47. L'art de faire semblant

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Je regardai fixement mon portable que tenaient mes doigts tremblotants sans trop savoir comment réagir, sans vouloir opter pour une quelconque action. Comme si le simple fait de l'ignorer aurait annulé l'existence de cet appel.

Sacha me sortit de ma torpeur.

-Dis-leur que t'arrives et que t'étais invitée chez la famille de la rouquine pour le week-end et pas d'bol ça captait pas.

Je pris une longue inspiration pour retrouver mon calme avant de décrocher.

-Allo?

-Anaëlle? T'es où? débitait mon père sans que je ne puisse placer un mot. Qu'est-ce que tu fiches? Ta colocataire est incapable de nous dire où tu es!!

-Bonjour Papa, dis-je faisant fi de son énervement. Maman est avec toi?

-Bien sûr qu'elle est avec moi, où veux-tu qu'elle soit!! Et bon Dieu, où tu est toi?

-Je suis en route, répondis-je d'une voix incertaine. Tu te rappelles de la Camille, la fille dont je vous avais parlé, celle que j'ai rencontrée le premier jour...

-Oui, oui... me coupa-t-il impatient. Ca me dit pas où...

-Et bien, l'interrompis-je pour reprendre le contrôle de la conversation. Comme j'étais seule ce week-end, elle m'a invité chez ses parents...

-Pourquoi t'as pas répondu à nos appels? fulmina-t-il. Ta mère était morte d'inquiétude!

-Le réseau est mauvais chez eux à la campagne, ça capte mal.

Son énervement devint contagieux. Il commençait à me sortir de mes gonds à s'emporter de la sorte. Mince, je n'y pouvais rien s'ils s'étaient inquiété. Je n'avais pas répondu au téléphone pendant moins de 24h. Il n'y avait pas mort d'homme non plus!

-Mais tu rentres comment?

Cette question me prit de court. Euh... Vite, vite... Quelque chose de censé... Panique...

-C'est son cousin qui me raccompagne, balançai-je au harsard.

Le regard désabusé que Sacha m'envoya me fit hausser les épaules. Quoi? J'avais rien trouver de mieux! Ces pieux mensonges semblèrent apaiser mon père qui cessa son interrogatoire.

-Bon t'arrives quand?

J'interrogeai Sacha à voix basse en prenant soin de mettre ma main sur le micro du portable.

-Une demi-heure.

-A tout à l'heure.

Il raccrocha.

- Son cousin? A la rouquine?

Il éclata de rire.

-On a un air de famille indéniable!

Il redoubla de rires.

- Quoi, j'ai improvisé, m'offusquai-je.

- Ouais t'as improvisé. C'aurait pu être pire. T'aurais pu me flanquer Marine comme cousine...

A cette improbable idée, je le rejoignis dans ses rires. Ca aurait pu même s'avérer pratique à la longue, il aurait toujours eu l'alibi de trainer à l'appart' et mes parents n'aurait rien eu à y redire. D'un autre côté, ils n'avaient rien à redire sur mes fréquentations, j'étais majeure et vaccinée et je n'étais même pas assurée d'entretenir une quelconque relation avec Sacha sur le long terme.

***

Une nuit et un jourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant