Cher Jack,

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Cela fait maintenant cinq semaines que je suis ici, dans la petite ville de Wheeler, en Oregon. Cinq semaines que je passe mes journées avec Parkles. Et après des nuits blanches à me poser la question suivante ; "Est-ce que Jack l'aimerait bien ?" J'ai fini par en conclure que, oui ; je crois que tu l'aimerais bien. En tout cas c'est mon cas ; je l'aime bien.

De temps à autre, on boit des bières ensemble. Mais je t'assure, toujours modérément, je sais à quel point tu ne veux pas que je finisse comme oncle Lewis.

Je lui ai parlé de toi, il te connait, et il connait aussi mon histoire.

J'avais l'habitude d'éluder toutes questions, alors je ne sais pas vraiment comment je me suis retrouvée à tout lui déballer. Peut être parce qu'il me l'a demandé ? Non, je crois que c'est parce qu'il m'inspirait confiance.

On a réussi à monter en haut du phare, tu sais ? Park s'est juste contenté de donner un petit coup de pieds dans la porte qui reliait la tour à la maison. Et elle s'est ouverte, comme si ce qui était en haut nous attendait depuis le départ.

On a escaladé les escaliers, enfin surtout lui; moi je n'était qu'une charge sur son dos.

En haut, à côté d'une dizaine de cartons plus chargés de poussière que d'histoire, la vitre nous offrait une vue spectaculaire sur les fin fonds de l'Univers. Et tu sais à quel point je l'aime, cet Univers.

Park a décrété qu'on ne sortirait plus de la tour. Et c'est ce qu'on a fait. On est monté pour ne plus jamais redescendre, ou bien que très rarement.

Byers s'était occupé de tout ; il avait lui même eu l'idée de ramener matelas, coussins, couette, et quelques bières pour nous tenir chaud la nuit. Parce qu'on ne dormait pas, la nuit. Il était hors de questions de fermer les yeux alors que les étoiles commençaient enfin à se confier.

Petit détail qui ne va sûrement pas te plaire ; Je me suis faite tatouée. Moi qui avait peur des aiguilles, je l'ai fait.

Parce qu'il y a cette fois, en me réveillant, où j'ai entendu un étrange bourdonnement. C'était Park, avec cet étrange engin qu'il agrippait de ses mains gantés. Quand je lui ai demandé ce que c'était, il m'a répondu qu'il avait tout un kit de tatoueur, et que là, à ce moment précis, il était inspiré. Les traits grotesques qu'il avait commencé à dessiner sur sa cheville laissaient deviner leur conclusion ; c'était un phare.

J'ai appris seulement à cet instant qu'il était l'artiste de son propre corps. La plupart des tatouages qui recouvraient sa peau étaient le fruit de son travail. Ils n'étaient ni précis ni parfaits, mais ils étaient beaux, ils étaient symbolique. Il m'a raconté l'histoire de chacun d'entre eux tandis que j'avalais ses paroles d'une oreille attentive.

Généralement, il les réalisait en tournée, lorsqu'il avait besoin d'un remontant avant de monter sur scène, où que quelque chose occupait tout son esprit, à tel point qu'il était impossible pour lui de penser à autre chose que sa symbolique sur son corps.

J'ai fait la connaissance de son premier chef d'oeuvre. Il l'avait fait à l'âge de seize ans, lorsqu'il était aussi insouciant, qu'innocent, d'une certaine manière. A cet époque là, il menait encore sa petite vie tranquille en Australie. Il avait des amis dont PJ ne faisait pas parti, et il occupait un job qu'il partageait avec David. Tout semblait parfait. Et pourtant, il savait que quelque chose lui manquait pour qu'il puisse se sentir totalement épanoui. « Where are you, Michael ». Michael David Fuller, de son nom de scène Blaze Foley -un artiste qui je pense, te plairait énormément-. C'était lui, ce manque que Byers cherchait désespérément, et il avait essayé de combler ce vide par cette encre, pour finir par le reboucher avec sa carrière.

Park m'a demandé si je voulais me faire tatouer moi aussi. Je lui ai dit que ne savait pas trop. Il m'a répondu que ça ne faisait pas si mal que ça, que ça dépendait des endroits. Mais je l'ai rassuré en disant que ce n'était pas tant l'aiguille qui me faisait peur, même si dire qu'elle ne m'intimidait pas serait un mensonge, mais c'était surtout que je ne savais pas quoi me faire tatouer.

Il m'a demandé si je lui faisais confiance.

Je lui ai répondu que oui.

Alors il m'a tiré vers lui, m'a laissé sélectionner mon poignet, et s'est occupé du reste.

J'ai fixé son visage pour me détourner de la douleur.

L'aiguille a très vite fini par quitter ma peau de façon définitive, pour mon plus grand étonnement. Lorsque j'ai regardé mon poignet, j'ai compris pourquoi est-ce qu'il lui avait fallu si peu de temps.

- Un cercle ?

C'était un simple petit cercle, ce petit symbole géométrique, parfaitement rond.

Quand j'ai relevé la tête pour dévoiler un regard rempli de questions, l'artiste a sourit.

- Ce n'est pas qu'un cercle, c'est tout le reste. Ton corps est l'infini, le cercle; notre galaxie.

 Ton corps est l'infini, le cercle; notre galaxie

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Voilà ce à quoi il ressemble. Il parait insignifiant, mais Park dit qu'il lui parle beaucoup. Et c'est vrai, à moi aussi il me parle. Je me demande toujours comment il a su que c'était exactement ce que je voulais sans que moi même je ne le sache.

Tu sais Jack, je n'ai jamais vraiment réussi à comprendre pourquoi le monde continuait de tourner après ton départ, et Park semblait avoir entendu ma pensée. La galaxie c'était moi, toi tu étais mon infini.

Mais ne tournons pas autour du pot.

Jack, cela fait cinq semaines maintenant que je suis ici, et ceci sera ma dernière lettre.

Demain, je rentre à la maison. Je rentre, et je pense te laisser ici. 

Merle a appelé hier. Il est furieux. Je prends un vol pour New York plus tôt que prévu. Il faut que tu saches que j'ai échoué. Personne n'arrive à croire que Parkles Byers puisse être en couple avec une fille comme Mabel Clark. Les médias crient à l'arnaque. Pour tout te dire, moi aussi j'ai du mal à y croire.

Merle a dit qu'il me paierait tout de même. Je crois que Park n'est pas tout blanc dans cette affaire, encore une fois.

Je n'ai pas envie de partir, tu sais ? Et je n'ai pas le coeur aux au-revoirs. C'est donc Park, à bord de la Jeep, qui va m'accompagner à l'aéroport d'ici quelques heures. Pas Orlando. Je ne veux pas que ce soit Orlando.

Le discours que je n'ai pas pu prononcer pendant la cérémonie, je l'ai réécrit, tu sais. Plus proprement cette fois ; la tête plus reposée, les idées plus claires, pour que les amoureux sachent réellement ce que je pense d'eux. Et sur notre chemin, je demanderai à Park de le glisser sous leur porte.

Jack, demain je rentre à la maison, et j'ai peur. J'ai peur que les étoiles ne me pardonnent jamais d'être partie.


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Cette lettre clôture notre 2ème partie,

La suite arrive dans une semaine (ou peut être deux), soyez patient, n'hésitez pas à faire découvrir la fiction à des amis si celle ci vous a plu, sur ce je vous embrasse et je vous dis à très vite pour une nouvelle partie !

All the love

LIGHT HOUSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant