44- La passion

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- Esteban -

- Les stups ont certainement des soupçons, ils ont renforcé la présence de la douane aux frontières maritimes.

Les paumes appuyées contre le rebord de la table, je lève un bras pour désigner les frontières concernées sur la carte.

A ma droite, Sebastian et Giuseppe, mon père, assistés par deux autres hommes silencieux. Ce sont des membres haut placés auxquels Sebastian délègue la gestion de certaines affaires.

Si le commerce et l'export sont de ma responsabilité, lui s'occupe de l'influence dans le domaine politique, juridique, au sein des cartels et dans la gestion des membres. Tout ce que je déteste.

- Nous ne pouvons pas transiter la drogue par voie terrestre, cela reviendrait bien trop cher, relève-t-il.

J'hoche la tête, il dit vrai. Sans oublier qu'il est plus facile d'avoir le contrôle sur un port.

Tout le monde se redresse. Malgré ça, ce sont les mouvements de Lys, debout près de Nonna, qui attirent mon regard.

- Et si nous réduisions le volume d'exportation ? demande Giuseppe.

- Assurdo. (Absurde). Hors de question de diminuer notre marché, les concurrents reprendront le dessus si nous laissons paraître la moindre faille, déclare Nonna en attirant une fois de plus mes yeux sur Lys.

Elle est la seule à observer encore la carte.

Pourquoi l'avoir près de moi, ne plus pouvoir détacher mes yeux d'elle plus de quelques minutes me paraît si naturel depuis qu'on est là ?

Je m'habitue doucement à ce qu'elle soit dans ma tête et le plus rageant c'est que ça me va.

- Prendre des risques excessifs serait tout autant dangereux, réplique-t-il. La douane ne doit pas intercepter une seule de nos marchandises.

- Et si nous réduisions le volume sans toucher à la quantité ?

Sa voix féminine qui résonne encore dans la pièce attire toute l'attention.

- La drogue est divisée puis stockée dans des caisses en bois, moins lourdes que le métal, continue Lys. Mais si nous réduisons encore cela à un simple papier isolant ? C'est ce que l'on utilise habituellement pour les objets sensibles mais non fragiles.

Je me mords la langue pour étouffer le sentiment qui m'envahit.

De la fierté ?

Une journée au port lui aura suffi. Elle est observatrice et apprend plus vite que la majorité des personnes présentes dans cette pièce.

- On pourrait ainsi tout faire transiter en une seule cargaison, ou la diviser en deux pour que ce soit plus discret, explique-t-elle avant de pointer la partie basse à gauche de l'hexagone. Quant au reste, la livraison se ferait au port de Monaco. Je doute que les brigades communiquent aussi rapidement avec la principauté.

Il n'existe pas de frontière douanière entre la France et Monaco, même un livreur Amazon pourrait le faire. Son idée est sans doute la meilleure que j'aurais entendue de tout le week-end.

Je suis le premier à briser le silence.

- Elle a raison.

- C'est une bonne alternative, en effet. Qu'en penses-tu ? demande Giuseppe en levant les yeux.

Lys suit son regard et tombe sur Nonna qui hoche la tête.

- Partons sur cela pour le moment, annonce-t-elle en prenant cette même voix autoritaire qu'elle avait déjà lorsqu'elle me formait.

Le goût du crimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant