Pendant ce temps, le soleil avait continué sa course. Ses rayons lumineux étaient devenus rasants, m'obligeant à abriter mes yeux derrière le pare-soleil.
Puis le jour déclina doucement. Je constatai avec amertume que la température n'opérait pas la même décrue. Le bitume avait emmagasiné toute la chaleur de la journée qu'il libérait maintenant en vagues ondulantes. À travers leur faible miroitement, j'apercevais les extérieurs scintillants de L.A. Nous touchions presque au but.
— Au fait, tu as réservé dans quel hôtel ? demandai-je en allumant les phares tandis que la nuit tombait.
Comme je n'avais rien eu à payer, je ne m'étais pas préoccupée des détails. Cassie avait tenu à m'inviter, soutenant que cela couvrirait les frais d'essence qui étaient à ma charge.
— Le Palm.
— Palm... comme Palm Resort ?
Elle confirma d'un air distrait, continuant de jouer avec une mèche de cheveux. Pas sûre qu'elle ait saisi, je réitérai ma question.
— Oh pour l'amour du ciel ! Oui, c'est ça, le PALM, finit-elle par s'exaspérer avant de replonger le nez dans l'article qu'elle lisait avec assiduité, ce qui n'était pas pour déplaire.
Le Palm. Je n'en revenais pas. Évidemment, j'en avais maintes fois entendu parler, et pour cause, il s'agissait d'un établissement mythique, construit au milieu du XXe siècle. Un cinq étoiles sans fausse note, perché sur le flanc escarpé d'une colline de Malibu. Le Palm avait traversé les âges. Sa réputation s'étendait bien au-delà des frontières du pays, notamment parce qu'autrefois, les célébrités les plus en vue d'Hollywood s'y pressaient. Encore aujourd'hui, il arrivait qu'une star occupe le penthouse qui jadis avait abrité les idylles secrètes du cinéma d'après-guerre. Les meilleures chambres offraient une vue sur mer, et la piscine – agrandie au fil des rénovations – était tout aussi légendaire que les fêtes qui s'y déroulaient.
En matière d'hébergement, les lycéens d'aujourd'hui avaient meilleur goût que leurs prédécesseurs. Ainsi qu'un portefeuille mieux garni.
Pas tous, j'imagine.
Cela tenait surtout au fait que je ne fréquentais que des « fils et filles de » à Pacific High. À titre d'exemple, le père de Duncan était le roi de l'immobilier dans la Silicon Valley ; celui de Sarah, un éminent cardiologue ; et la mère de Jenny, une brillante avocate. Les parents de Cassie, eux, travaillaient dans l'évènementiel, m'avait-elle dit. J'ignorais ce que cela recouvrait exactement. Ça n'était pas limpide, Cassie demeurait réservée sur le sujet. Un comble pour une fille si bavarde... Quant aux autres, je ne doutais pas que leur ascendance soit aussi bien placée sur l'échelle sociale.
Bientôt, nous quittâmes les grands axes qui menaient dans le ventre de L.A. pour prendre la direction de la côte. La route se fit sinueuse, m'obligeant à ralentir. À si faible allure, presque aucun air ne pénétrait l'habitacle, même avec les fenêtres grandes ouvertes. C'était devenu une étuve, comme le faisait si justement remarquer Cassie, maintenant qu'elle se savait proche d'atteindre destination.
La délivrance prit la forme d'un énième virage. L'asphalte se sépara en une fourche qui montait en pente raide. De hauts palmiers s'élevaient de chaque côté de l'allée. Tout au bout, l'hôtel érigé sur dix étages surplombait les collines alentours, offrant une vue de choix sur l'océan.
Je roulai au pas jusqu'à l'auvent près duquel un voiturier attendait. Soudain, un bruit de papier froissé retentit derrière moi, suivi de près par un grognement.
— AÏE ! Mais t'es folle ?! s'écria Charlie.
Cassie venait de lui jeter son magazine à la figure.
VOUS LISEZ
Lips As Red As Hell [TERMINÉ]
ParanormalQuand la Mort débarque au lycée... Figée dans ses vingt-et-un printemps depuis des siècles, Eléonore mène à San Francisco une vie seulement rythmée par son travail : faucher des âmes. Sa routine est aussi plate que l'encéphalogramme d'un cadavre et...