Maxence

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Il abaisse son appareil, sourit aux deux modèles.

-C'est fini.

Le couple se redresse, la fille s'étire tandis que le garçon soupire. À coup sûr c'est elle qui a forcé son compagnon à faire une séance. Peut-être qu'ainsi elle cherche à sauver son couple bancal alors qu'il va la quitter dans deux mois pour une autre.

Mais Maxence, lui, n'en a rien à faire ; tout ce qui lui importe, c'est d'être payé. Ce que les gens font des tirages... ce n'est pas son problème. Il récupère les billets que la jeune femme lui tend, lui assure que les photos leur seront envoyées dans la semaine, et tourne les talons pour prendre le chemin de la fac.

Il en est déjà à sa deuxième année en licence de photographie, et il s'y sent bien. Ce n'est pas comme le collège ou le lycée, ici il ne risque pas de se prendre des réflexions parce qu'il porte du vernis ou de se faire convoquer parce qu'il prend des photos quand ça lui chante.

Et puis... ici, il y a cette fille.

En deuxième année de licence de théâtre, elle semble tout droit sortie de la bourgeoisie du dix-neuvième siècle avec son visage gracieux et ses manières de comtesse ; elle est incroyablement belle et, surtout, extraordinairement photogénique.

Il est bien placé pour le savoir, il a une trentaine de photos d'elle depuis l'an passé. Il n'a jamais été aussi fasciné par quelqu'un avant elle.

-Maxence !

Un type de sa promo le rejoint en courant avant de se caler sur son rythme.

-J'ai entendu dire que tu rendais des services pour pas trop cher.

-Tout dépend du service.

-Oh, bah c'est un service un peu particulier...

Le jeune homme soupire ; tous les services sont particuliers, et il ne supporte pas quand les gens tournent autour du pot.

-Accouche.

-Voilà, il y a une fille qui me plaît beaucoup... et elle veut que je lui envoie des photos de moi, mais pas vraiment habillé, tu vois... j'ai essayé d'en faire mais le rendu est vraiment mauvais... donc comme t'as un très bon appareil et que t'es très doué... enfin... t'es la seule personne à qui je peux demander ça...

-Des photos de nu, donc ? Tu serais prêt à lâcher une vingtaine d'euros ? Peut-être un peu plus, peut-être un peu moins, faudra voir.

Son interlocuteur réfléchit quelques secondes, puis acquiesce. Soit il est vraiment fou de cette fille, soit il s'agit de la thune de ses parents.

Sûrement la deuxième option.

C'est toujours la deuxième option.

-Ça marche. Quand est-ce que ça peut se faire ?

Maxence sort son téléphone, regarde son agenda.

-Samedi, dix-huit heures, dans ton appartement. Tu m'enverras l'adresse.

-Super ! Merci, mec !

Et il s'éloigne en trottinant, laissant le jeune homme soupirer de plus belle.

Le prix que les gens sont prêts à payer pour plaire... d'un côté ça le dépasse, mais de l'autre, eh bien, ça l'arrange. C'est grâce à cette vanité humaine qu'il a pu se permettre d'acheter cet appareil, et qu'il pourra sûrement prendre un appartement l'année prochaine. Il aime sa famille, mais voir Luke puis Jules prendre leur indépendance lui a donné envie d'en faire autant.

Une silhouette familière passe soudain devant lui, l'arrachant à ses pensées et captivant son esprit.

Ses longs cheveux noirs soyeux, son visage parfaitement dessiné, sa robe moulant gracieusement son corps, son sourire d'actrice. C'est elle.

L'Ouragan d'Étoiles Où les histoires vivent. Découvrez maintenant