Chapitre 114 : Premier contact difficile

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 Bien qu'Elyazra était déçue de ne pas pouvoir continuer la dispute qu'elle trouvait des plus distrayantes, il avait bien fallu sonner un cesser le feu à l'arrivée des anges. N'ayant aucune idée de leurs intentions, il fut aussi décidé d'attendre de voir ce qu'ils leur voulaient avant de faire quoi que ce soit. Avant même que l'un d'entre eux n'ouvre la bouche, le fait qu'ils se posent tous de manière à encercler le groupe, armes à la main, n'augurait rien de bon.

— Ely ?

— Quoi encore ?

— éloigne ta main de ta rapière s'il te plaît. Laissons d'abord une chance au corps diplomatique de l'expédition.

— Mais je suis la diplomatie incarnée ! S'offusqua la demie-dragonne.

Il est vrai que, si l'on s'en référait à son dictionnaire, elle était effectivement la diplomatie incarnée. Il n'était cependant pas question ici des définitions qu'elle donnait aux mots, mais de leur véritable signification. Ceux que Syara appelait le corps diplomatique, à savoir Orélius et Elirielle, se placèrent de toute façon devant elles et surtout face à l'ange à l'armure la plus rutilante. Avec ces deux-là devant et les deux sœurs terreur derrière, Phi se retrouvait au milieu, protégée de tous les côtés si les choses venaient à mal tourner.

— Quel accueil ! S'exclama Elirielle. Bien le bonjour messieurs. Y a-t-il quoi que ce soit que je puisse faire pour vous ?

— Que faites-vous ici ? Questionna d'une manière pour le moins agressive l'ange qui semblait être le chef du groupe.

— Vous faites bien de demander ! Justement, nous nous étions égarés, expliqua Orélius. Aurions-nous pénétré par mégarde la frontière de terres défendues ? S'il s'agit bien de cela et que vous êtes ici pour cette raison, nous nous en excusons et acceptons avec joie d'être guidé dans la ville la plus proche.

Si Orélius avait un tempérament infiniment plus calme que sa cousine, cela ne faisait pas très longtemps qu'il avait quitté la forêt pour rejoindre la ville. Il manquait donc encore d'expérience en termes de communication. Pour Syara, s'il avait parlé de la même manière devant elle, elle aurait trouvé ça plus que louche et se serait mise sur la défensive.

Les anges étaient visiblement du même avis qu'elle. Leur chef ne daigna même pas répondre et leva une main au-dessus de son épaule. Le seul membre de sa troupe à être resté à l'écart banda alors son arc et tira une flèche en l'air. Vu la trajectoire, il n'y avait aucune chance qu'ils soient directement ciblés, mais la violoniste s'attendait à tout et voyait que sa protégée préparait déjà un sort pour les abriter au besoin.

Arrivée pile au-dessus d'eux, la flèche éclata dans un bruit cristallin et fit tomber sur le groupe une pluie de poussière de diamant. Il y avait, là encore, de quoi se méfier et la beast était prête à invoquer son violon pour se défendre, quitte à leur montrer qu'elle maniait la magie grâce à un instrument.

Les petites particules brillantes ne semblaient cependant rien lui faire lorsqu'elles se déposaient sur sa peau. De plus, si leur effet ne se montrait qu'en les inhalant, ils allaient être bien déçus vu qu'ils avaient avec eux une dragonne qui pouvait résister sans mal à ce genre de phénomène proche du poison.

— C'est joli tout ça. C'est pour nous souhaiter la bienvenue ? Questionna Elyazra.

Se tournant vers elle pour lui intimer une nouvelle fois de se taire et de laisser faire les diplomates, Syara s'interrompit d'elle-même et fixa avec plus d'insistance sa sœur. Il y avait quelque chose qui n'était pas normal chez elle.

— Quoi ? J'ai quelque chose sur le visage ?

Avec son air surprise, ce détail était encore plus flagrant. Les pupilles de sa sœur avaient repris une forme en amande. Ses ailes semblaient aussi perdre de leur éclat et certaines plumes apparaissaient transparentes.

Même s'il n'en fallait pas plus pour qu'elle comprenne ce que faisait cette poussière de diamant, Syara inspecta le dos des compagnons qui se trouvaient devant. Leurs ailes aussi disparaissaient peu à peu et celles, véritables, de Phi étaient de plus en plus visibles.

De son côté, si elle ne pouvait inspecter le haut de sa tête pour voir si ses oreilles réapparaissaient, elle sentit cependant par le toucher que les fausses qu'elle avait de chaque côté étaient de moins en moins tangibles. De la même manière, sa queue se dévoilait peu à peu aux anges derrière elle qui semblaient en être étonné.

Si dans leur monde la magie se manifestait chez les musiciens au travers d'instruments liés ou d'instruments de l'âme, ici cela devait se faire grâce à des armes. La flèche qui avait été tirée devait dissiper les enchantements.

Cela voulait-il dire qu'ils ne pourraient plus les comprendre ? Elle s'était donné du mal pour enchanter des colliers avec un sort de traduction et ces imbéciles avaient ruiné tous ses efforts comme ça, à leur première rencontre ?!

Non, son raisonnement n'était pas le bon, se rassura-t-elle. Certes, ils n'avaient pas dit un mot depuis que la flèche avait été tirée, mais un autre enchantement perdurait. Si cette poussière de diamant était aussi efficace, Phi aurait retrouvé sa taille originelle, mais il n'en était rien. La beast en conclut donc qu'elle ne dissipait que les illusions.

Quoi qu'il en soit, voir qu'ils n'étaient pas des anges et, au vu de leur réaction, qu'ils ne faisaient même pas partie des espèces connues de ce monde, le comité d'accueil se montra plus menaçant. Chacun d'entre eux, armes invoquées en main, adopta une posture qui ne laissait que peu de doute sur leurs intentions.

Ces armes devaient être l'équivalent des instruments et, si elle-même était occupée à refermer le portail entre les deux mondes pendant le combat qui l'avait opposée à sa mère, Syara avait bien vu que les anges armés ainsi étaient redoutables. Avoir un dragon avec eux allait-il suffire ?

— C'est bon ? Le corps diplomatique a fini de parler ? On peut passer à la vraie diplomatie maintenant ? Demanda d'un air las la demie-dragonne.

— Ely, ça n'est pas le moment d'envenimer les choses, grinça Elirielle.

— Mais envenimer quoi ? Tu ne vois pas qu'ils sont sur le point de nous sauter dessus ? Bon, je dois bien avouer qu'il y en a deux ou trois dans le tas où ça ne me dérangerait pas si j'étais célibataire, mais vu que je suis fidèle...

Tout en appuyant sur son allusion, elle fixa l'un d'eux en particulier, lui sourit et lui offrit un clin d'œil. S'il y avait bien un talent qu'elle avait travaillé en écumant les bars de Léfarène, c'était bien l'art de la séduction qui lui permettait de boire à l'œil. L'ange visé avait beau ne pas être de la même espèce, il n'était visiblement pas insensible à ses charmes. S'il savait ce qui l'attendait si la situation ne se réglait pas rapidement, pensa Syara, presque désolée pour lui.

— Soldats ! Arrêtez-l...

— Baissez vos armes ! Ordonna une voix derrière le chef du groupe.

Qui que soit cette personne que Syara n'avait même pas vu arriver et qui était encore cachée par les autres, elle se fit immédiatement obéir et, en un instant, toutes les armes disparurent de leurs mains. Le sang n'allait peut-être pas couler finalement.

Le violon de cristal : l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant