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Le lendemain, Marine avait décidé de s’excuser auprès de Tom. Elle le croisa en chemin : lui aussi voulait la voir. Ils décidèrent de se balader autour du lac. Ils marchèrent tout d’abord côte à côte, puis Tom lui prit la main. Ils continuèrent jusqu’à un banc isolé. Marine se lança :

— Je suis désolée pour hier soir. Je n’aurais pas dû m’enfuir comme je l’ai fait. Je ne sais pas trop ce qui m’a prise. Je pense que j’ai paniqué…

— J’étais très content que tu m’embrasses. Et je ne t’en veux pas du tout. J’espère juste que tu ne le regrettes pas…

— Non, pas du tout.

— Alors, dans ce cas, nous pouvons recommencer.

Ils s’embrassèrent et passèrent le reste de leur journée ensemble.

Pendant ce temps, Océane était partie courir et nager au lac. À son grand étonnement, Laurent la rejoignit dans l’eau :

— J’étais sûr que je te trouverais là. Je peux me joindre à toi ?

— Bien sûr !

— Merci.

Il se mouilla la nuque et avança lentement dans l’eau. Il arrêta sa progression lorsque l’eau atteignit ses épaules.

— En fait, j’ai quelque chose à t’avouer… La dernière fois que j’ai nagé, j’ai failli me noyer. Et depuis, je n’ai jamais remis les pieds dans l’eau.

— A vrai dire, je m’en doutais… J’étais sûre que tu avais peur de l’eau. Mais ne t’inquiète pas, tu ne risques rien ici. Si tu veux, nous pouvons rester là où tu as pied. Et puis, j’ai mon diplôme de sauveteur.

— Me voilà rassuré…

— Je peux t’aider à réapprendre à nager. Après tout, tu m’apprends bien à courir.

— Ça me va.

Elle lui demanda de faire la planche, ce qu’il fit sans mal. Cela lui redonna confiance en lui. Océane lui montra alors la nage des chiens, laquelle ne demandait aucune technique, puis la brasse, la première nage apprise. Elle se rendit vite compte qu’il savait nager, juste qu’il avait une appréhension bien compréhensible étant donné son traumatisme. La jeune fille passa donc au crawl, beaucoup plus technique. Laurent avait un bon cardio, mais il s’essoufflait vite. Et pour cause : il n’expirait pas tout son air dans l’eau avant de reprendre sa respiration. Mais mis à part ça, l’Oracle comprenait très bien les mouvements techniques et progressait rapidement.

Océane lui fit faire des éducatifs sur la respiration : respiration tous les deux, trois, cinq, sept puis neuf mouvements. Comme ça, il était bien obligé de souffler dans l’eau. Au bout d’un moment, Laurent se sentit prêt à nager là où il n’avait pas pied. Avec Océane, ils décidèrent de longer le lac, à proximité du bord au cas où ils seraient épuisés. Lorsqu’ils arrivèrent dans la zone la plus profonde du lac, ils aperçurent Tom et Marine. Ils détournèrent pudiquement le regard et repartirent silencieusement de l’autre côté. Ainsi, Marine avait fait son choix.

— Tu le savais ? demanda Laurent.

— Oui et non. Je savais que ça pouvait se passer comme je savais que ça pouvait aussi ne pas arriver. Mais toi, tu n’as pas l’air étonné.

— Je les ai souvent vus passer du temps ensemble alors je m’en doutais. Je commence à bien connaître Tom et j’avais remarqué qu’il éprouvait beaucoup d’intérêt pour ta sœur. Mais chez Marine, je n’avais rien vu de particulier.

— Ma sœur est très discrète. Elle est assez pudique sur ses sentiments. Moi non plus je n’avais rien vu.

— Tom est quelqu’un de bien, je suis content pour lui. Mais Jules va crier au favoritisme.

— Je m’en moque. Je n’allais quand même pas m’interposer dans leur histoire juste pour ne pas froisser Jules. Bon, je crois qu’on a assez nagé pour aujourd’hui, qu’en penses-tu ? C’était très bien, tu t’es bien débrouillé.

— Merci. Oui, je commence à avoir faim. En plus, ce midi, c’est épinards et poisson pané.

— Super, ça faisait longtemps que je n’en avais pas mangé et j’adore ça !

— Moi aussi. Dépêchons-nous, sinon il ne restera plus rien.

Ils sortirent de l’eau et repartirent dans leur chambre respective pour se sécher et s’habiller. Puis ils descendirent au réfectoire. Contrairement à eux, les autres n’avaient pas l’air d’apprécier le menu, car le réfectoire était à moitié vide. Ils eurent même l’opportunité de se resservir.

Comme Laurent et elle n’avaient rien prévu pour l’après-midi, ils décidèrent de partir en randonnée, histoire de passer le temps. Pas de leçon aujourd’hui, juste un grand bol d’air frais.

Ils gravirent ainsi les montagnes alentour. Laurent marchait vite, mais Océane suivait le mouvement. Ils n’avaient pas besoin de parler ; ils se contentaient d’admirer le paysage. Arrivés en haut, ils firent une halte, puis prirent leur goûter (Laurent avait apporté des compotes, Océane des abricots et des amandes). Ils s’efforcèrent de ne pas finir toute leur eau ; ils avaient encore la descente à faire.

Océane et Laurent repartirent. Le soleil tapait de moins en moins fort au fur et à mesure que le soleil baissait et la descente fut donc beaucoup plus facile que la montée. Pourtant, quand ils arrivèrent en bas, ils étaient en sueur. Tous les deux regagnèrent leur chambre. Ils étaient affamés et attendaient avec impatience le repas du soir. Ils mangèrent, puis partirent directement se coucher. Il était aux alentours de vingt-et-une heures lorsqu’ils s’endormirent.

Les semaines qui suivirent, Laurent et Océane passèrent beaucoup de temps ensemble, pour les leçons d’Océane, de course, de natation, les balades et la découverte du royaume.

De leur côté, Tom et Marine étaient plus proches que jamais. Tout le monde était désormais au courant de leur relation et ils ne se cachaient plus. Un beau jour, ils franchirent un nouveau cap dans leur relation : Tom lui aménagea des tiroirs pour qu’elle puisse laisser des affaires chez lui. Ils vivaient pour ainsi dire ensemble. Les premières nuits se passèrent très bien, mais au fur et à mesure, Tom remarqua que le sommeil de Marine était de plus en plus agité. Elle faisait des cauchemars et avait des mouvements violents. Et au cours de la journée, son comportement changeait également ; elle était fatiguée, irritable, impatiente et avait souvent mal à la tête. Le jeune homme avait mis ça sur le compte du manque de sommeil, mais une nuit, ses cauchemars furent si violents qu’elle semblait possédée. Il décida donc d’en parler à Océane.

Le politicien guetta un moment où elle n’était pas avec Laurent pour aller la trouver :

— Salut.

— Salut, je ne te dérange pas j’espère ?

— Non, non. Entre. Tu n’es pas avec ma sœur ?

— Non, elle se repose…

— À cette heure ?

— Oui, c’est en partie la raison pour laquelle je suis venu te voir.

— D’accord, raconte-moi.

— Eh bien, ta sœur a aménagé chez moi. En tout cas, elle dort chez moi. Et je me suis rendu compte de certaines choses… Elle fait des cauchemars la nuit… Et ils sont de plus en plus violents. Elle dort mal, est facilement irritable, elle perd vite patience et a tout le temps des maux de tête… Je m’inquiète pour elle.

Océane était abasourdie. Elle ne s’était pas aperçue que sa sœur allait si mal. Certes, cela faisait un moment qu’elle ne l’avait pas vue, mais elle aurait dû le savoir… La jeune fille connaissait la malédiction de Marine, elle était la seule à pouvoir veiller sur elle ; sa grand-mère le lui avait même fait promettre.

— Écoute, je suis désolée, je ne sais pas ce qui lui arrive. Je peux essayer d’en discuter avec elle si tu veux.

— Peut-être qu’elle osera plus en discuter avec toi. Tu sais, je tiens vraiment à elle, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour l’aider.

— Je vais voir ce que je peux faire… Mais je ne te promets rien.

— Merci, tiens-moi au courant si tu as des nouvelles.

— D’accord.

Tom repartit. Océane envoya un message à sa sœur pour lui demander de passer la voir dans l’après-midi. Celle-ci lui répondit qu’elle arriverait à seize heures. À seize heures tapantes, Marine tapa à sa porte. Océane l’invita à entrer et lui donna un coca.

— Tu sais, Tom s’inquiète vraiment pour toi. Il est venu me voir tout à l’heure. Il paraît que tu fais des cauchemars ? Il a aussi remarqué que ton comportement changeait. Pourquoi ne m’as-tu rien dit ?

— Parce que tu ne peux rien faire de toute façon. Je savais que ça allait arriver, on le savait toutes les deux. Mais je me sens démunie, à part si tu as trouvé comment conjurer la malédiction.

— Pas encore. Mais je suis là pour t’aider, pour te soutenir et pour te rappeler qui tu es. Ce n’est peut-être pas grand-chose, mais c’est toujours ça.

— Écoute, c’est mon problème, ma malédiction. Je ne veux pas qu’en plus ça te touche. C’est déjà assez dur comme ça.

— Quoi qu’il en soit, ça ne peut que me toucher. Tu es ma sœur. Et crois-moi, me mettre à l’écart ne me protégera pas, bien au contraire. Mais tu sais, Tom n’est pas dupe, il a bien vu que quelque chose n’allait pas. Tu sais, je pense qu’il tient vraiment à toi, il serait prêt à t’aider si jamais tu décidais de lui en parler.

— Et s’il me dénonçait ? Et s’il prenait peur ? Je ne pourrais même pas lui en vouloir…

— Je ne pense pas qu’il le fera. Mais c’est ton choix, pas le mien. Sache juste qu’il est vraiment déterminé à comprendre ce qui t’arrive.

— Je veux profiter encore un peu, pendant qu’il est encore temps. Je suis heureuse avec lui et je n’ai pas envie que ça s’arrête brutalement. Si je vois que les choses se détériorent vraiment, alors, à ce moment-là, je lui dirai. Mais pas avant. Tu es là pour veiller sur moi, si tu vois que je commence à changer, rappelle-moi qui je suis et ça devrait aller. Tant que tu seras là, tout ira bien. Maintenant, je vais rejoindre Tom. Et essayer de passer un agréable moment.

— D’accord. Passe une bonne après-midi. Et salue Tom de ma part, OK ?

— OK.

Marine partit. Laurent passa voir Océane juste après. Il venait de croiser la sœur de cette dernière et trouvait qu’elle avait beaucoup changé ces derniers temps : elle semblait lunatique, désorientée, ailleurs… Lorsqu’il regardait Océane, il voyait une aura dorée et rouge qui l’enveloppait et scintillait tout autour d’elle. Mais Marine était quant à elle entourée d’une aura blanche striée de taches noires. Et plus les jours passaient et plus leur nombre augmentait. Il ne savait pas si Océane avait détecté ces changements, mais il était quasiment sûr que Tom, lui, les avait remarqués. Il décida de ne rien dire pour le moment.

Lac [Terminée] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant