Le goût du crime

25- La cupidité

- Lys -

J'ouvre les yeux pour la seconde fois de la journée, légèrement sonnée. Ma mémoire met un délai supplémentaire pour revenir. Je me lève dans un sursaut automatique et regarde autour de moi.

La pièce est vide.

Les traces de sang sur le drap attirent mon attention. Mes yeux s'écarquillent au rythme où mes joues s'échauffent.

Tout s'est passé si vite, je me suis rendormie sans même m'en rendre compte. Est-ce que j'ai vraiment couché avec Esteban ?

Je m'enfonce sous la couverture en pliant les genoux. Je suis nue.

Oh mon Dieu, c'est vraiment arrivé.

Le pire, c'est que j'ai adoré ça.

Et lui... Lui est parti comme si rien était ?!

J'attrape le coussin de son côté avec rage avant de constater une tâche de sang encore humide. Sa plaie s'est rouverte... C'est sûrement dû au moment où... Les images me reviennent comme un film et mon corps est traversé par la vague de sensations.

Mon téléphone vibre depuis le sol. Je me penche avec précipitation pour l'attraper et lis le nom d'Emma sur l'écran.

- Allô ?

- Ne me dis pas que tu viens de te réveiller ?! Edouard m'a interrogé à ton sujet, je t'ai couverte en disant que tu étais à la salle d'exposition mais il ne va pas tarder à aller t'y chercher si tu veux mon avis.

Pendant qu'elle parle, je regarde la barre de notifications. Meerde, j'ai déjà une heure et demie de retard, pas étonnant qu'Edouard s'en soit aperçu !

- Merci Emma, tu me sauves. Je suis en route !

- Je n'en crois pas un mot, rit-elle. Ce n'est pas dans tes habitudes, tu as une organisation irréprochable.

- J'ai pourtant l'impression de ne plus maîtriser grand-chose dernièrement, répartis-je en commençant à me préparer avec le téléphone coincé entre l'oreille et l'épaule.

- Tu as eu une nuit mouvementée ?

- On peut dire ça... Je te laisse, faut que je me dépêche, ajouté-je en tentant de mettre fin à la discussion.

- Fais quand même attention sur la route !

Je réponds par l'affirmative avant de raccrocher. Sans prendre le temps de boire un café, je sors de chez moi.

En arrivant au bâtiment, je me faufile dans mon bureau discrètement. Le reste de la journée s'écoule sans qu'Edouard ne remarque la supercherie. Je devrais faire ça plus souvent...

La vision d'Esteban à demi-nu dans mon lit me hante, si bien que je n'arrive pas à me concentrer une minute. J'oscille entre l'embarras et l'excitation.

Il faut que j'oublie ça. C'était juste un moment d'égarement, ça ne se reproduira plus. Sans oublier sa fâcheuse habitude d'apparaître puis de disparaître, cela suffit à m'enrager.

Lorsque l'horloge sonne dix-huit heures, je me retrouve à nouveau assise sur le banc entre Emma et Ambre, comme chaque soir avant l'irruption d'Esteban dans ma vie.

A vrai dire, j'ai peu à peu repris mes vieilles habitudes au cours de ces deux dernières semaines. A la différence que j'ai passé la plus grande partie de mes temps libres dans un champ de tir que j'ai improvisé au milieu de la forêt. C'est dingue tout ce qu'on peut apprendre grâce à internet aujourd'hui...

Ambre retire une cigarette et l'allume. Je la regarde du coin de l'œil en l'enviant. J'hésite à lui en demander une mais si l'incident avec la cocaïne a servi à une chose, c'est bien à me dissuader de consommer à nouveau tout type de drogue.