Le doyen était-il devenu fou ? Il ne pouvait pas aller voir la police ! Cela ne ferait qu'empirer les problèmes de T.
Que faire ? Que faire ?
S'il y allait, T mourrait ou le tuerait - au choix.
S'il n'y allait pas, le doyen le saurait et il irait lui-même - ce qui était peut-être pire.
Y aller ?
Ne pas y aller ?
En parler à T ?
Garder le silence ?
S'il avait pu, il en aurait parlé à Thibault. Mais ils étaient en froid et Erwan n'osait plus revenir vers lui. Il ne pouvait donc en parler à personne. S'il le disait à T, celui-ci l'empêcherait d'y aller - et il aurait sûrement raison.
-Erwan ?
Erwan sursauta : perdu dans ses pensées, il avait oublié la présence du doyen. Il releva les yeux vers lui.
-J'irai, déclara-t-il en se levant.
Il se leva, prit la lettre et partit sans un mot de plus.
Son entrevue avec le doyen le conforta dans sa décision : il n'irait pas. S'il allait voir la police, il y aurait nécessairement des conséquences. Et que ce soit pour T ou pour lui, elles seraient loin d'être positives...
En revanche, il y avait peut-être une autre solution. Mais si T l'apprenait, il le tuerait pour le retenir. Erwan en était certain.
Il réfléchit. Il n'était peut-être pas obligé d'en parler à T - ni à personne, d'ailleurs. Il pouvait très bien y aller sans que nul ne soit au courant. Mais si c'était dangereux...
Il haussa les épaules. Il était prêt à prendre le risque. Il verrait bien. Dans le pire des cas, il mourrait. Dans le meilleur des cas, il essuierait un échec. Mais il ne pourrait parler ni d'échec ni de réussite tant qu'il n'aurait pas essayé.
Il était désormais sûr de sa décision. Sûr de son plan. La peur grondait encore dans son cœur, mais le courage parvenait à la faire taire. Il le faisait pour T. Par amour pour T. Et il y arriverait, dût-il en souffrir par la suite.
Lorsqu'il rentra à l'appartement, T était toujours dans la chambre, mais il avait réussi à se redresser.
-Tu vas un peu mieux, constata Erwan.
-Un peu, lui répondit T en souriant. Et toi ? Comment vas-tu ?
-Ça va, dit le jeune homme en lui rendant son sourire.
-En es-tu sûr ?
-Certain. J'ai seulement hâte que tu puisses revenir avec moi en cours.
-Moi aussi, soupira T. Je ne pensais pas que les journées sans toi me sembleraient si longues...
Erwan vint se blottir contre lui. Il sentit son bras l'enlacer et ils s'embrassèrent tendrement. Plus le temps passait, plus ils avaient besoin l'un de l'autre. Les battements de leur cœur exprimaient en silence ce que leur bouche ne parvenait pas à dire tout haut. Puis, ils restèrent serrés l'un contre l'autre, goûtant le plaisir d'être ensemble.
-Erwan...
-Oui ?
-Il...Il faut que je te dise quelque chose.
Erwan le regarda.
-Je t'écoute, dit-il, soudain curieux.
Il sentit la main de T prendre la sienne et la serrer. Sans un mot.
-T ?
-C'est...C'est la première fois que je vais le dire à quelqu'un, mais...
Il s'interrompit. Erwan attendit, se gardant bien de le brusquer. La main de T se resserra davantage sur la sienne.
-Tu dois savoir que c'est extrêmement difficile pour moi d'en parler.
-Tu n'es pas obligé, murmura Erwan.
Il vit T fermer les yeux.
-Si. Si, il le faut.
Erwan ne répondit pas, préférant lui laisser du temps. Il craignait le pire...