La sensation au réveil fut déroutante. Déplaisante, surtout. J'avais l'impression qu'un bovin – très affectueux, semblait-il – me soufflait dans l'oreille. Mais ce n'était que Cassie. Elle avait roulé de mon côté, et s'étendait en diagonale en travers du lit, un bras par-dessus ma tête. Je la repoussai avec le coude en me demandant comment j'avais pu si bien dormir... L'épuisement, sans doute.
Entre les longs rideaux opaques, la lumière du soleil filtrait en raies intenses. La matinée semblait bien entamée, et visiblement, la chaleur serait encore au rendez-vous. Aujourd'hui, je l'apprécierais, c'est sûr, car je n'aurais pas à la subir. J'en tirerais partie. En clair : je ne comptais rien faire d'autre que me prélasser, sans lever le petit doigt. Et le premier qui dirait différemment... son sort serait scellé !
Stimulée par la promesse d'une journée de farniente, je m'arrachai des draps en essayant de ne pas réveiller la bête ronflante qui partageait ma couche. Je comptais prendre la salle de bain en otage avant qu'elle-même ne se l'accapare. Sur la pointe des pieds, je gagnai le couloir, dépassai la chambre de Charlie encore fermée, et poussai la porte de gauche.
Diable !
J'étouffai un cri.
Non, Charlie ne roupillait pas dans sa chambre comme on pouvait raisonnablement le supposer de quelqu'un qui s'était retrouvé ivre mort la veille – surprise ! Il se tenait debout dans la baignoire devant moi, droit comme un i, frappé de stupeur. Et torse nu.
L'étonnement passé, il attrapa la serviette sur le rebord, avec un temps de retard sur mon regard qui était descendu par réflexe. Non, il n'avait pas non plus oublié que son t-shirt... La poisse ! Je me cachai les yeux d'une main, tachant d'oublier cette partie de Charlie que je n'avais jamais demandé à rencontrer.
— P...p... pourquoi t'as pas mis le verrou ? bégayai-je à moitié en reculant.
— Oublié.
Je refermai la porte d'un coup sec, sans plus savoir si j'étais embarrassée ou agacée.
Agacée, en tout cas, je le fus très vite en trouvant Cassie dans mon dos. Une fois n'est pas coutume, je sursautai. Au moins, elle n'était pas nue, constatai-je une main sur le cœur.
— Ça va ? Je t'ai entendue crier... T'as vu un monstre, ou quoi ?
— Pas loin. Reste à distance de la salle de bain, c'est tout.
Bien entendu, elle entreprit de faire l'inverse, de telle sorte que je n'eus d'autre choix que de la saisir par le bras, et de l'entrainer au salon.
— Il vaudrait mieux laisser un brin d'intimité à Charlie, annonçai-je en me laissant tomber dans un fauteuil écru.
— Ne me dis pas que... Oh, c'est pas vrai ! s'exclama-t-elle d'une voix de celle qui venait d'entendre une excellente nouvelle.
Elle s'assit sur le canapé en face, ses mains couvrant une bonne partie de son visage, devenu rouge vif.
— Alors ?!
Je la regardai fixement. Pourquoi chuchotait-elle tout à coup ?
— Allez, donne des détails !
Je continuai de l'observer, totalement désemparée. Qu'attendait-elle de moi au juste ? Que je la renseigne sur l'état ses abdominaux ? Le développement de ses pectoraux ? Ou pire encore, de son...
Heureuse coïncidence, je n'eus pas le temps d'aller au bout de cette pensée. Derrière Cassie, le lycéen venait de faire son entrée dans le salon, vêtu d'un simple short, laissant son torse imberbe et humide à la vue de qui voulait bien le voir.
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Lips As Red As Hell [TERMINÉ]
ParanormalQuand la Mort débarque au lycée... Figée dans ses vingt-et-un printemps depuis des siècles, Eléonore mène à San Francisco une vie seulement rythmée par son travail : faucher des âmes. Sa routine est aussi plate que l'encéphalogramme d'un cadavre et...