Le goût du crime

33- La torpeur

- Esteban -

Le chauffeur s'arrête en bas de l'immeuble quand Lys et Stella franchissent le hall. Je sors de la voiture pour les rejoindre.

Stella porte une nouvelle robe, avec un col qui couvre ses clavicules et une dentelle beige sur une doublure de la même teinte. Elles ont fait les magasins la veille, toujours escortées par Carlo.

Depuis l'incident en Italie, Stella n'a jamais été aussi loin de moi. J'ai pas dormi de la nuit.

Sans que je lui demande, Lys a fait attention à me tenir informé. Elle a envoyé plusieurs photos auxquelles j'ai pas répondu mais qui m'ont arraché des sourires. Il y avait aussi les messages vocaux de Stella chaque fois qu'elle allait dormir.

Contre toute attente, je regrette pas de l'avoir laissé.

L'Audi noire s'éloigne avec le chauffeur quand Stella court pour me rejoindre. Lys la suit plus lentement, surveillant qu'elle ne tombe pas. Cette scène me donne l'impression qu'elle fait partie de notre vie à tous les deux maintenant.

- Papà, tu es venu.

Je passe un bras autour de sa taille pour la porter. Ça faisait un bout de temps qu'elle avait pas souri comme ça en me voyant.

- Ne me refais jamais ça.

Je dépose un baiser sur son front. Elle sent le shampoing de Lys.

- Pardon, je voulais pas te faire peur...

Lys arrive à notre niveau et s'arrête face à moi. Elle adresse un sourire à Stella dans mes bras.

- Elle était adorable, murmure-t-elle.

- Faut dire ça à sa directrice.

- Je l'ai vue à l'école hier, s'exclame Stella, mais elle n'a rien dit... Je crois qu'elle a peur de toi.

Lys se met a rire.

Je regarde l'heure sur ma montre avant de poser Stella. Je reste accroupi pour lui parler.

- Fais-moi plaisir, gioia mia. Va rejoindre Carlo qui t'attend et rentre à la maison. (surnom affectueux = ma joie)

- Je ne vais pas à l'école ? demande-t-elle surprise.

- T'iras pas à l'école aujourd'hui. Je rentre dans une heure et on fera ce que tu voudras.

Ses yeux se mettent soudainement à briller.

- Vraiment ? Tout ce que je voudrais ?!

J'hoche la tête.

- Promesso ? (promis ?)

Je dessine une croix sur son cœur. Ses petits bras passent autour de mon cou pour m'étreindre.

Elle court ensuite rejoindre Carlo et monte dans la voiture. Je la regarde s'éloigner.

- Elle doit être aux anges maintenant, relève Lys doucement.

Je me tourne et croise ses yeux gris. Une chaleur diffuse dans ma poitrine, c'est bien la première fois que je ressens ça.

- Merci.

- Ça m'a fait plaisir, réplique-t-elle avec un sourire.

Après l'avoir détaillé dans sa jupe parfaitement moulante et son chemisier rouge, je la contourne en me dirigeant vers sa place de parking. Je lève la main pour lui faire signe de me suivre.

- On prend ta voiture.

- Pour aller où ? demande-t-elle surprise.

Ses talons résonnent sur le trottoir jusqu'à me rattraper.