Chapitre 73.

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Une cigarette écrasée. Une autre allumée.

Trois secondes entre les deux actions. Trois secondes c'est terriblement court, à peine le temps d'un regard, à peine le temps d'un soupir. C'est si court et pourtant il n'a fallu que trois secondes au jeune homme pour jeter son vélo et courir jusqu'à lui, se laissant tomber sur le bitume.

-C'est toi qui m'envoies le message mais c'est quand même toi qui es en retard ?

-J'étais au téléphone avec Thomas, j'ai pas vu l'heure.

La fumée s'échappe en un soupir, s'évaporant dans l'obscurité.

-Il t'a dit pour sa rupture avec Yaël, j'imagine.

-Oui. Mais c'est pas pour ça que je t'ai demandé de venir.

Pour toute réponse, le garçon fronce les sourcils. Et expire un nouveau nuage de fumée.

-Tout à l'heure, j'étais chez Samira.

-Heureux de l'apprendre.

-J'ai pas fini.

Des yeux métalliques levés au ciel, des cheveux brun-roux balayés par une main nerveuse.

-Je lui ai tout dit.

Quelques cendres chutent de la cigarette figée en l'air ; le garçon pose un regard un peu trop intense sur le jeune homme, à la recherche d'un quelque frémissement des lèvres ou pétillement dans les yeux trahissant une mauvaise plaisanterie.

-Comment ça ?

-Je lui ai absolument tout raconté, depuis le début. Elle m'a promis de ne rien dire, et officiellement elle m'a plaqué après avoir découvert que je l'ai trompée quand j'étais à Paris chez mes grands-parents. En soi c'est pas tout à fait faux.

-Tu...

Le garçon se laisse tomber en arrière, collant son dos contre le bitume frais, fixant le ciel, osant à peine respirer.

-Tu as quitté Samira pour moi.

-On dirait bien.

Des volets se ferment dans une maison voisine, brève interruption du monde dans leur petit univers.

-Je pensais que tu ne le ferais jamais.

Le jeune homme homme s'allonge à son côté, le regarde.

Comme s'il le voyait pour la première fois.

-Vraiment ?

-Oui.

-Du coup... ça veut dire que je remonte un peu dans ton estime ?

C'est au tour du garçon de poser ses yeux sur le jeune homme. Ses yeux cernés, métalliques, moqueurs.

-Tu n'as jamais été aussi haut. Disons que sur une échelle de un à dix, tu étais...

-J'ai même pas envie de savoir.

Une voiture au phare droit défaillant passe à toute vitesse, les aveuglant une demi-seconde.

-T'as encore ton bouquin ?

-L'ouragan d'étoiles ? Oui, pourquoi ?

-Comment ça se fait que tu l'aies toujours pas fini ?

Le garçon soupire longuement la fumée de sa cigarette, vexé.

L'Ouragan d'Étoiles Où les histoires vivent. Découvrez maintenant