Colère et rage

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Ecarlate se tenait sur le haut d'une montagne et avait pris une teinte rouge brillante. Elle était en colère et son regard, fixé sur la ville d'Erland par-delà la forêt, témoignait de tout le malheur qu'elle souhaitait à la ville. Et cette colère se manifestait par l'annonce d'une autre tempête qui approchait. Car malgré l'heure matinale, le ciel était d'un gris pesant et oppressant, les vents étaient plus agités qu'à leurs habitudes, les vagues tourmentées empêchaient ceux qui travaillaient sur les quais de faire complètement leurs boulots. Les cristaux de neige étaient prêts à l'assaut. Tout le monde le sentait.

Ce matin-là, elle avait décidé de faire demi-tour pour aller vérifier si l'état de Barth s'était amélioré. Toutefois, elle n'avait trouvé que des traces de sang sur le lieu. Inquiète, elle avait alors fouillé aux alentours de la forêt mais n'avait rien pu dénicher, mise à part une lettre, enfouie dans les buissons depuis un bon bout de temps, tant elle était presque déchirée.

Lorsqu'elle l'avait lue, la tristesse et la rage avaient pris le control d'elle. Il y était écrit :

Ecarlate si tu tombes sur cette lettre.  Alors cela voudrait dire qu'il y a eu la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Cela fait déjà un bon bout de temps que je songe à mettre fin à ma vie car (je n'en donne pas l'impression) vivre tous les jours est un calvaire pour moi. Autant mettre fin à cette souffrance et donner aux Erlandais ce qu'ils veulent.
Je ne sais pas comment tu dois te sentir en lisant cela. Mais si tu te sens brisée, je m'en excuse. Et j'espère que tu trouveras ton éclair. Et qu'Ethan finira par avoir la paix. Ce n'est plus mon combat. J'ai fait ce que j'avais à faire. Il est grand temps de vous laisser le relai. Je vous aime.
Barth.

En son for intérieur, elle avait commencé à souhaiter le malheur d'Erland. Mais en même temps, elle avait peur de la réaction d'Ethan si elle venait à détruire la ville. Elle n'avait plus que lui. Et ne voulait pas qu'il s'en aille. Même si la destruction d'Erland devenait un fantasme de plus en plus fort, elle ne voulait pas qu'Ethan le haïsse.

— Ethan, disait Mickaël. S'il te plaît, dis-moi ce qu'il se passe.

Il avait essayé de lui essuyer les larmes mais Ethan ne se laissait pas toucher.

— Elle l'a tuée, rugit-il. ELLE A TUÉ BARTH !

— Ethan, e-

— Je préfère encore vivre avec une mère qui me déteste plutôt qu'avec toi, ragea-t-il. Elle au moins savait que j'étais important.

— Ethan, je...

— Je ne me plais pas ici. La seule personne avec qui je me plaisais, elle l'a tuée. Tu ne comprends pas? Je souhaite qu'elle meure. JE VEUX QU'ELLE MEURE!

— Ethan, tu ne peux pas dire ces genres de choses, okay ?

— Tu veux tout savoir ? Je suis amie à une tueuse. Et s'il lui arrive l'envie de s'en prendre à elle, je ne m'y opposerais pas. Je la soutiendrais d'ailleurs.

— Ethan, c'est la tristesse qui te fait dire ça.

— Non... c'est la colère. Je suis en colère contre... contre... contre cette sorcière.

— C'est le shérif. Peut-être que Barth a fait quelque chose qui...

— Ils ont brûlé sa cabane ! EST-CE QU'ELLE AVAIT CE DROIT ?! Dans aucun pays, on ne fait ça !! Elle est pire que ma mère. Elle l'a tué. Et toi, tu oses la défendre ? Ah... oui... j'avais oublié. Je ne suis pas dans tes priorités.

— Ethan, je t'aime, okay ? Tu es mon fils. Et ça me fait mal de te voir dans cet état.

— Je comprends pourquoi certaines personnes méritent la mort. Tant qu'on leur laisse le droit de vivre, ils continueront de semer la mort.

Mickaël, en ce moment, était plus effrayé qu'inquiet. Le Ethan qui se tenait devant lui n'était qu'une masse de haine et de colère dont les larmes et les sanglots avaient déformé le visage.

Quelques minutes après, deux officiers vinrent se saisir d'Ethan et l'emmenèrent sous le regard dévasté de Mickaël.

Kristina était dans sa cellule, quand le gardien vint à elle et lui dit :

— Hey... tu as de la visite.

La jeune femme leva son regard et vit Anders en face de la grille. La réaction fut directe: elle le mitrailla de ses yeux.

— Qu'est-ce que tu fais ici ? lui demanda-t-elle d'un ton qui voulait clairement dire : « je ne veux pas te voir. »

Anders le comprit et soupira. Il avait aussi en lui, une sorte de culpabilité.

— Écoute, Kristina. Je n'avais pas prévu que ta mère t'enfermerait.

— Anders, je ne veux rien entendre. (Elle lui tourna le dos.) va-t'en. Je ne veux pas te voir.

— Kristina, je t'apportais juste...

— QU'EST-CE QUE TU NE COMPRENDS PAS ? Qu'il suffit que tu viennes du jour au lendemain avec un bol de nourriture pour que je saute de joie, te serre dans mes bras, te remercie et te dise que tu me manques après m'avoir honteusement trahie alors que je te faisais confiance ?

— Je sais que tu dois m'en vouloir, mais...

— ANDERS, VA-T'EN. Je préfère encore que tu meures plutôt que tu me donnes à manger.

Choqué par un tel propos, Anders lâcha une goutte de larme. Il posa ensuite le bol devant la cellule sur le sol et s'en alla, le cœur brisé. Quelques secondes après, il entendit le bruit d'un bol qui se fracassait contre la cellule d'en face, vomissant son contenu. Ce qui lui fit un pincement violent au cœur. Il s'était mis à dos sa meilleure amie.

ECARLATEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant