Le matin du jour suivant, aux environs de 6 h, Ethan se préparait pour sortir. Il n'avait pas revu son père depuis la journée précédente. Et commençant à s'habituer à son absence, il s'était dit qu'il avait préféré passer la nuit en mer.
Occupé à préparer ses vêtements chauds et son sac qui ne contenait que trois papiers-rame compilés, relatant une histoire qu'il avait écrite ce même matin à la va-vite, il avait toujours du mal à oublier l'image de ses histoires adorées qui avaient brulé dans l'incinérateur. Il lança alors un regard mauvais à la machine, comme si c'était lui le responsable, et le remit vers la poignée de la porte. La minute d'après, il se retrouva dans le salon, en train de consommer son petit déjeuner : du pain au beurre salé et un thé sans sucre.
Quelqu'un vint sonner à la porte. Il avala alors la dernière goutte de thé qui se cachait encore au fond de la tasse et se leva vers la porte. Une fois que cette dernière fut ouverte, son père se tenait là. Il avait l'air fatigué et épuisé. Son survêt avait une petite trace de brulure au niveau du bras droit, mais rien de bien grave.
— Je n'ai pas passé la nuit à la maison.
— Je sais.
— Cette fois, c'était un imprévu. Nous avons navigué un peu plus au nord et la tempête a presque détruit notre bateau.
— Et... ?
— Tu pourrais au moins faire semblant d'être content de me revoir... soupira-t-il.
— Pas de problème, lui sourit-il ironiquement. Rends-moi mes histoires et je ferai semblant d'être ton fils. Ça te va ?
Avec lenteur, Mickaël se jeta sur le canapé. Ethan ferma la porte derrière lui et alla laver sa tasse.
— Nous n'avons rien rapporté... Tous les navires n'ont pu rien trouver à pêcher. Tu imagines la déception du capitaine.
— Si tu veux avoir une conversation avec quelqu'un, il y a les voisins d'en face.
Mickaël se redressa et lança un regard confus à Ethan. Ce dernier rinçait maintenant sa tasse au niveau de l'évier.
— Tu m'en veux toujours pour hier hein ?
— Non. Je t'en veux pour demain. (Il s'essuya les mains.)
— Ethan, si je l'ai fait, c'était...
— Tu es fatigué. Ton petit déjeuner t'attend sur la table. J'ai tout mis. (Il prit son sac à dos qui était posé sur une étagère à côté de la télé.)
— Où vas-tu ?
— À ton avis. (Il ouvrit la porte.) Loin de toi.
— Ethan, on en a déjà parlé. Je n'aime pas que tu fréquentes ce vieil homme. Je me souviens t'avoir expliqué ce qui est arrivé.
— Et qu'est-ce que tu as l'intention de faire ? Le bruler, comme mes histoires ?
— Ethan, ça suffit, répondit-il en se levant, oubliant sa fatigue. Tu ne sors pas. Et tant que tu continueras à écrire tes histoires, je continuerai de les bruler.
— Ce n'est pas toi qui voulais que je sorte ?
— Oui, mais pour fréquenter les enfants de ton âge. De plus... (il s'avança vers lui.) Donne-moi ce sac.
— Non.
— Ethan ! Je dis : « Donne-moi ce sac ! »
— Tu ne sais pas ce que je paierai pour ne pas être ton fils
— Ethan ! s'emporta-t-il. Tu n'iras nulle part, et tu me donnes ce sac !
— Tu veux jouer ? (Il tint son sac en position de défi.). Ça tombe bien, je voulais me dégourdir les jambes. T'es prêt ?
— ETHAN !
— 1, 2 ...
Mickaël se jeta sur lui, mais ce dernier esquiva à temps et sortit en trombe de la maison. Son vélo l'attendait dans le garage. Il s'y précipita alors et en ressortit avec. Son père, ressentant encore les effets de la fatigue, ne pouvait pas le suivre sur une longue distance. Il abandonna sa poursuite dès l'instant où Ethan sortit de la parcelle et disparut dans la montée de la rue.
— Ethan ! Ethan !
Il se cambra pour prendre le temps d'atténuer sa respiration et rentra.
« Je ne sais pas quoi faire de toi. »
Ethan passa devant une parcelle d'où un groupe de vieux discutaient devant une bonne tasse de café sur la véranda. Ces derniers le virent passer à vélo et s'échangèrent un regard invitant à une discussion dont il serait le sujet.
— Le petit Holger, dit une vieille dame en se servant de biscuits. Il parait que ça va mal avec son père.
— Il ne parait pas. Ça va mal.
— Ah bon ? Mais si vous voulez mon avis, c'est lui le problème.
— Ne sois pas si dur avec lui : sa mère l'a utilisé puis l'a abandonné.
— Oui, mais ce n'est pas une raison d'agir comme il le fait.
— Mon fils de trente ans est psychologue. Il dit que c'est probablement dû à un manque d'affection.
— S'il continue, c'est son père qui souffrira de manque d'affection.
— Vous ne connaissez pas ce par quoi il est passé.
— J'ai entendu dire, reprit une autre vieille femme, que lorsque sa mère rentrait pour lui annoncer son départ, il avait déjà préparé ses valises. Et pourtant, personne ne lui avait dit qu'il allait quitter la maison ce jour-là.
— Ce ne sont que des rumeurs.
— Oui, mais quand même.
— Sa mère est une méchante femme. Le pauvre garçon...
Ethan continua de rouler en direction de l'extérieur de la ville, lorsque soudainement, arrivé à une intersection, une voiture de police le surprit par la gauche. Pris au dépourvu, il freina et son nez se retrouva à quelques centimètres du véhicule.
— Hey ! lâcha-t-il en recadrant son véhicule qui avait perdu équilibre.
La vitrine du véhicule se baissa et une main passa par-dessus. Il croisa alors le regard du shérif. Il s'agissait d'une femme mûre à l'apparence stricte. Par son visage, on pouvait y lire de la rigueur. La grande Astrid Sven savait se montrer amical à qui le méritait. Mais il était difficile de calmer la fougue de sa colère quand elle était lancée. Ethan, sortant tout juste d'une embrouille avec son père, ne voulait pas en avoir avec elle. Et c'était une sage décision.
— Tu t'es fait mal ?
— Ça va, merci. J'ai pu freiner à temps.
— Tu sais que tu risques une amende ?
Elle lança un regard en direction du poteau de feux de signalisation qui était au rouge. Ethan la suivit du regard.
— Hum ! soupira-t-elle. Il est vrai que les véhicules sont rares ici. Mais il faut savoir être un peu plus attentif, tu ne trouves pas ?
— Je vous demande pardon.
— Je préfère ça, s'adossa-t-elle sur son siège. Où allais-tu, Holger ?
— Bah, Je voulais juste me promener. J'avais envie de prendre l'air.
— Hum ! Pas la peine de me mentir, lui sourit-elle. Je sais bien que tu vas voir le vieux Knut. Ne me prends pas pour une idiote, tu veux bien ? J'ai des choses à lui dire qui ne te concerne pas. J'espère que tu arriveras bien après notre discussion.
— J'essaierai.
— Bon, La prochaine fois que je te vois ignorer ne fut-ce qu'un des codes de la route, les conséquences s'abattront sur ton père.
— D'accord.
Elle remonta la vitrine et s'en alla.

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ECARLATE
AzioneEthan, jeune adolescent passionné d'écriture et ayant pour projet d'enfin commencer un véritable roman, voit ses plans changés par la venue d'une créature céleste à l'apparence féminine qui le soupçonne de savoir où se dissimule son éclair. Pendant...