Le violon de cristal : l'autre monde

Chapitre 175 : La prise de maturité de Phi

 Laissant Fos à ses propres recherches, Syara remonta les escaliers et sortit pour rejoindre ses compagnons. Lorsqu'elle était passée, ils étaient à l'extérieur, mais Élane ne se trouvait déjà plus là. Ils devaient malgré tout savoir où se trouvait l'ange.

Au moment où elle mit un pied à l'extérieur, la beast vit que la clairière était presque entièrement recouverte de volutes de fumée noir et blancs aux reflets d'or. Au milieu de tout ceci, Elyazra et Orélius s'affrontaient dans un combat mêlant art martial et magie de téléportation. Voir les deux demi-dragons exposer tant de puissance et de facultés contrastait avec leur affrontement contre le roi et montrait avec une évidence certaine qu'il avait été truqué.

Assise sur le côté, Phi regardait leur combat sans vraiment se concentrer dessus. Elle semblait bien plus perdue dans ses pensées et arborait un visage triste. Tout ceci poussa la violoniste à se rendre auprès d'elle et, avant de prononcer le moindre mot, de passer ses bras autour d'elle pour la rapprocher et la réconforter.

— Je suis désolée, souffla-t-elle. Tout ceci est de ma faute. Si mes sorts avaient été plus puissants, nous aurions pu sauver le père d'Élane et nous enfuir tous ensemble sans avoir à laisser Elirielle derrière nous.

— Ça n'est pas de ta faute, commença à la rassurer Syara.

— Tu as bien vu comme moi que mes boucliers étaient instables. J'ai paniqué et cela s'est ressenti dans ma magie. Je n'ai pas été à la hauteur.

— Tu te trompes. C'est justement lorsque tu es sous pression que ta magie fait de véritables miracles. Rappelle-toi de tout le quartier de ton royaume que tu avais sauvé de la destruction ou de ce bouclier impénétrable qui m'avait permis de refermer le portail en toute sérénité lorsque nous affrontions ma mère. Si nous avons échoué, c'est parce que nous ne savions pas que les pouvoirs du roi agissaient sur les nôtres pour les supprimer ou au moins réduire leur puissance.

— J'étais venue avec vous parce que je me disais que mes pouvoirs pouvaient faire la différence et vous éviter le pire, mais sans eux, je ne suis plus qu'une gène pour vous. Une personne à protéger alors que vous avez autre chose à faire et à penser.

— Nous trouverons un moyen de contrer ses pouvoirs, ne t'en fais pas. En attendant, tu n'as qu'à prendre exemple sur ces deux-là qui sont repartis à l'entraînement.

— Ils ne s'entraînent pas, ils se battent pour évacuer leur frustration, la corrigea la fée.

Il est vrai qu'à bien y regarder, les coups que l'un et l'autre donnaient étaient plus brutaux que techniques. Ils ne cherchaient pas à s'améliorer et avaient même régressé au niveau qu'ils avaient avant de pénétrer dans ce monde.

— Mais tu as raison. Je ne vais pas me laisser abattre et continuer à m'entraîner pour que mes sorts ne soient plus affectés par l'étrange pouvoir du roi, continua-t-elle.

— C'est bien, on compte sur toi pour veiller sur nous, sourit Syara. De mon côté, je dois aller voir Élane. Tu sais où il est ?

— Il est parti s'isoler en forêt comme tu l'as fait. Il est parti par là, indiqua-t-elle en pointant l'opposé de l'endroit où elle-même était partie.

— Comment va-t-il ?

— Il est dévasté, mais il ne nous en veut pas. Il sait qu'on a été pris de court et que nous n'avons rien pu faire. Je pense surtout qu'il s'en veut de ne pas nous avoir accompagnés.

— Merci de t'être occupé de lui. De ce côté-là, je n'ai vraiment pas assuré.

— Tu t'inquiètes pour Elirielle, c'est normal. Moi aussi je voulais aller la sauver, mais j'avais aussi bien trop peur que nous perdions quelqu'un d'autre en essayant...

Où était passée la petite fée insouciante ? Se demanda Syara. Elle avait indubitablement bien grandi et pris en maturité. D'un côté, ça n'était pas pour lui déplaire et elle trouvait cela formidable qu'elle évolue ainsi, mais d'un autre, la beast se disait aussi que cela l'éloignait de ce rôle de grande sœur protectrice qu'elle affectionnait tant avec elle.

— Et pour son petit frère ?

— Il n'en sait encore rien et dort encore. Élane tient à lui annoncer lui-même. Il sait déjà qu'il s'en voudra et se dira que si son père est mort, c'est parce qu'il a mis trop de temps pour nous retrouver.

S'il y en avait pourtant un qui ne pouvait être à blâmer, il s'agissait bien de lui. Malgré son jeune âge, la peur et l'inexpérience de vol, il avait réussi à venir jusqu'ici en un temps record. Le principal problème ne venait pas de lui, mais de la justice expéditive du roi qui avait fait arrêter le baron et l'avait exécuté presque immédiatement après son arrivée à la capitale.

Alors qu'elles continuaient à parler, le combat défouloir entre Elyazra et Orélius s'acheva sur une défaite du demi-dragon qui tomba lourdement au sol, sérieusement blessé. Sa sœur devait véritablement être en rogne pour avoir la force de surpasser Orélius qui avait pourtant prouvé qu'il était plus puissant qu'elle.

Malgré tout, cet affrontement était plus que serré et Elyazra ne tarda pas à s'effondrer, face contre terre et recouverte d'hématomes sur tout le corps.

— Bon, il semble que j'ai du travail, souffla la fée pour qui ce genre de scène était devenu anormalement habituel avec tous les entraînements qu'ils avaient subis face à des dragons.

— Ils n'y sont pas allés de main morte...

— Oui, mais rien que je ne puisse soigner. Élane est parti par là, rappela-t-elle. S'il te plaît, choisi bien tes mots quand tu lui parleras. Fos voulait lui soutirer des informations sans même prendre en compte ce qu'il ressentait. Ça m'a mise hors de moi.

— C'est ce que j'ai cru comprendre. J'en viendrais presque à regretter de m'être isolée. J'aurais bien voulu voir ça.

— Ça n'a pas drôle !

— Je sais, je sais. Ne t'en fais pas, je ne suis pas Fos, je ne le brusquerai pas.

Pendant que Phi partait soigner les deux brutes qui s'étaient battues au point d'en tomber inconscientes, Syara repartit en forêt à la recherche d'Élane. Comme l'avait dit la jeune fée, elle allait devoir faire preuve de tact pour obtenir les informations que désirait Fos.