Chapitre 42

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J'ai dû relire le message une bonne dizaine de fois avant de réaliser ce que ces phrases impliquées. Ma mère. Plus de prison. Plus de tribunal. Presque plus de soucis.

Je ne me suis pas immédiatement rendu compte que ma bouche était grande ouverte. N'importe quel insecte aurait eu le temps et la place nécessaire pour y rentrer et fonder un foyer. Je ne savais pas comment cela avait pu arriver. Je n'avais rien fait pour. J'avais, honteusement, laissé mon fardeau entre les mains de Flynn. J'avais été égoïste. Il avait fait son maximum pour m'aider, tandis que, dans un bar, les verres avaient défilé sous mes yeux. J'avais préféré oublier ce qui semblait être l'inévitable. Alors comment est-ce que je pouvais me retrouver responsable d'un tel miracle ? L'Univers était bon certes, mais l'Univers ne disposait pas de 72 000 dollars américains.

J'ai réfléchi. J'ai cherché une explication plausible à la question qui me trottait dans la tête depuis plus une heure « Comment 72 000 dollars avaient pu tomber du ciel ? ». J'aurai aimé pouvoir faire un tour dehors s'il ne faisait pas aussi froid, si je ne m'étais pas enveloppée dans une couverture pour avoir l'air d'un taco géant, et si les bois ne m'effrayaient pas autant. En dépits de la buée qui m'empêchait de voir grand-chose, mon regard s'évertuait à chercher, à travers la fenêtre, un quelconque signe de l'Univers. Rien que la lune. Rien qu'une étoile. Mais tout n'était que brouillard avec une telle météo.

Mes conclusions étaient plus surréalistes les unes que les autres. J'ai voulu avoir la preuve de l'une d'entre elle. Alors je me suis retournée. Mes yeux avaient beaux êtres ébahis, le reste de mon visage, tout comme mon être, était plus qu'hésitant.

-Park ?

Mon colocataire a répondu rapidement, d'une voix à peine éveillée.

-Quoi ?

- Est ce que tu serais, par le plus grand des hasards et pour je ne sais quelle raison, impliqué dans le fait que ma mère soit sortie de prison ?

-Elle est sortie ?

-Oui, je viens d'en avoir la confirmation.

Il n'a pas répliqué tout de suite. J'ai d'abord cru qu'il ne répondrait plus ; qu'il s'était rendormi, avant qu'un autre son rauque ne parvienne à mes oreilles.

-Alors peut être bien.

-Comment ça « peut-être bien » ?

Park s'est redressé, la tête en arrière, posée contre la paroi en métal, déballant un soupir et clignant de ses yeux à peine endormis. Il ne me regardait pas. Il fixait le mur, comme s'il espérait apercevoir une étoile.

-Il est possible que j'ai passé un rapide coup de fil à Merle pour qu'il règle ça.

Les insectes. Ils auraient pu revenir. Plus nombreux cette fois ci.

-Mais comment étais-tu au courant que nous avions besoin d'une telle somme d'argent ?

-L'autre soir, au bar. Quand tu es sorti, tu as oublié ton téléphone sur le comptoir. Je l'ai récupéré, l'écran était resté allumé sur le message de ton ami. J'ai pensé qu'appeler Merle changerait les choses, c'est tout.

J'ai senti mon cœur s'étreindre, ma gorge se serrer. Les yeux de Park qui n'étaient pas posés sur moi, sa voix monotone, ses gestes aussi banals que nerveux. J'avais mal. Je voulais qu'il me regarde. J'en avais besoin. J'avais besoin de lui. Je le détestais. Je l'adorais. Il ne disait rien. Il ne ressentait rien. J'avais besoin qu'il ressente quelque chose, j'avais besoin qu'il me parle. Encore et encore. Mais il restait impassible. Je voulais me mettre en colère, je voulais le serrer contre moi. Ça m'était insupportable.

Alors je l'ai fait. Je me suis avancée. J'ai glissé jusqu'à lui. Et je l'ai embrassé. Non pas comme il l'avait fait quelques semaines plus tôt, mais comme si toute mon amertume, comme si toute ma rancœur, ma foudre, ma rage, ma hargne, mon animosité lui étaient transmises par le simple contact de mes lèvres, autant que mon estime et ma considération pour ce qu'il avait fait pour moi. Pour toutes ces choses, toutes ses attentions à mon égard.

Park n'a pas semblé réceptif. Park n'a pas continué le baiser. Alors je me suis reculée. Humiliée par ce que je venais de faire. Humiliée par ma propre faute. Park ne me voyait pas comme je le voyais. S'en était regrettable, mais j'aurai dû m'en douter. Cependant, cette fois ci, il ne m'a pas quitté des yeux. Et à mon plus grand étonnement, ses doigts ont effleuré ma peau, me poussant à rechercher ses lèvres. Il a mené la danse cette fois ci. Je n'avais pas envie de poser de questions cette fois ci.

LIGHT HOUSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant