_ Ça me fait tellement de bien de te voir. Comment vas-tu mon ami ? lançai-je à Servone immédiatement après m'être installé près de lui.
_ Je fais aller. Ou plutôt je patiente, me répondit-il dans un sourire un peu forcé qui ne saurait cacher son véritable état d'esprit.
Devinant que son moral était en berne, je tâchai de le réconforter un peu :
_ Il faut que tu t'accroches. Il ne te reste pas longtemps à tirer. Encore quelques mois et tu seras un homme libre.
_ Je sais bien. Mais des mois, en prison, c'est une éternité. Si tu savais, ici les journées s'étirent jusqu'à paraître devenir des années.
Il m'avait décidément l'air bien déprimé.
_ Pense aux jours meilleurs qui t'attendent, renchéris-je, espérant ainsi faire jaillir un peu de postiif en lui.
_ Des jours meilleurs ? Tu parles... Quand je sortirai d'ici, je ne sais même pas ce que je ferai. C'est vrai quoi. Quand on y pense, je vais me retrouver libre, certes, mais sans-le-sou et flanqué d'un casier qui risque bien de finir d'effrayer les quelques employeurs assez fous pour songer à me donner du boulot.
Je ne pouvais pas rester là à le regarder se lamenter. Il m'avait l'air d'avoir besoin de se faire secouer un peu. Je m'y attelai sans traîner :
_ Arrête un peu de te morfondre, tu veux ? Je vais te dire ce que tu vas faire. Tu vas sortir de ce trou à rats, tu vas être diplômé en droit, tu vas bosser comme juriste, tu vas te trouver un petit appartement et une femme à aimer, et tu vas te débrouiller pour être heureux parce-que tu le mérites.
_ A t'entendre, ça paraît si simple...
_Ça n'est pas si compliqué. Il faut juste que tu y mettes du tien. Au fait, tu as étudié les fiches de cours que je t'ai préparées ?
_ Absolument, et si tu veux tout savoir j'ai trouvé ça d'un ennui mortel.
_ Je te rassure, c'est normal. Après tout, les règles procédurales n'ont pas lieu d'être divertissantes. C'est d'ailleurs précisément parce-qu'elles ne le sont pas que si peu de gens en maîtrisent les subtilités. Et c'est comme ça que des avocats sont devenus des rois de l'acquittement, parce-qu'ils n'ont par leurs pareils quand il s'agit de faire la chasse aux vices de forme disséminés ici ou là dans les dossiers.
_ Mon avocat ne devaient pas faire partie de ceux-là, sans quoi je ne serais pas en train de dépérir dans une cellule.
_ J'ai toujours dit que j'aurais dû assurer ta défense. Seulement, à l'époque, j'étais un peu trop jeune pour le faire, lui confiai-je dans un sourire.
_ Peu importe l'âge que tu avais, tu étais déjà plus compétent que lui. Je me rappelle de toi me récitant une partie du Code Pénal à quatorze ans à peine. C'est que tu étais précoce mon ami.
_ Quand ta mère se retrouve aux assises, accusée d'un crime qu'elle n'a pas commis, alors que tu n'es encore qu'un gosse et qu'elle est ta seule famille, ça te pousse à te pencher sur le droit un peu plus tôt que les autres...
_ C'est certain.
Rapidement, il ajouta :
_ Bon et si nous arrêtions un peu de parler de moi. Tu sais combien j'aime que tu me racontes ta vie. C'est encore le seul moyen que j'ai de m'échapper un peu d'entre ces murs.
Il me vit baisser la tête, signe de mon embarras. Il s'enquit :
_ Qu'y a-t-il ?
_ Rien, c'est juste que je ne sais pas par où commencer à te raconter. Ma vie est un tel bordel en ce moment.
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Love and Justice
RomanceQue seriez-vous prêt à sacrifier par amour ? Votre travail ? Votre ambition ? Votre honneur ? Vos fiançailles ? Votre famille ? Et a-t-on le droit d'aimer n'importe qui ? Jusqu'où Alex Mavri, jeune professeur en droit privé et spécialiste du droit...