Chapitre 164 : la progression d'Elyazra

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 Tout en ouvrant doucement les yeux, Syara assista à une scène malheureusement trop familière à son goût. Celle de Phi se jetant à son cou au premier signe de rétablissement. La pauvre avait dû, une fois de plus, être morte d'inquiétude en voyant qu'elle ne se réveillait pas malgré ses soins et avait aussi dû garder son chevet.

— Tu es réveillée ! S'exclama la fée.

— Désolée de t'avoir inquiétée. Tomber inconsciente était le prétexte rêvé pour me convoquer dans le violon.

— Tu vois, je t'avais dit qu'elle était là-bas ! Lança Elyazra.

En posant son regard sur sa sœur, la beast eut un froncement de sourcil. Ça n'était pas à cause de ce qu'elle venait de dire, mais plutôt de sa tenue. Si, à son premier essai de ses nouveaux pouvoirs, on pouvait dire que ses vêtements étaient en lambeau, caractériser ce qu'elle portait de cette manière était à présent un doux euphémisme.

La demie-dragonne était presque entièrement nue et cachait ce qu'il y avait à cacher avec des restes de bout de tissus attachés les uns aux autres par des nœuds. Nul doute qu'elle ne s'était pas inquiétée du non réveil de la violoniste et qu'elle avait continué son entraînement.

— Se battre à poil, c'est une façon de déstabiliser l'adversaire ? Demanda-t-elle en rigolant.

— Je l'ai dit. J'ai ruiné ces vêtements, alors autant les utiliser jusqu'au bout, se défendit-elle. Je commence à comprendre le truc, je pense que d'ici quelque temps, les explosions ne me toucheront plus.

— Oui, bah ça serait bien que tu te magnes à contrôler ton pouvoir, parce que c'est moi qui trinque quand tu échoues ! Reprocha Orélius.

Reportant son attention sur le fils de Shay, Syara remarqua immédiatement son œil au beurre noir. Il n'en fallait pas plus pour que la beast reconstitue ce qui s'était passé. Dans un nouvel essai de ses compétences, Elyazra avait fini d'achever sa tenue. En tant que spectateur, Orélius ne devait pas avoir détourné le regard assez vite lorsque la fumée s'était dissipée, ce qui lui avait valu de subir le courroux de sa cousine.

— T'as qu'a regarder ailleurs ! S'exclama-t-elle, confirmant ainsi toute l'histoire.

— Je te l'ai déjà dit, je ne vois pas pourquoi tu t'énerves comme ça alors qu'on s'est toujours lavé ensemble quand on vivait sous le même toit. Te voir ainsi ne me fait ni chaud ni froid. Mais puisque tu insistes, très bien, je n'assisterai plus à tes entraînements. À la place, j'aiderai Syara.

— Attention, il est possible que je finisse dans les même état qu'elle, plaisanta la beast.

— S'il met trop de temps à tourner la tête, n'hésite pas à me le dire que je lui crève les yeux.

— Mais c'est pas un peu fini vous deux ? Réprimanda Elirielle. Si vous continuez à vous bouffer le nez comme ça, je vous attache et vous servirez de mannequin d'entraînement à Syara, c'est compris ? En plus, ça sera un bon exercice pour Phi qui aura à vous retaper juste après.

— Encore faut-il qu'elle ne s'explose pas la tête avec son propre sort ! S'esclaffa Elyazra. Si elle continue comme ça, je veux bien faire le mannequin d'entraînement, je ne risquerai pas grand-chose.

— Quelque chose me dit que ça ne va pas se reproduire, je me trompe ? Demanda la dragonne.

— Je pense aussi, affirma la violoniste.

Vu le sourire qu'elle affichait, Syara attira l'attention sur elle. Elle expliqua ainsi ce qui lui était arrivé pendant qu'elle était inconsciente et pourquoi son tout premier sort avait réagit ainsi. L'idée que l'entité qui lui donnait ses pouvoirs était l'ombre du violon n'enchanta pas Elirielle et le pacte qu'elle avait conclu demandant qu'elle coopère en échange d'une libération fut fortement critiqué. Malgré tout, Syara avait confiance en cette nouvelle entité qui était autant l'ombre qu'elle-même. Et quand bien même il s'agissait d'une tromperie, il était dans son intérêt de l'aider à vaincre le roi, chose qui passait avant tout le reste.

— Et Cristal ? Ça ne va pas lui faire de mal ? S'inquiéta Phi.

— Même si elle a gardé une bonne partie de son caractère, l'ombre peut être considérée comme ayant été purifiée, donc utiliser le violon ne lui fera pas de mal. Aussi, vu qu'on sait maintenant où elle est passée, nous n'avons plus à nous méfier du prochain coup fourré qu'elle pourrait imaginer.

— Ça veut dire qu'on va bientôt pouvoir s'affronter ? J'ai hâte ! Trépigna Elyazra.

— Commence par ne pas finir à poil à chaque attaque et on en reparlera après, commenta Orélius.

— Outre cet inconvénient qu'il va effectivement falloir régler au plus vite, je trouve qu'elle progresse à une vitesse prodigieuse, commenta Élane. Il faut trois ans pour s'approprier convenablement les pouvoirs de son arme et elle a abattu l'équivalent de six mois en quelques entraînements, comme si c'était inné chez elle.

L'ange, contrairement à Orélius, n'avait aucun coquard. Avait-il détourné le regard au bon moment ou bien Elyazra n'osait-elle pas s'en prendre à lui parce qu'ils n'étaient pas encore assez proches ? Cette question obnubilait bien plus la violoniste que toutes celles qui pouvaient tourner autour du génie combatif de sa sœur.

— Ely est bien plus résistante qu'un ange et pratique déjà la magie héritée de son sang, ça doit jouer, supposa Orélius. Si un ange avait les mêmes pouvoirs qu'elle, il aurait été gravement blessé à sa première tentative et aurait dû rester en convalescence pendant des semaines là où elle peut continuer à s'entraîner.

— Ça devrait être pareil pour toi. Tu n'es pas tenté par une arme de l'âme comme elle ? Demanda Syara.

— Non merci. Je préfère me fier aux techniques que je connais et que je maîtrise plutôt que de miser sur quelque chose de nouveau alors que nous sommes si près du grand affrontement. Je sais que je peux très bien ne pas l'utiliser si je ne me sens pas près, mais j'ai le sentiment que je ne pourrais pas m'empêcher d'y avoir recours le moment venu.

Orélius étant quelqu'un de posé et de réfléchi, ce qu'il disait était effectivement cohérent. Malgré son coquard, il avait aussi prouvé qu'il surpassait Elyazra en termes de force brut et qu'il pouvait la maîtriser dans un combat à mains nues lorsqu'il s'y mettait sérieusement et ne se laissait pas faire. Dans leur formation, lui allait être à l'avant-garde pour protéger ceux à l'arrière tandis qu'Elyazra serait à ses côtés non pas pour protéger, mais pour faire des ravages. À moins que sa magie ne soit un quelconque renforcement, l'intérêt était donc moindre.

Orélius avait aussi relevé un point important. Le grand affrontement final était dans peu de temps. Syara ne pouvait donc pas se permettre de perdre du temps à rester alitée. Avec autant de détermination que d'impatience, la violoniste se releva donc, prête à reprendre son entraînement sur des bases plus saines.

Le violon de cristal : l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant