Chapitre 137 : Une histoire plus arrangeante

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 Les recruteurs mis hors d'état de nuire, le calme était revenu chez les villageois. La plupart restaient tout de même choqués par ce qu'ils venaient de voir et certains gardaient un regard méfiant envers ces visiteurs qui les avaient pourtant sortis d'une mauvaise passe. Pour Syara, cela la confortait dans l'idée qu'elle devait empêcher cette guerre par tous les moyens. Combattre des envahisseurs arrogants, belliqueux et sanguinaires était une chose, tuer des personnes enrôlées de force qui avaient déjà du mal à supporter un petit accrochage sans aucune giclée de sang en était une autre.

Il devait bien y avoir des assoiffés de sang et de conquête dans le rang des anges, mais de ce que la beast avait vu jusque-là, la plupart ressemblaient bien plus à des citoyens tout à fait normaux qui vivaient en paix. Si le but restait le même, ses motivations changeaient peu à peu. Certes, elle ne voulait toujours pas voir son monde se faire envahir, mais elle se disait aussi à présent que les têtes pensantes de cette invasion avaient fortement sous-estimé leurs ennemis et qu'une fois la surprise passée, ceux de son monde allaient tout simplement pulvériser les assaillants dans une contre-attaque dévastatrice.

— Est-ce que tout le monde va bien ? Questionna Élane. Si quelqu'un a été blessé, nous avons une soigneuse avec nous.

— Ou... Oui. Venez me voir si vous avez mal quelque part, s'avança Phi.

Ces simples paroles permirent d'abaisser la méfiance de la plupart de ceux qui continuaient à les regarder de travers. Le véritable ange du groupe étant celui qui se trouvait le plus proche de celle qui avait été prise en otage, il l'aida à se relever et inspecta rapidement son cou. Fort heureusement, le fourreau de lumière créé par Phi avait parfaitement rempli son rôle. Elle n'avait aucune trace de son agression.

— Merci ! Je... Je ne veux pas me soustraire à mes obligations, tenta-t-elle de se justifier. S'il n'étaient venu que pour moi, je les aurai suivi, mais mon fils... Il ne peut pas partir à la guerre, c'est trop tôt !

— Je suis d'accord, intervint une mère qui tenait son enfant encore dépourvu d'ailes dans ses bras. Mais à cause de ça, nous sommes tous en danger ! Vous avez entendu le recruteur comme moi. Tout le village va être considéré comme des traîtres à cause de vous !

Cette accusation était autant lancée à l'encontre de la mère et de son fils que des étrangers qui avaient tenu tête aux soldats. Syara était partagée concernant cette intervention. D'un côté, elle se disait que cette personne n'hésiterai pas à jeter les autres en pâture aux lions pour s'en sortir, mais d'un autre, elle comprenait qu'elle pensait aussi à la sécurité de son enfant et qu'elle ne pouvait être jugée pour ça.

— Quand ils se réveilleront, ils nous attaqueront de nouveau ou s'enfuiront chercher des renforts pour raser le village, craignit une autre femme. Qu'allons-nous faire ?

— Laissez-moi m'occuper de ça, répondit Elirielle avec son air posé et assuré habituel.

Tout en s'approchant de l'ange à la hache inconscient, la dragonne fit apparaître une dague dans ses mains. Pour beaucoup, ses intentions étaient claires et les horrifiaient.

— Vous n'allez tout de même pas les tuer ?

— C'est soit eux, soit nous ! La défendit l'un des seuls hommes du village, ayant visiblement échappé à l'appel aux armes grâce à son âge avancé.

— Vous débarrasser d'eux de cette manière serait la pire des idées, répondit calmement Elirielle. S'ils ne reviennent pas de leur mission de recrutement, une enquête sera ouverte, d'autres viendront et vous ne serez jamais tranquille. Pire, s'ils découvrent ce qu'il s'est passé, ils raseront le village.

— Qu'importe ce que nous faisons, nous sommes donc condamnés, s'horrifia celle qui tenait son enfant. Nous devons fuir !

