Chapitre 49

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Erwan resta un moment immobile et silencieux, contemplant la demeure qui s'offrait à sa vue.

La maison était moderne. Très moderne. Elle était tout en longueur, avec une petite avancée pour le garage. Le toit était d'un rouge vif qui tranchait avec le beige du crépis. La porte était blanche, encadrée de deux larges baies vitrées. Le tout situé sur un immense terrain au gazon verdoyant.

Trop moderne pour moi, songea Erwan.

-Je peux encore faire demi-tour, lui dit Thibault.

Erwan secoua la tête.

-Non. Nous n'avons pas fait tout ce chemin pour rien. Allons-y.

Les portières claquèrent derrière eux et ils marchèrent ensemble jusqu'à la maison. Une fois devant la porte, ils échangèrent un regard et Erwan sonna. Pendant un long moment, il n'y eut ni bruit ni mouvement, si bien que le jeune homme crut que la maison était déserte. Il regarda le nom sur la sonnette : Mr Doyen. Ils étaient bien au bon endroit. Ils allaient repartir, lorsqu'un bruit de pas étouffés les fit se raviser. Erwan se raidit légèrement. Ça y'est. Ils allaient voir le tuteur. Leur vie se terminait ici.

Adieu, T, songea-t-il.

La porte s'ouvrit. Et Erwan retint son souffle.

Ils étaient face, non pas au tuteur, mais à une femme d'une quarantaine d'années. Elle avait de longs cheveux blonds ondulés qui lui arrivaient au bas du dos et de grands yeux noirs que les cernes avaient éteints. Elle était plus pâle qu'un fantôme et si maigre que sa peau laissait presque entrevoir les os. Elle était vêtue d'une longue chemise de nuit blanche qui accentuait son aspect fantomatique et avait recouvert ses épaules d'un châle bleuté. Sa beauté spectrale était atténuée par les bleus qui recouvraient ses bras et les croûtes de sang séché qui s'étaient formées sur son visage.

Il la bat aussi, comprit Erwan.

-Bonjour, dit-elle d'une voix douce. Qui êtes-vous ?

-Je suis le petit ami de T et voici mon meilleur ami.

-Son petit ami...Il m'a parlé de vous.

Sa voix était aussi éteinte que son regard.

-Entrez. Joseph ne reviendra pas avant vingt heures.

Soulagé, Erwan entra, suivi de Thibault.

-Je m'appelle Clara.

-Je suis Erwan.

-Et moi, Thibault.

Clara les invita à s'asseoir. Erwan ne pouvait s'empêcher de la regarder. Même avec ses plaies, elle restait belle.

-Que désirez-vous savoir ?

Erwan hésita.

-Pourquoi s'en prend-il à vous et à T ?demanda-t-il finalement.

Il vit les yeux sombres de la jeune femme se poser sur lui.

-Je ne saurais vous l'expliquer, avoua-t-elle. Je crois que Joseph est quelqu'un qui...qui trouve son plaisir dans la souffrance de l'autre.

Erwan hocha la tête.

-N'avez-vous jamais cherché à prévenir la police ?

Il vit son regard s'affoler.

-Non. Oh non. Il...Il me tuerait si je faisais une telle chose. Je ne veux pas courir le risque.

Erwan déglutit péniblement : il comprenait sa position.

-Erwan...Vous faîtes beaucoup de bien à T et je sais qu'il en a besoin, mais...vous ne savez pas tout sur lui. Je crains qu'il ne soit mauvais pour vous.

-Je sais qu'il me cache des choses, croyez-moi. Mais je ne peux pas l'abandonner maintenant. Je l'aime. Je l'aime réellement et je ferai tout pour qu'il aille mieux.

-J'ai conscience de vos efforts, lui répondit Clara. Mais vous feriez mieux de vous tenir loin de lui.

Erwan secoua la tête.

-Je regrette, je ne peux pas.

-Je comprends, dit doucement la jeune femme.

Il y eut un silence.

-Qu'attendez-vous de moi ?demanda finalement Clara.

-Rien. Je veux seulement transmettre un message à votre mari.  


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