Chapitre 88 (Maelie)

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J'avais exigé d'Alex Mavri qu'il soit enfin complètement sincère avec moi. C'était ce qu'il avait fait et, à présent, je ne savais plus quoi dire ni quoi faire tant j'étais sous le choc de ce qu'il venait de me révéler sur lui. Ce qu'il avait vécu était tellement violent, tellement triste et tellement injuste que j'étais incapable de trouver quoi répondre. Qu'y avait-il à répondre à ça ? Rien sans doute car aucun mot ne saurait vraiment apaiser le tourment de l'homme qui se tenait devant moi. Un homme qui, enfant, avait tout perdu et qui, pourtant, avait trouvé la force de survivre au calvaire qu'il avait vécu. Un homme qui m'inspirait courage et admiration mais un homme qui aussi, quelque part, m'effrayait.

L'homme qui se tenait devant moi était un coupable. Il avait menti et avait menacé. Il avait pris une vie, celle de son père, ce père qui l'avait tant fait souffrir mais qui n'en demeurait pas moins son père. Il avait aussi laissé accuser sa mère. Bien sûr, à l'époque, il n'était qu'un petit garçon mais, même après, il n'avait jamais reconnu sa responsabilité. Il donnait des cours dans lesquels il faisait l'éloge de la justice alors même que, d'une certaine manière, il s'y était soustrait.

Mais l'homme qui se tenait devant moi était aussi une victime. Il était un gamin maltraité et humilié. Il était le témoin d'une histoire d'amour qui avait viré au cauchemar. Un cauchemar bel et bien réel qu'il lui arrivait encore aujourd'hui de revivre certaines nuits, un traumatisme qui ne le quittera sûrement jamais. Il était un orphelin qui n'avait jamais vraiment pu compter que sur lui-même. Il était un être blessé qui ne cessait jamais de panser ses plaies. Il était un survivant qui aurait eu mille raisons de supplier la mort de venir le chercher mais qui n'avait jamais tourné le dos à la vie, persuadé qu'elle pouvait encore être belle.

L'homme qui se tenait devant moi n'était ni blanc ni noir. Il était gris, tout en nuances et en contradictions. Il était un homme unique. Un homme avec ses défauts et ses qualités. Un homme avec ses parts d'ombre et de lumière. Un homme fait de colère et d'amour mais un homme qui avait toujours tout fait pour que l'amour l'emporte sur la colère. Un homme avec ses souffrances et ses espoirs. Un homme imparfait, de chair et de sang, qui au fond ne demandait rien d'autre que d'aimer et d'être aimé, ce qui lui avait toujours été refusé.

Aussi, il n'y avait qu'une seule question que je devais me poser. Etais-je capable d'aimer cet homme qui se tenait devant moi ? De l'aimer en conscience de ce qu'il avait fait mais aussi de ce qu'il avait dû subir par le passé. De l'aimer comme au premier jour, quand nous nous étions rencontrés dans cet ascenseur un matin de bonne heure. De l'aimer pour ce qu'il est devenu. De l'aimer avec ses démons. De l'aimer d'un amour sincère, d'un amour qui dure, d'un amour qui pardonne, d'un amour qui réconforte, d'un amour qui guérit, et d'un amour qui ne peut pas effacer le passé mais qui redonne foi en l'avenir.

Pouvais-je aimer Alex Mavri ainsi ?

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