Plus que neuf jours, Erwan.
Plus que neuf jours, Erwan.
Plus que neuf jours, Erwan.
Plus que neuf jours, Erwan.
Erwan se réveilla en hurlant. Il était seul. Forcément. T était reparti chez lui la veille.
Il ne supportait plus d'être seul la nuit. Sans T, il avait l'impression d'étouffer.
Haletant, il repoussa ses couvertures, se leva et alla s'asperger le visage d'eau fraîche. Le contact glacé lui fit du bien. Mais il ne parvenait toujours pas à se calmer.
Sortir. Il devait sortir. Immédiatement. Il enfila à la hâte les premiers vêtements qui lui tombaient sous la main et quitta son studio.
Il alla s'asseoir dans l'herbe, inspirant profondément et goûtant l'air qui se déversait dans ses poumons. Il ôta sa veste, laissant le vent caresser sa peau. La fraîcheur de la nuit le revigorait.
Il les a tous quittés ! Tous sauf un avec qui ça a duré trois jours de plus !
Il eut envie de se taper la tête contre un arbre. Il avait l'impression de devenir fou. Il se mit à trembler de désespoir. Cette situation commençait à avoir raison de ses nerfs...
Son portable vibra.
Loris : Plus que quatre jours.
Erwan ricana. Evidemment : nous étions le 26 Octobre.
Son ricanement se transforma bientôt en fou-rire, un rire démoniaque qui secouait son corps et qu'il hurlait à la face du ciel. Il ne pouvait pas s'en empêcher. Il craquait, tout simplement. Tout ce qu'il avait accumulé jusqu'à présent se déversait dans son rire. Il se fichait que les gens le regardent. Il se fichait d'avoir l'air d'un fou. Il se fichait de tout.
Lorsque son rire fut calmé, il resta immobile, tremblant de tout son corps. Puis, il prit son portable et envoya un message à Thibault.
Erwan : Je suis dehors, sur le campus. Prends ta voiture et viens me chercher.
Visiblement, son ami ne dormait pas.
Thibault : J'arrive.
Erwan poussa un profond soupir et reporta son attention sur le ciel.
Une demi-heure plus tard, un coup de klaxon résonnait dans la nuit. Erwan se releva et reconnut immédiatement la voiture de Thibault. Il ramassa sa veste, rejoignit la voiture et monta en claquant la portière.
-Démarre, ordonna-t-il.
-Où veux-tu aller ?lui demanda Thibault.
-Peu importe. Roule.
Il baissa sa vitre, laissant le vent s'engouffrer dans l'habitacle. Son ami ne lui dit rien. Il ne lui posa aucune question. Ils roulaient en silence, toutes vitres ouvertes, et Erwan sentit sa rage s'amenuiser progressivement.
Ils prenaient la route de Beaune. Ils roulèrent au milieu des maisons à colombage et au toit coloré. Sans un mot. Puis, Thibault tourna à droite et emprunta un chemin de terre. Lorsqu'il s'arrêta, Erwan demeura bouche-bée. Ils étaient dans un lieu d'une indescriptible beauté.
L'herbe descendait en pente pour s'arrêter sur une bande de sable léchée par les vaguelettes du lac. La lune éclaboussait l'encre céleste et projetait sur l'eau noire de longs serpents d'argent. Tout était silencieux, apaisé.
Ils s'assirent au bord de l'eau, sans échanger aucune parole susceptible de briser cette magie. Erwan se sentait mieux. Il contemplait cette nature paradisiaque, repoussant peu à peu ses problèmes et ses inquiétudes loin de son esprit.
Il ne pensait plus à Loris.
Il ne pensait plus à Doyen.
Il ne pensait plus à T de manière négative.
Il ne pensait plus qu'au présent qui reposait tout entier sur la beauté du lac et de la nuit.