51- Les représailles

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– Lys –

Le chef de brigade de l'administration fiscale m'invite à entrer avant de refermer la porte.

Lorsqu'il tourne la tête, je remarque les quelques cheveux blancs à l'endroit où ses lunettes disparaissent. Il porte une cravate en satin bleu, parfaitement assortie avec le bois des meubles qui tapissent la pièce.

Je m'assois sur le fauteuil face à son bureau. Il pousse les documents entre nous avant de s'installer à son tour.

Sans que je n'aie à parler, il porte le carton à ses pieds pour le poser sur la table en verre.

- J'ai entendu vos plaintes au téléphone et j'ai convoqué mes agents afin d'éclaircir cette affaire, annonce-t-il. Un contrôle inopiné n'était, en effet, pas nécessaire ici. Les procédures n'ayant pas étaient respectées, nous vous restituons l'ensemble de vos documents. Si un contrôle s'avère tout de même nécessaire, je veillerais à ce que cela se produise dans le strict respect de nos normes.

Il pousse le carton dans ma direction.

Un sourire de satisfaction m'échappe. Je savoure cette victoire en imaginant la tête que doit tirer Stéphanie.

- C'est inutile, vous pouvez tout garder, dis-je.

Il me regarde avec de grands yeux.

- Vous souhaitez annuler votre réclamation ? Sachez que toutes les recherches ont été effacées, la procédure est annulée.

- J'en suis consciente.

Je fouille dans mon sac à la recherche de la clé USB que j'ai apporté avec moi. Je la pose sur le bureau, près de la comptabilité qui a été saisi la veille.

- Voici les documents concernant l'entreprise sur les trois derniers mois. Avec ceux déjà saisi, vous avez tout ce qu'il faut pour votre enquête.

Le chef de brigade reste muet. Sur ses vingt ans de carrière, je dois bien être la première à lui faire un coup pareil.

- V-vous savez... ce n'est pas nécessaire, termine-t-il par bégayer. L'enquête était uniquement ouverte sur le dernier mois.

- J'aimerai prouver ma bonne foi. Votre intervention a énormément perturbé mes employés, ils s'inquiètent sur la raison de votre présence qui, vous le conviendrez, était loin d'être nécessaire. Je préfère éviter tout autre contrôle fiscal pendant un certain temps et cette démarche a également pour objectif de les rassurer quant à la gestion de l'hôtel de vente. Cela nous évitera à tous deux de dépenser notre énergie inutilement en programmant une seconde intervention.

Que de bonnes paroles.

En vérité, cette clé USB est l'arme qui me sert de représailles envers Stéphanie.

Ce matin, je me suis levée à l'aube pour me rendre à mon bureau. J'ai relevé tous les documents du temps où Stéphanie effectuait encore pas mal de ventes et je les ai analysé un à un.

Les derniers jours où Edouard était encore à la direction, je ne pouvais même plus la voir tant elle m'insupportait. J'ai donc arrêté de gérer tout ce qui touchait de près ou de loin à son travail. Et, connaissant Edouard, j'étais certaine qu'il avait laissé passer quelque chose...

Une petite erreur, presque rien lors du calcul de la répartition de l'argent après l'achat. Juste assez pour que, avec une légère falsification qui passera inaperçue, cela devienne un motif suffisant de fraude.

Edouard aura peut-être droit à un simple avertissement pour négligence. Stéphanie, quant à elle, s'est versée directement la part en bénéfice et cela risque d'être bien plus sérieux.

Le goût du crimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant