Chapitre 74

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Erwan était resté figé. Il ne parvenait plus à bouger. Il ne comprenait pas ce qui venait de se passer. Tout s'était déroulé trop vite.

La main de Thibault sur son épaule le tira de sa stupeur.

-Retrouve-le, Erwan. Retrouve-le pendant que je m'occupe de Loris. Je ne dirai pas que c'est lui, mais trouve-le avant que quelqu'un d'autre ne le fasse.

-Mais...les autres élèves...

-Je m'en occupe. Trouve-le, dépêche-toi !

Erwan hocha la tête et courut dans la direction que T avait prise.

Pourquoi fallait-il toujours qu'ils se courent après ? Ils ne cessaient de se chercher, de jouer au chat et à la souris. De se poursuivre mutuellement. Erwan avait parfois l'impression qu'ils passaient leur temps à se fuir. Etait-ce cela, une relation amoureuse ? Ne rien se dire et se fuir continuellement ?

T s'était comme évaporé dans la nuit. Encore une fois, il lui échappait.

Un mouvement derrière les arbres attira soudain son attention.

-T ?

Si ce n'était pas lui...

-Ne m'approche pas, Erwan.

C'était bien sa voix. Erwan s'avança doucement.

-J'ai dit ne m'approche pas !

Le ton était brutal. Surpris, Erwan s'immobilisa.

-Pourquoi ?gémit-il.

-N'as-tu donc pas vu ce que je lui ai fait ? N'as-tu donc pas vu de quoi je suis capable ? J'ai failli le tuer. Si Thibault ne m'avait pas arrêté, il serait mort. Je suis dangereux, comprends-tu ?

Il est dangereux, Erwan.

Les propos de Thibault envahirent l'esprit du jeune homme. Il secoua la tête pour les en déloger.

-Non. Non, ne dis pas ça.

-Va-t'en, Erwan. Je t'en supplie, va-t'en.

Erwan ne bougea pas.

-Je suis ici pour que les autres élèves ne te retrouvent pas. Je suis là pour te protéger, T.

-Tu ne peux pas me protéger. Personne ne le peut.

Et soudain, Erwan comprit. Ce n'était pas de lui que T avait peur. Ni des autres élèves. Ni même de l'autorité des adultes.

La seule personne que craignait T, c'était lui-même. Il avait peur de ce dont il était capable. Peur de perdre le contrôle en présence d'Erwan.

Celui-ci en eut le cœur brisé. Il tendit la main vers lui.

-Viens.

Pas de réaction.

-Viens, s'il-te-plaît.

Toujours rien. Erwan se rapprocha lentement de lui et lui prit la main avec douceur. Il le sentit frémir.

-Viens, répéta-t-il dans un murmure.

T consentit enfin à le suivre hors des arbres. Erwan l'attira à lui et le serra contre lui. Le sentant encore tendu et peu sûr de lui, il l'entoura de ses bras et l'embrassa. Alors, au bout d'un temps qui lui sembla interminable, il sentit T l'enlacer à son tour et lui rendre son baiser.

Il venait de le ramener à la vie.

Il sentit son ami rompre leur étreinte en posant son front contre le sien. Ils restèrent ainsi, immobiles et enlacés, pendant de longues minutes.

-Merci d'être encore là pour moi...

Erwan sourit.

-Je t'en prie.

Il vit T lui rendre son sourire.

-Merci de m'être revenu, murmura-t-il. J'ai cru que je t'avais perdu.

-Non, lui répondit T. Tu ne me perdras jamais. Quoi qu'il arrive, je serai là pour toi. Aussi longtemps qu'il le faudra.

Erwan posa sa tête contre son torse, écoutant sans un mot les battements de son cœur. Des battements rapides, forts et irréguliers. Qui disaient l'amour que T lui portait. Qui disaient tout ce que son ami ressentait.

Et cette langue silencieuse valait tous les mots d'amour.

SéductionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant