C'est au dernier moment, alors que je croyais que tout était fini, que je croyais avoir tout perdu, moi la première, qu'il a mis fin à cette attente insupportable. J'avais poussé un hurlement strident lorsque la scène d'il y a un an avait ressurgit, concordant parfaitement avec ce qui nous arrivait, à Park et à moi. Ces mêmes phares aveuglants, cette même route glissante. Tout était là. Tout, à l'instar de la neige, de Jack.
Park a divagué, laissant assez de marge pour permettre au camion de circuler sans causer la moindre accroche. A la suite de quoi on a roulé sur encore une bonne dizaine de mètres, le pied de Park sur la pédale de frein, donnant le coup final afin d'éviter de rentrer dans un arbre.
Quand la voiture s'est arrêtée, mes peurs se sont enfuies, accordant leur maigre place à une colère inébranlable. J'ai laissé l'adrénaline s'emparer de moi, masquant la douleur que j'aurai dû ressentir lorsque mes poings ont frappé le tableau de bord.
Je ne me reconnaissais plus. Je l'avais voulu, cette méprise. Je l'avais voulu depuis longtemps. Aujourd'hui elle se déchaînait, et malheureusement, la boite à gant en était sa première victime. Le sang coagulait lorsque mes phalanges entraient en contact avec la matière.
Park a agrippé mes bras pour tenter de me calmer. C'était de sa faute, si j'étais comme ça. C'était de sa faute et il en avait conscience. Alors oui, je lui en voulais, de toutes mes forces même. Il prononçait pourtant mon nom avec une telle douceur que j'eu du mal à ne pas contenir ma colère. Je ne pouvais pas m'empêcher de penser à Jack, à la façon dont il aurait haï Park, et à la façon dont il le lui aurait fait comprendre. Mais l'idée que mon père puisse en vouloir au chanteur n'en était pas des plus réconfortante. Pourtant, la pensée était intervenue dans ce but-là, me réconforter pour éviter de culpabiliser sur son sort. Et à vrai dire, c'est ce qu'il se passait ; je culpabilisais. Park n'était pas mauvais, je le savais, et je voulais que mon père le sache aussi. Park n'avait pas voulu causer cet incident. Lui aussi avait des démons, bien qu'ils étaient différents de ceux qui m'habitaient depuis plusieurs mois maintenant. Je me suis remémorée une fois de plus cette journée, où l'on était tous deux assis sur le canapé, Jack et moi, la télévision allumée. Je me suis souvenue de l'expression qu'affichait son visage lorsqu'il avait aperçu Park à l'écran, et du ton exact qu'il avait employé pour introduire sa pensée à son sujet. « Pauvre gamin. La télé et toutes ces conneries va finir par le rendre fou, mais il ne le sait pas encore.» qu'il avait dit.
Jack Clark avait une fois de plus, eu raison. Aujourd'hui le gamin, célèbre dans le monde entier, des millions de dollars en poche, le savait. Et oui, ça le rendait fou.
- S'il te plait, Mabel, pardonne-moi, implorait-il à présent en chuchotant alors que sa tête était enfournée dans mes cheveux, me serrant contre lui en faisant des mouvements circulaires avec nos deux corps, comme pour me bercer.
J'ai imaginé ce que Jack aurait dit s'il m'avait aperçu dans un état pareil. Certainement pas ce genre de chose. Il avait le don pour trouver les bons mots. Park était complètement différent, c'était certain, et ce, sur tous les points. Il était certes, moins facile à vivre, mais il avait de nombreuses qualités qui aujourd'hui me paraissaient si évidentes. Il fallait creuser, mais pas forcément à coup de pioche. Parce que ces qualités, elles étaient juste là, à la surface, attendant que l'on cherche vraiment à comprendre leur propriétaire pour se laisser approcher. Oui, Park était différent de Jack. Park était différent de Flynn. Park était sa propre lumière qui se démarquait dans un ciel rempli d'étoiles. Les mots de Byers étaient différents, son touché l'était aussi, et pourtant, ils fonctionnaient.
- Je suis désolé, excuse-moi, il me susurrait à l'oreille. Je me suis calmée, j'ai arrêté de m'agiter, épuisée. Comme cette fois-là, dans ma chambre d'hôpital, à force de lutter, j'avais fini par abandonner, incapable de me défendre davantage.
- Tout mais pas ça. Vraiment. Tu peux déconner sur tout, mais jamais, plus jamais, tu n'entres sur ce terrain-là, je me suis exprimée, le souffle saccadé. Je l'ai laissé attraper mon menton entre ses doigts marqués, qui d'habitude, se vantaient de leur attitude agressive. Il a posé son front contre mien, et a laissé nos lèvres se frôler comme pour me demander mon accord. Je la lui ai accordée.
J'aurai juré qu'il pleurait.
Son baiser était tendre, doux, bien moins fougueux que celui de la veille, mais il en était tout aussi beau, peut-être même plus, il marquait la fin d'un épisode dans lequel on avait frôlé la mort.
Une saveur salée s'était installée à la commissure de ses lèvres. C'était ses larmes, pas les miennes.
Les bras de Flynn avaient beau être ceux qui me réconfortaient, ceux de Park étaient ceux que je préférais.
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LIGHT HOUSE
Teen FictionVenez découvrir l'histoire de Mabel Clark; une jeune fille passionnée par l'Univers et ses mystères qui, après un événement bouleversant, n'a qu'une hâte; sortir de son fauteuil roulant. Sans même qu'elle ne s'y attende, la jolie b...