Lac [Terminée]

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Jules

Les neuf prétendantes avaient trouvé leur bille. La reine étant absente, Jules allait devoir les accueillir et leur souhaiter la bienvenue à sa place. Il avait fait préparer leurs chambres et n'avait désormais plus qu'à attendre leur venue. Des combattants avaient tous été envoyés aux premières heures du jour pour les escorter, accompagnés d'un membre du Conseil.

En attendant, le président appliquerait à la lettre les consignes d'Océane. Lui qui s'était auparavant convaincu que l'impulsive Océane modifierait en profondeur la politique du royaume s'était lourdement trompé. Sa vision était judicieuse et sensée et pour l'instant, elle ne différait aucunement de la politique menée par le Conseil depuis bon nombre d'années. Avant d'appliquer des changements plus importants, la jeune femme désirait se rendre sur le terrain. Prendre le temps de jauger la température, d'obtenir l'appui de la population. Elle ne voulait pas passer en force et souhaitait l'adhésion des habitants. Et surtout, son but n'était pas de gouverner seule ; Océane n'allait pas révoquer le Conseil, elle en redorerait le blason. Quel dommage que son règne risque d'être si court !

Océane

Laurent était parti avec elle : de toutes, c'était la personne en qui elle avait le plus confiance. Et celle qui était la mieux disposée à trouver sa remplaçante. Par ses pouvoirs d'Oracle bien sûr, mais aussi par sa clairvoyance lorsqu'il s'agissait d'évaluer la vraie personnalité des gens et par sa connaissance approfondie d'Océane. Son ami savait parfaitement ce qu'elle cherchait, les traits de personnalité qu'elle appréciait, mais aussi ceux qu'elle jugeait rédhibitoires. Oui, Laurent était le mieux placé pour cette tâche. De plus, le jeune homme avait une excellente connaissance du royaume : il pourrait la guider et, connaissant tous les us et coutumes, l'empêcherait de commettre un faux pas, d'offenser les habitants et de bafouer leurs traditions.

Voyager ainsi à découvert, sans avoir à se cacher et parce qu'ils l'avaient décidé et non parce qu'on les y avait obligés était tout nouveau pour eux. Ils devaient déjà se rendre à la capitale. Mais Océane doutait fort que sa remplaçante s'y trouve... Elle l'imaginait plutôt dans une région très reculée, bien loin de toute cette richesse et de cette agitation. Les personnes qui étaient nées à Lac avaient grandi avec une cuillère en or dans la bouche ; elles n'avaient jamais eu à se battre pour leur survie, à ruser pour s'en sortir, à affronter l'adversité. Aucune jeune fille née ici n'aurait une vision claire du royaume, n'aurait connaissance des priorités ou des injustices... aucune ne pourrait, à son avis, être une bonne reine. Les jeunes filles y étaient certes belles, élégantes et cultivées ; elles n'en demeureraient pas moins faibles et dépendantes des autres. Océane voulait rester un jour à la capitale pour apprendre à connaître ses habitants, mais elle ne devait pas s'y éterniser : le royaume était vaste et elle devait trouver sa prétendante le plus rapidement possible.

Pour sa venue, la grande place avait été magnifiquement décorée de paillettes, comme pour rappeler son couronnement. Les bannières « longue vie à la reine Océane » et « bienvenue à la reine Océane » touchèrent la jeune fille,  qui était loin d'imaginer être aussi populaire, en dépit des nombreuses lettres qu'elle avait reçues.

Ils lui avaient réservé la meilleure chambre de la plus grande maison d'hôte de la capitale et avaient préparé des pièces pour l'équipage d'Océane : ainsi, la reine serait bien en sécurité et personne ne viendrait la déranger.

Océane rangea ses affaires sous les yeux médusés du gérant. C'était la première fois qu'il voyait une reine porter elle-même ses valises. Mais il se rappela qu'elle était différente et que, contrairement aux autres reines, elle avait vécu simplement, sans se douter de sa future condition. La jeune femme avait donc acquis une certaine autonomie, une grande indépendance et des petites habitudes. Le patron décida que ça ne le dérangeait pas, voire même qu'il trouvait cela rafraîchissant.