23- La souffrance

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- Esteban -

Deux semaines plus tard.

Je perds trop de sang. Ma main fourmille et j'ai du mal à tenir le volant. La compression que j'effectue avec la paume droite ne suffit plus.

J'atteins le parking des urgences et arrête la voiture vers le fond. Quand je m'apprête à sombrer dans l'inconscience, un homme d'une cinquantaine d'années ouvre brutalement ma portière.

Un soupir de soulagement m'échappe, qui ressemble davantage à un râle de douleur, en constatant qu'il s'agit du médecin travaillant pour les Musinato que j'ai prévenu plus tôt.

- Esteban, hurle-t-il en secouant mon visage.

J'ouvre les yeux plus grands et prends sur moi pour arriver à parler.

- La balle... est sortie.

Il me soulève et me penche sur le volant pour examiner la plaie. Mon cœur s'emballe, je le sens pomper avec difficulté le peu de sang qu'il me reste.

- C'est pas top moche mais on a pas le temps pour les antidouleurs, déclare-t-il en retirant le morceau de chemise pressé sur le trou dans mon épaule gauche.

- Ça va, c'est bon.

Il ouvre une trousse contenant le matériel qu'il a emporté et la pose sur un coin de mon siège. Je serre le poing autour du volant pour m'aider à supporter. Il m'injecte une solution puis nettoie la plaie avant de traiter.

- Que s'est-il passé ? demande-t-il dans une tentative infructueuse de me distraire pendant qu'il enfonce l'aiguille.

- Ce sont les serbes, ces fils de pute m'ont piégé. Ils vont l'avoir leur putain de guerre.

- T'es conscient que ça va faire un gros bazar dans tes affaires tout ça ?

- Sti cazzi. (Je m'en bats les couilles)

- La famiglia sera pas du même avis. (La famille)

- On est pas en Italie là, je gère mes affaires comme je l'entends.

A mon ton, il n'ose pas répliquer autre chose. Après une bonne demi-heure, il enroule un bandage autour de l'épaule pour l'immobiliser et s'écarte en regardant le travail.

- C'est bon. Faut pas que tu la bouges pendant quelques jours ou tu risques une nouvelle hémorragie.

J'hoche la tête. Ça faisait un bout de temps qu'on m'avait pas tiré dessus mais je n'ai pas pour autant oublié les consignes.

Il scanne le parking du regard avant de parler à nouveau.

- Je peux pas te garder ici, tu le sais sinon-

- C'est bon, je me débrouille.

- Tu ne vas pas rentrer, hein ?

- Stella me verra pas dans cet état.

- Il faut que tu te reposes, t'as perdu trop de sang, insiste-t-il.

Je tourne les clés dans le contact pour démarrer. Il s'éloigne avec résignation en refermant la portière. Je repars aussi vite.

Une fois engagé, je réfléchis à la route que je dois emprunter. Il a raison, j'ai perdu trop de sang donc je tiendrais que quelques minutes avant de risquer de m'évanouir.

Impossible de me rendre à l'entrepôt avec les serbes, je ne suis pas en état de me défendre s'ils tentent une embuscade et ils le savent. Mais je préférerais mourir que de laisser Stella me voir ainsi. Elle est habituée à ce que je m'absente toute la nuit. Par contre, elle supportera pas de me voir blessé.

Le goût du crimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant