Love and Justice

Chapitre 45 (Maelie)

Je ne pouvais pas le croire. Alex Mavri venait de dire qu'il m'aimait.

Ses paroles provoquèrent aussitôt en moi un véritable feu d'artifice émotionnel. A tel point que j'en perdis le sens des réalités, laissant mon esprit divaguer dans un univers fantasmé qui avait tous les attributs d'un paradis. J'avais tant rêvé à une telle confession mais jamais je n'aurais imaginé que ce rêve puisse prendre corps. Et encore moins ici et maintenant. Pourtant, c'était le cas.

Je me sentais dans un état proche de l'exaltation. Mon coeur battait si fort qu'il semblait sur le point d'exploser. Mon corps tremblait sous le feu de l'adrénaline. Mes yeux étaient rivés sur ses lèvres, celles-là même qui venaient de m'offrir cette merveilleuse déclaration. J'étais traversée par un bonheur inouï qui me faisait tourner la tête tandis qu'une nuée de papillons avait soudain élu domicile dans le bas de mon ventre.

L'entendre dire cette phrase magique avait suffi à effacer tout le ressentiment que je lui témoignais jusqu'alors. J'étais prête à pardonner ses fautes et ses maladresses, aussi nombreuses et douloureuses pour moi fussent-elles. En fait, désormais, plus rien n'avait d'importance. J'avais ce que je voulais le plus au monde depuis que mon regard avait croisé le sien dans cette cabine d'ascenseur ; son amour.

Je ne savais pas si c'était parce-que j'étais trop surprise ou trop heureuse mais j'étais littéralement pétrifiée et incapable d'esquisser le moindre geste ni de prononcer le moindre mot. Quant à lui, on aurait dit qu'il était en train de se liquéfier sur place tant il était dévoré par l'embarras et il n'était guère plus bavard. Alors, le silence s'empara des lieux pour régner sans partage durant plusieurs minutes. Des minutes au cours desquelles je ne cessai de me répéter, comme une injonction que je me faisais à moi-même :

_ Fais quelque chose ! Il attend une réponse. Tu ne peux pas rester là sans rien dire après ce qu'il vient de t'annoncer.

Si je ne réagissais pas, c'était tout simplement parce-que je n'avais aucune idée de la réaction à adopter. Bien sûr, je brûlais d'envie de me ruer dans ses bras tout en lui disant que, moi aussi, je l'aimais depuis ce matin où le hasard nous avait réunis dans cet ascenseur. Mais, d'un autre côté, son aveu avait le don de me terrifier et je me sentais traversée par un flot ininterrompu d'angoisses qu'il m'était chaque seconde un peu plus difficile de contenir.

Je redoutais de ne pas être à la hauteur de cet homme qui, dès l'instant où je l'avais vu pour la première fois, m'avait paru si impressionant de beauté et de charisme. Mais, surtout, je craignais déjà de ne pas pouvoir assumer les risques qui incombaient à une relation avec lui. Il était mon professeur. Il s'apprêtait à se marier avec cette fille à l'impulsivité inquiétante dont je ne doutais pas qu'elle prendrait très mal le fait d'apprendre que je lui avais volé son fiancé.

Faire ce pas vers Alex Mavri, c'était mettre un pied sur un chemin inconnu et semé d'embûches dont je ne savais pas où il me conduirait. Alors, et ce même si mon coeur me criait de faire ce pas, je restais résolument plongée dans mon inertie, comme paralysée par des enjeux qui me dépassaient.

Alex Mavri demeura encore quelques temps, face à moi, à espérer vainement que je me décide enfin à parler. Puis, se persuadant peut-être que ça n'arriverait pas, il renonça. Il fit volte-face et se dirigea la tête basse et la démarche lasse vers son appartement. Avant de s'y engouffrer, il bredouilla des excuses :

_ Je suis navré de vous avoir dit une chose pareille. Ce n'était vraiment pas une bonne idée.

Puis, il disparut, me laissant seule avec ma torpeur et mon désarroi.