11- Le dégoût

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Petit rappel d'avertissement : cette histoire contient des détails assez violents qui peuvent heurter la sensibilité.

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- Lys -

La salle d'interrogatoire sent la prison. J'ai envie de vomir. Sans oublier cette putain d'ampoule qui clignote encore et encore. Je la fusille du regard en regrettant que mes yeux ne soient pas deux lasers qui puissent la transpercer définitivement.

Le secteur public est peut-être un tantinet limité financièrement parlant, cela n'empêche pour autant pas de remplacer une fichue lumière. Je parie que c'est fait exprès. Pour faire craquer les esprits affaiblis par la culpabilité.

Je ne suis pas faible. Je n'ai rien à me reprocher dans cette histoire et ma vie mérite que je me batte pour elle. Qui d'autre le ferait pour moi ?

Cette pièce est si bien isolée que j'entends presque mon cœur battre. Je tape du bout de l'ongle sur la table en métal, sans doute pour générer un son qui masque mon angoisse croissante.

La porte s'ouvre et je lève immédiatement la tête en direction de l'intrus. Ils ont envoyé une femme pour relever ma déposition. Ce n'est pas si stupide dans le fond. Ils doivent certainement compter sur un genre de solidarité féminine pour me faire parler. Malheureusement pour eux, mes liens avec Esteban n'ont rien de sentimental.

- Bonjour, je suis l'officier de police judiciaire chargée de mener cette entrevue. Pouvez-vous me rappeler votre identité ?

Comme si quelqu'un voudrait venir à cette entrevue à ma place.

- Lys Daunely.

- Parfait, madame Daunely. Je vais commencer par vous rappeler brièvement vos droits. Vous pouvez vous taire sur les faits énoncés et quitter le lieu à tout moment mais cela sera notifié dans le procès-verbal. Vous avez droit à un interprète si...

Mes oreilles n'écoutent plus. Il n'y a que deux types d'auditions possibles : celles en tant que témoin et celles en tant que suspect. L'annonce de mes droits m'informe du quel fait partie la mienne.

- E-excusez-moi mais je ne comprends pas vraiment ce que je fais ici.

- Mes collègues ont dû vous le dire, réplique-t-elle avec une moindre compassion. Il s'agit d'une enquête ouverte suite à la découverte du corps de Kahil Bozkurt.

- Pardon vous dites ? Bo- BoSkuLte ? Il me semble en avoir entendu parler à la radio effectivement. Qu'ai-je à voir dans tout cela ?

- Eh bien, c'est la question à laquelle nous tentons de répondre en vous convoquant ici madame.

- Vous ne pensez tout de même pas que j'ai...

J'imite un parfait mouvement nauséeux. Ce n'est pas si difficile lorsque l'on a vraiment envie de vomir.

- A ce stade nous n'écartons aucune possibilité. Toutes les précautions sont de mise.

- Je ne comprends rien...

Le visage de l'officier semble s'adoucir en déchiffrant mon expression perdue.

- Auriez-vous une idée de ce qui a pu vous faire convoquer ici ? interroge-t-elle.

Je fais mine d'hésiter une seconde :

- A vrai dire, en y pensant, je crois avoir entendu que le meurtre de cet homme avait eu lieu près du Sonetta. C'est effrayant. Dire que je me tenais là, à quelques misérables mètres, pendant qu'il se vidait de son sang. Est-ce pour cela ? Vous convoquez tous les gens qui étaient présents ce soir-là ? Si c'est le cas je vous assure que je n'ai rien vu. Attendez que j'y repense une minute...

Le goût du crimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant