Partie 36

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Salam Ahleykoum

Je sens des secousses, on me pousse... Aïe !

J'ouvre les yeux et... Anass. Fou de rage.
A travers ces yeux on pouvait voir toute la méchanceté qu'il éprouvait envers moi, toute sa haine. J'ai peur, oui, j'ai la trouille de lui. Son visage inspire le pire, il me fait terriblement peur. Cette peur qui t'immobilise tout le corps, qui t'empêche de parler et même de bouger, je ne tremble même pas, tellement j'ai la trouille, tellement mes bras comme mes jambes, mes mains comme mes pieds, mes nerfs comme mes pensées, sont comme bloqués. Paralysée est le mot adapté. Il vocifère des mots impossible à comprendre, il crache, postillonne, hurle...

Anass « J'T'AI DIS QUOI LA PUTAIN DE TA RACE ?!! TU RESTE A LA MAISON ET TU FERME TA GUEULE !! TU PREFERES FAIRE TA PUTE HEINNN T'AIMES CA KEHBA ! J'PASSE POUR QUOI MOI ?! J'PASSE POUR QUOI ZEUBI !!!!!! »

M'insulter de pute, moi, qui al hamdoulilah n'a jamais rien fait de mal avec un homme, ni même un bisou échangé... à part avec Yanis, dont rares étaient les fois où on se faisait des câlins... Moi, certes je ne suis pas la plus halal, je ne suis pas parfaite, mais il ose m'insulter de pute ? Je ne cautionne pas, mais vraiment pas. Me mettre dans le même sac que ces femmes faciles, qui ont apprécié le gout amer de la fornication, je... je... c'est grave comment l'impact d'un mot peut faire mal... il m'a blessé, sans même m'effleurer... Cependant, tout ça je l'ai pensé dans ma tête, je voulais lui dire, mais ma bouche est comme nouée, et même malgré mon envie de le faire taire, rien n'y fait. J'avais peur, cette peur qui me paralyse...

Anass « REPONDS POUFFIASSE ! »

Il me relève, car effectivement j'étais encore dans mes draps, cachée dans le fond de mon lit, ayant l'incapacité de bouger. Je le regardais avec des yeux terrorisés, ce qui n'avait pas l'air de l'arrêter dans son geste.
Une dernière insulte et en l'instant d'une minute j'ai décollé du sol, pour atterrir contre le mur et me défoncer le bas du dos. J'ai reçu son poing dans la mâchoire, je saigne d'ailleurs. Je suis sous le choc, que je n'ai même pas l'impression d'avoir mal, l'impact de son poing ne me fait rien pour le moment, les larmes coulent, je l'es essuie, me relève, mais je ressens la douleur du bas de mon dos... Alors je retombe, tête baissée, je me sens faible face à lui, il m'a touché... m'a blessé, m'a torturé au plus profond de mon être, il a touché un point sensible.

Lui, il me regarde une dernière fois puis me crache dessus et part, en claquant et la porte de ma chambre, et la porte d'entrée, me laissant seule.
Je souffle, il est parti, enfin. Je ne bouge toujours pas, la pression n'est pas encore descendu, la peur est encore là, qu'il revienne et finisse le travail commencé.
Après une heure comme ça, assise dans le noir, je me relève avec un mal de chien. Je commence à ressentir la douleur sur ma joue, j'effleure ma peau, ça me donne des frissons, j'ai encore la chair de poule...
Je me dirige vers la salle de bain et me regarde.

« J'ai le bas du dos bleutée, la joue enflée, la mâchoire ensanglantée, les douleurs sont physiques, mais surtout morales.
J'ai le cœur bouffé, les pensées troublées, les sentiments bafoués, les douleurs sont morales et très peu physiques.
Il m'a frappé, c'est horrible. Pas jusqu'au sang, mais rien que son poing au contact de ma peau, a tout démonté à l'intérieur de moi, toute mes valeurs acquises, ont comme... disparus. J'aurais pu répliquer, hurler, le stopper, et m'en aller, loin, très loin. Mais je n'ai pas pu, la peur, cette fichue peur de l'inconnu, cette peur que j'ai pour lui, pour cet homme, ce gars de tess, pour qui auparavant seul le dégoût lui était accordé, maintenant, j'ai peur.
Peur de lui, peur de ses insultes qui pourraient me blesser, peur de ses gestes qui pourraient m'achever, peur de son caractère qui pourrait m'anéantir, de ses crises de nerfs perpétuelles, de ses sautes d'humeur habituelles. J'ai peur de cet homme, de l'homme qui a osé me toucher, osé me frapper, osé s'en prendre à une femme, une honte pour lui, comme pour moi.
Parce que oui, je l'ai laissé faire, je l'ai vu son poing, qui s'approchait de moi, j'ai vu la scène au ralenti, histoire de bien me tuer. Je n'ai rien fait. Et la cause c'est bien la peur...
Résultat, j'ai mal, mal de ses coups, comme le mal de ses mots, j'ai le mal-être, et j'ai un mal de dos, je porte le malheur, mais j'ai surtout des bleus... au cœur. »

Je me rince le visage, et met des glacons dans un gant que je pose sur ma joue.
2h du matin.

Je m'allonge sur mon lit, verse une larme. Cette larme qui parcoure le coin de mon oeil jusqu'à mon oreille, qui retrace ma vie dans son sillon humide, ma triste vie.

3h du matin.

Le sommeil ne revient toujours pas, je suis désormais sur le dos, rien n'y fait, il ne veut pas venir ce sommeil.

5h30 du matin.

C'est l'aube, je me lève, décidément je n'arrive pas à dormir. Je vais faire mes ablutions, attends Al-Fajr, pose mon tapis à terre, enfile mon seul voile, et ma abbaya.
Et commence ma prière.
Le front au sol, j'éclate en sanglot, je pleure, en silence, et déverse ma souffrance.

« Ya Rabbi épargne moi, ya Rabbi sauve moi, ya Rabbi apaise mon cœur, Ya Rabbi... Protège ma mère, protège mes frères et mes sœurs, guide le... ya Rabbi sauve moi... »

Chronique de Chaïma: Koulchi Bel MektoubOù les histoires vivent. Découvrez maintenant