.

- On se reverra chaton, lâche-t-il en soulevant la caisse contenant la drogue.

- Je n'aime pas les surnoms.

Je le devance pour sortir.

La vente a volontairement été organisée un jour où je ne travaille pas l'après-midi. Je ne voulais pas m'imposer une journée entière avec une enveloppe pleine de cash.

Je dépose mon sac sur le siège passager et emprunte la route pour rentrer.

En arrivant en bas de chez moi, j'éteins à peine le moteur que la portière à ma droite s'ouvre. Esteban attrape l'enveloppe qui dépasse de mon sac avant de le poser sur la banquette arrière pour s'asseoir. Il referme la portière.

- Ça s'est bien passé ? décoche-t-il en feuilletant les billets.

- Tu ne pourrais pas, je ne sais pas... téléphoner ou envoyer un message ?

Il me regarde, lâche un rictus puis recompte les billets. Il tend le bras vers la banquette arrière pour remettre l'enveloppe dans mon sac après en avoir retiré certains.

- Ta part.

Il rouvre la porte et décoche une dernière réplique avant de sortir.

- La prochaine est dans ton coffre, trois mille par unité.

Mes yeux le suivent à travers le rétroviseur pendant qu'il s'éloigne. Lorsqu'il disparaît derrière la barre d'immeuble, je cède à l'envie de me jeter sur mon sac. Je retire l'enveloppe et scanne l'intérieur. Je viens de gagner trois putains de milliers d'euros en l'espace de quelques misérables jours.

Je retire les clés du contact et sors de la voiture. En ouvrant le coffre, je découvre deux cabas semblables à celui qui les précédait. J'examine l'intérieur avant de les refermer et verrouiller la voiture.

Mon coffre contient à présent l'équivalent de quarante-cinq mille euros en drogue. Il va falloir que j'écoule une somme pareille en évitant les radars d'Edouard. Mais, à ce rythme, je pourrais rembourser l'intégralité du crédit et faire sortir mon père de prison en quelques semaines seulement...

Je monte à l'appartement et scanne l'espace à la recherche d'un endroit où cacher l'argent. Je n'aurais pas cru que cela soit aussi prise de tête.

Le goût du crimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant