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Florence + The Machine - You've Got the Love

À mon réveil, la chambre baignait encore dans la douceur de la pénombre. Les lumières diffuses des immeubles alentour, allumées en continu, perçaient timidement l'obscurité. Celles plus discrètes du reste de la ville, scintillant au loin, se reflétaient comme une constellation d'étoiles sur la vitre noire de la penderie.

Le jour n'était pas encore levé. Et pour cause, d'après le réveil, c'était le petit matin, ici sur la Côte Est. Le beau milieu de la nuit chez moi.

Le bras gauche de Cameron m'entourait la taille. Je sentais son souffle lent et régulier chatouiller ma nuque. L'odeur musquée de sa peau sur la mienne.

Depuis que j'avais ouvert les yeux, je n'avais pas bougé. Une boule de plomb m'écrasait l'estomac. À quoi avais-je pensé ? Ou plutôt, pourquoi n'avais-je pas réfléchi ?! Je regrettais terriblement ce qui c'était produit la nuit dernière. Pas l'acte en lui-même, non. Ça avait été merveilleux. Bien au-delà de ce qu'on pouvait attendre d'une nuit de luxure avec le malin – si tant est qu'on était assez fou pour lui succomber. Seulement, ça avait aussi été stupide. Irréfléchi.

Maintenant que je n'étais plus enivrée par l'alcool, ou par le charme irrésistible de Cameron, j'avais retrouvé ma lucidité. Mon esprit était de nouveau vif et clair. Et plus j'analysais la situation à travers mes paupières mi-closes, plus je me rendais compte des potentielles conséquences à venir – pour moi bien sûr. Lucifer, lui, ne devait craindre rien ni personne sur cette Terre. Du moins, c'est l'impression qu'il donnait.

Ce qui était loin d'être mon cas.

Si Clarke apprenait notre batifolage, j'étais certaine de pouvoir faire mes adieux à la vie. Il penserait immanquablement qu'en m'acoquinant avec le diable, je l'avais trahi. Que je n'accomplirais pas ce qu'il avait exigé. Voire même que j'étais une sorte d'agent double. Je ne pouvais prendre un tel risque.

Il fallait que je parte. Sur le champ.

Retenant ma respiration, je me dégageai du bras de Cameron. Je le reposai ensuite très lentement sur le drap, et me levai avec la plus grande précaution. Un grognement rauque s'échappa de sa gorge. Il s'agita soudain, cherchant à tâtons sur l'oreiller comme un enfant à qui on aurait enlevé son doudou. Je me figeai, les poings serrés contre ma bouche. Quelques secondes passèrent durant lesquelles je n'osai le moindre mouvement. Puis je me relâchai, voyant qu'il s'était apaisé. Son torse continuait de se soulever avec la même lenteur. Il dormait toujours. Et pourtant, je n'avais pas bougé. Je ne parvenais pas à détacher mon regard de lui.

Diable, qu'il était beau...

Même assoupi, il était beau. Peut-être encore davantage que quand il était éveillé. D'une manière différente, en tout cas – pure et éthérée. Il paraissait si doux, si vulnérable. Un ange tombé du ciel.

N'était-ce pas ce qu'il était ?

Le doute était permis. Car en dépit de sa nature divine, de sa perfection céleste, il avait tout du tentateur. Né pour dévoyer jusqu'aux âmes les plus prudes et innocentes.

Son corps dénudé, entièrement offert à ma vue, était un appel au péché. Une œuvre d'art à faire rougir n'importe qui – y compris moi. Dans le clair-obscur de la pièce, le galbe de ses muscles semblait tracé au fusain. Ses biceps enlaçaient les multiples oreillers comme autant d'amants. La cambrure de son dos dessinait une courbe lascive et se terminait en bas sur un bel arrondi.

Des images en rafale, souvenirs de notre étreinte, affluèrent dans ma tête. Les braises encore chaudes de la veille reprirent alors, éveillant en moi un feu nouveau.

Lips As Red As Hell [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant