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Song for Zula - Phosphorescent

Une sensation de vertige s'empara de moi.

Sydney s'était mise à sautiller sur place en tapant des mains. Les yeux agrandis de terreur, je contemplais Clarke lui passer mon cristal derrière la nuque.

— C'est ça le problème avec vous, les Morts, railla Sydney, le sourire méprisant. Vous vous croyez irremplaçables. (Elle soupira.) Ça doit te faire tellement mal de tomber de ton piédestal, ma pauvre...

Mon piédestal ?! Je n'en avais cure depuis longtemps. Je ne pensais qu'à David.

— Va te faire...

— LES FILLES ! nous somma Clarke avec autorité. Les filles, reprit-il plus doucement. Du calme.

Il me considéra, le regard affecté.

— Ne sois pas triste, Eléonore. Ce cristal ne sera pas une grosse perte. Sa malédiction vous aurait rattrapé, et il aurait fini par tuer David. Tôt ou tard.

Sa tirade me laissa de marbre. Ça faisait longtemps que le choc et la panique m'avaient amputé de ma lucidité. La seule chose dont j'étais réellement consciente, c'était le compte à rebours mortel qui était enclenché pour David. Alors, même si je n'éprouvais aucune curiosité à l'égard des propos loufoques de Clarke, je saisis l'opportunité de le ralentir.

— Sa malédiction ? m'enquis-je d'une voix blanche, aux aguets.

Il ne résista pas à l'envie de jubiler de mon ignorance.

— Oh, Eléonore, tu ne t'es jamais demandé pourquoi tu étais si souvent au mauvais endroit, au mauvais moment ? Pourquoi autant d'évènements tragiques se déroulaient sous tes yeux ?

— Euh... bien sûr que si !

En réalité, pas vraiment. Que ça soit le Titanic ou mon avion en direction de New York, le onze septembre, j'avais toujours pris ces évènements pour de terribles coïncidences. Le fruit du hasard, ou bien le résultat des probabilités qui voulaient qu'en vivant des centaines d'années, on soit forcément confronté à des drames humains.

Mais, à mes yeux, tout ça n'avait plus aucune espèce d'importance. À demi-absente, je continuais de surveiller les deux charognards, grimaçant à chaque fois qu'ils semblaient vouloir avancer vers David.

— J'appelle ça malédiction, mais c'est plutôt une spécificité du cristal, poursuivit Clarke d'un ton magistral. Il ne provoque pas les événements. Il se contente de t'y attirer, sans qu'à un seul instant tu ne te rendes compte qu'il t'influence, te manipule. C'est assez insidieux, je le reconnais.

Il haussa les épaules avec fatalisme.

— Enfin... soupira-t-il en guise de conclusion.

Son pied droit se souleva en même temps que mon cœur.

— Pourquoi ? lançai-je à la volée.

Aussi bien Sydney que David, tous eurent la même expression d'incompréhension et d'agacement que Clarke. Au moins, il n'avait pas bougé.

— Pourquoi quoi ?

Oui, pourquoi quoi, hein ?!

Mon cerveau pédalait à toute allure. Tâchant de me raccrocher aux branches, j'essayai de paraître irritée à mon tour.

— Eh bien, pourquoi avez-vous lancé cette stupide malédiction ?!

Clarke s'étrangla. À cet instant, il paraissait sincère.

— Ça, il faudrait le demander à Cameron. C'est lui qui, en premier lieu, a voulu jouer aux apprentis sorciers avec les cristaux primaires. (Il se massa le front.) De ce que j'ai compris, ce sont des effets secondaires.

Lips As Red As Hell [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant