- Ethan, je ne pense pas que ce soit prudent d'aller en mer ces temps-ci, disait Nils, une fois arrivé à la maison.
- Que vouliez-vous que je choisisse d'autres ?
- Réparer des bateaux, ouvrir un stand, je ne sais pas, c'est dangereux la mer maintenant, répondit Mickaël.
- J'ai le droit de choisir ce que je veux...
- Mais moi, j'ai le droit de désapprouver tes choix si je les juge dangereux...
- Tu n'as pas le control sur moi, Mickaël.
- ETHAN ! ÇA SUFFIT ! Je suis ton père et c'est moi qui...
- ... quoi ? décide de ce que je dois aimer ? décide de comment réagir ? cool, pourquoi ne pas devenir "toi" tant qu'on y est.
- Mais bon sang ! (Il lui saisit les épaules et commença à l'agiter.) DIS-MOI CE QUE JE DOIS FAIRE POUR QUE TU COMPORTES COMME UN ENFANT NORMAL !
Nils intervint en se rendant compte que Mickaël était sur le point de lui disloquer les épaules.
- Mickaël, lui dit-il en le tirant vers lui. Ce n'est pas le moment de perdre ton sang-froid.
- J'irai avec elle. Que tu le veuilles ou non. Je t'ai déjà prouvé que je pouvais passer outre tes interdictions. Tu auras beau gaspiller ta salive, ça ne changera pas l'idée que je me suis fait de toi.
Dans un accès de rage, Mickaël s'emporta et lui balança une grosse claque. Ethan se décala sur le côté et massa la joue qui commençait à picoter.
- Je te déteste, souffla-t-il.
Il sortit en courant par la porte.
Mickaël voulut lui courir après, mais Nils le retint.
- A quoi tu joues, Nils ? Laisse-moi. Il dépasse les bornes !
- C'est toi qui dépasses les bornes maintenant. Il souffre, c'est tout.
- Lui ? Il souffre ? Et moi alors ?
- Je vais aller lui parler. Laisse-moi régler ça.
- Mais...
- Tu as assez fait pour aujourd'hui.
- Laisse-moi lui parler.
Mickaël battit en retraite et se jeta sur le canapé. Visage en larme, il ne cessait de renifler car il ne pouvait nier qu'il avait aussi mal en lui. Pourquoi ? se demanda-t-il. Pourquoi bon Dieu ?
Ethan roulait désormais à vélo dans le but d'aller le plus loin possible de la maison. Lui aussi, pleurait en sniffant toutes les trente secondes. Il roulait en direction de la forêt, loin de la ville et peu lui importait la distance. Ce qu'il comptait était que son père soit le plus loin possible de lui.
Il pénétra les bois mais continua de rouler jusqu'à arriver devant le bras d'une fine rivière. Des morceaux de neiges s'attaquaient déjà à sa chevelure châtaine, et garnissaient ses épaules. Il gara ensuite son vélo contre un arbre et s'assit en plongeant ses jambes dans l'eau ruisselante. Il essuya d'un revers de la main ses larmes puis sniffa un coup avant de rester planquer là, à contempler son reflet brouillé par le ruissèlement.
Le sol sur lequel il s'était affaissé avait encore une texture boueuse, mais cela ne suffit pas à le gêner. De toutes les façons, d'ici peu, tout serait recouvert de neige.
Il ne savait pas chez qui aller. Il ne savait pas non plus sur qui compter. Il avait l'impression que tout convergeait vers son malheur. Tout ce qu'il voulait... que voulait-il d'ailleurs ? A part écrire, quel autre détail de sa vie comptait ? Il se posa alors la question. Écrire par envie et écrire par manque d'affection étaient deux choses différentes. Mais la différence, elle était où ?
L'eau qui circulait à travers ses jambes l'apaisaient en quelques sortes, et son bruit le détendait. Il se laissa alors embarquer dans l'imaginaire. Peut-être que certains actes de son roman coïncidaient avec certains événements de la vraie vie. Pourquoi s'en faire ? Construire le monde autour du roman est bien plus important que chercher à lui trouver de la cohérence dans le monde réel. Pas vrai ?
Il se souvint d'un coup d'Ecarlate. Où pouvait-elle être en ce moment ? Il se leva donc et s'en alla.
Quand il arriva à destination, il vit Barth et Ecarlate en train d'assembler des planches de bois. Ils les filtraient afin de déterminer lesquels serviraient à reconstruire la cabane. Il y en avait deux tas. Le premier, ressemblant à un dépotoir, rassemblait des morceaux de bois irrécupérables. Et le second, formant une sorte de triangle, regroupait les restes.
Pendant que Barth s'évertuait à les classer, Ecarlate dénichait les instruments (hache et compagnie.) qui serviraient et les entassait dans un coin.
Lorsque cette dernière leva son regard, elle croisa le sien. Ethan eut sur le coup, une chair de poule qu'il s'efforça de masquer. Elle s'avança ensuite vers lui, tenant toujours son livre dans sa main. Le jeune garçon avala à grosse gorgée sa salive et la fixa à son tour.
- Ethan...
- Comme promis, je suis là pour t'aider à retrouver ton éclair.
- Merci d'être venu alors...
- Elle apprend vite en lisant, fit Barth en les rejoignant. Elle essaie de nous comprendre.
- L'éclair, lui demanda-t-elle. Tu sais où il est ?
Ethan resta muet et continua de la fixer à la recherche des mots.

VOUS LISEZ
ECARLATE
AcciónEthan, jeune adolescent passionné d'écriture et ayant pour projet d'enfin commencer un véritable roman, voit ses plans changés par la venue d'une créature céleste à l'apparence féminine qui le soupçonne de savoir où se dissimule son éclair. Pendant...