— Pas nécessairement. Je vous ai dit de me laisser m'en occuper. Je vous expliquerai tout une fois terminé.

Une main posée sur la tempe du soldat inconscient et l'autre tenant la dague dont elle plaquait le plat sur le front de l'ange inconscient, Elirielle resta dans cette position sans bouger pendant quelques secondes, puis se releva pour rejoindre les lanciers et recommencer l'opération. Pour Syara, il était évident que sa dague n'était qu'une illusion pour leur faire croire qu'il s'agissait de son catalyseur de magie. Quant à ce qu'elle leur faisait, elle avait sa petite idée en tête en ayant déjà vu Shay faire la même chose.

Après être passée sur chaque soldat recruteur, Elirielle se releva, rangea son arme et sourit à l'assemblée pour se montrer rassurante.

— Je viens tout juste d'altérer leur mémoire. Ils n'auront aucun souvenir de ce qui s'est passé ici. Phi, peux-tu les soigner s'il te plaît ? Ne sois pas surprise s'ils ne se réveillent pas, cela n'arrivera que demain matin.

Sans même se poser de question, la jeune fée se rendit auprès des blessés et commença son traitement. Les traces de l'affrontement disparurent de leurs corps, mais ils restèrent tout de même inconscients comme l'avait prédit la dragonne.

— Quels souvenirs leurs avaient-vous donné ?

— Les quatre recruteurs sont arrivés en début de soirée pour recruter la mère et son fils, mais ils se sont rendu compte que les informations qu'ils avaient étaient erronées et que votre fils n'aura pas son arme avant un an. Dans ces conditions, ni la mère, ni l'enfant ne sont éligibles à l'appel aux armes. Étant arrivé tardivement, vous leur avez naturellement proposé de passer la nuit ici. Avec de tels souvenirs, ils devraient repartir demain matin sans faire d'histoire. Bien sûr, jeune homme, tant qu'ils sont là, interdiction d'appeler ton arme et de faire usage de la magie.

— Vous pensez réellement que ça va marcher ? S'inquiéta celle qui devait être recrutée. Comment savoir si votre magie a bien fonctionné ? Et s'ils se réveillent et se souviennent de tout ?

— Je n'en suis pas à mon coup d'essai, ne vous en faites pas, la rassura-t-elle. Jouez tous le jeu et tout se passera bien. De notre côté, nous allons reprendre la route et disparaître de ce village vu que j'ai retiré notre rencontre de leur mémoire. Vu qu'il y a eu un affrontement et donc un événement choquant pour eux, notre présence fragiliserait mon sort.

— Merci, merci pour tout, commença à pleurer celle qui avait été prise en otage.

— Transportez-les dans des lits, habillez-les comme s'ils s'y étaient couché d'eux-mêmes et, même si l'envie est forte après ce qu'ils vous ont fait, ne leur faites surtout aucun mal. Il ne vous restera qu'à camoufler la fissure qu'a faite l'un d'entre eux dans un mur, de nettoyer la rue pour enlever toute trace d'affrontement et ce sera bon.

Grâce à son assurance et à la confiance qu'elle accordait à sa magie d'altération de la mémoire, tous les villageois furent rassurés. Certains avaient certes été étonnés quand elle avait affirmé ne pas en être à son coup d'essai, mais puisque cela les arrangeait, ils n'allaient pas s'en plaindre.

Vu qu'ils avaient du nettoyage à faire, le groupe ne s'attarda pas plus que ça dans ce village et partit immédiatement. Orélius et Elyazra avaient arrêté de se battre d'eux-mêmes pendant que personne ne prêtait attention à eux et se complimentaient à présent l'un l'autre sur les combats qu'ils avaient mené.

Pour Syara, si tout s'était bien passé, elle gardait de cette visite éclair de ce village comme un arrière goût désagréable. Depuis le début de l'altercation jusqu'à leur départ, elle n'avait servi absolument à rien contrairement aux autres qui avaient chacun eu un rôle à jouer. Ne pas pouvoir sortir son violon était extrêmement frustrant.  

Le violon de cristal : l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant