CHAPITRE 41

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Kristina Sven et Anders Solveig sillonnaient entre les différents rayons de la boutique de madame Pearl. Une boutique d'objets trouvés, comme avait l'habitude de le penser Anders.

Arrivés devant une cage en verre d'articles mettant en scène des livres relatant d'anciennes légendes, y compris celles d'Erland, ils s'arrêtèrent et commencèrent à chercher dans les archives, tout ce qui avait trait à la potentielle existence d'une créature telle qu'elle. Toutefois, ils n'avaient pas de bol car à travers les titres presque non déchiffrables, leur patience serait rudement mise à l'épreuve. Sans oublier qu'ils devaient se ménager pour participer à la reconstruction la ville. Comme tout le monde.

— Avec tous ces livres, ce ne sera pas aujourd'hui qu'on aura quelque chose, fit remarquer Kristina, ne cachant pas son impatience et sa frustration.

— Kristina...

— Les jeunes, leur interpella madame Pearl. (Il se retournèrent vers la vieille dame.) Ça fait un bon bout de temps que je vous observe. Vous cherchez quelque chose en particulier ? Je pourrais vous aider à la trouver.

— Madame Pearl, nous cherchons des livrons relatant les légendes d'Erland, répondit Anders.

— C'est assez vague comme requête. C'est bien la première fois que des jeunes s'intéressent à d'aussi vieilles histoires. Vous avez un projet en particulier ?

— Oh ! On veut juste s'informer. Vous voyez ?

— Vous savez quoi ? reprit madame Pearl d'un ton méfiant en boitant vers eux. Le plus bizarre dans tout ça : Vous n'êtes pas les premières personnes à venir chercher des livres sur des légendes d'Erland.

— Quelqu'un d'autre est passé par ici ? réagit instantanément Kristina.

— Un des sbires de cette femme... comment elle s'appelle d'ailleurs ? Iv-quelque chose ?

— Liv Ivar.

— Oui... L'un de ses hommes est passée plus tôt dans la matinée et m'a demandé des livres sur l'histoire d'Erland.

— Et... ?

— Bah... je n'ai pas vraiment confiance en cette femme. Si vous voulez mon avis, elle trame quelque chose. Je lui ai tout simplement répondu que je n'avais plus ces genres de livre.

— Et... ?

— Bah... Elle a acquiescé et est partie... Plutôt aimable. J'ai du mal à comprendre pourquoi elle ne me dit rien qui vaille.

— Vous pouvez nous le donner, le livre ?

Madame Pearl croisa ses bras et les fixa de ses yeux fatigués, comme pour leur montrer qu'elle était aussi méfiante vis à vis d'eux.

— Pourquoi voulez-vous ce livre ?

— On aimerait apprendre, répondit Anders sous la gêne.

— Et la reconstruction d'Erland ? Vous n'êtes pas censés vous occuper à reconstruire notre ville ?

— Si... mais...

— Désolé... fit-elle d'un ton catégorique, je ne vous prêterai pas de livre sans que vous ne m'ayez donné une raison valable de le faire.

A cette réponse, Kristina sembla désespérer car son visage afficha un masque de frustration profonde.

— Kristina, On repassera après, lui dit Anders en la tenant par l'angle de son bras.

— Attends, lui chuchota-t-elle d'un ton déterminé en lui tapotant l'épaule.

— Si vous n'avez rien d'autre à chercher, reprit madame Pearl, je vous prierais de bien vouloir sortir et faire comme tout le monde.

— On y va, Kristina, insista Anders.

Cette dernière accepta d'acquiescer. Mais à contrecœur.

Ils sortirent donc. Cependant, la jeune femme ne put réprimer sa frustration longtemps. Elle voulait vraiment le découvrir. Le problème était qu'Anders, celui sur qui elle comptait le plus, n'avait pas l'air enthousiaste. Elle avait l'impression qu'il s'efforçait à la croire. Pourtant, n'était-ce pas lui qui lui avait affirmé qu'il avait bel et bien vu l'éclair écarlate ? Pourquoi n'était-il alors pas aussi impliqué qu'elle ?

Elle avait hérité de la tétutesse de sa mère. Ce qui l'arrêta au moment où ils débouchaient vers la véranda de la boutique alors qu'ils s'apprêtaient à descendre l'escalier.

— Kristina, réagit Anders. On ferait mieux d'oublier cette histoire. Peut-être que mes yeux m'avaient joué un tour.

— Je sais ce que j'ai vu, Anders, répondit-elle de mauvaise humeur. Pourquoi tu ne te mets pas de mon côté ? On est ami pourtant. Tu insinues que je suis folle ?

— Ce n'est pas ce que je dis. Je dis juste qu'on n'est pas sûr de...

— ...de quoi ? de quoi Anders ? Tu l'as toi-même vue faire fondre le bassin, répliqua-t-elle en haussant presque le ton.

— Ce n'est pas une raison de te mettre en colère Kristina. Tu es sûr que ça va ?

— Ça va, répondit-elle en se calmant. C'est juste que... c'est juste que... Je n'aime pas cette situation.

— Tu es comme ta mère.

— Ne le répète plus, cette phrase, le menaça-t-elle. Je ne suis pas comme ma mère.

A ce mot, elle le poussa par l'épaule en rebroussant chemin.

— Kristina, l'interpella Anders. Qu'est-ce qui t'arrives ?

— Je dois le savoir. (Elle rouvrit la porte de la boutique.)

— Mais pourquoi ?

— Je dois savoir, c'est tout.

— En vrai, tu n'es pas non plus sûr de ce que tu as vu, conclut Anders. Tu veux juste t'assurer si c'était réel ou non.

En disant cela, il parvint à toucher dans le mille. Kristina avait toujours été d'une incrédulité à tout épreuve. Elle ne croyait qu'en ce qu'elle voyait et sentait. Et maintenant elle se retrouvait dans une situation qui remettait en cause sa manière de pensée de ce qui était réel ou non. Elle l'avait caché mais c'en était trop pour elle. Était-elle réelle ? Pourtant elle l'avait bien vue à l'œuvre. N'est-ce pas ?

— Anders... tu peux y aller. Moi, je ne pars pas sans ce livre.

Anders la fixa d'une mine totalement ahurie pendant qu'elle disparaissait par la porte de la boutique. Il eut la désagréable sensation de reconnaître le shérif Astrid Sven en elle. Ayant beau le nier : Elle avait beaucoup de point commun avec sa mère. Cependant il préféra rester là à attendre.

Plus de trente minutes plus tard, Anders attendait toujours, prenant appui sur le capot de son véhicule quand il la vit enfin ressortir à vive allure telle une fugitive. Il n'avait pas tardé à comprendre qu'elle cachait un gros livre sous son manteau. Cette dernière, le voyant, eut quand même chaud au cœur en constatant qu'il l'avait attendue.

— Comment t'as fait ?

— Si ma mère l'apprend, je suis morte. (Elle entra rapidement dans le véhicule, suivi d'Anders.)

Anders se rendit compte de l'épaisseur du livre en voyant Kristina le sortir du manteau. Elle avait vraiment réussi à transporter tout ça en elle ?

— On y va ? lui demanda-t-elle.

— Euh... Okay.

Anders démarra et ils se mirent en route.

— C'est un livre des légendes, disait Kristina alors qu'il débouchait dans l'allée principale qui menait au port.

Le livre devait faire au moins 1400 pages, tant il était vieux et lourd. Surement l'un de plus vieux de la collection de madame Pearl.

Kristina commença à le feuilleter en s'efforçant de ne pas "casser" le manuscrit fragilisé par le temps et rongé de part et d'autre par des souris.

—Pourquoi il n'y a pas de table de matière dans ce livre ? fit-elle encontinuant de feuilleter à la va-vite jusqu'à ce qu'elle finît par tomber surun chapitre dont la couverture mettait en scène une femme recouverte d'éclair.Le chapitre s'intitulait : « Les êtres étoiles. ». 

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