Dans une cellule

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Sur le chemin du retour, Ethan n'avait aucunement cessé de se questionner par rapport à ce qui s'était passé plus tôt. Tout d'abord par rapport son endurance : Il avait toujours su qu'il était endurant et résistant, mais il ne s'était jamais imaginé arriver à cet extrême. La douleur qu'il avait ressenti tout au long du trajet entre l'ocean et le domaine de Barth était si insoutenable qu'aucun homme n'aurait pu résister longtemps. Mais pourquoi lui, il avait réussi?

Et même si l'agonie s'était tarie, il avait toujours cette impression que la douleur ne s'était estompée car il savait. Il savait que logiquement, il aurait dû perdre connaissance au beau milieu de l'océan, tout comme Ecarlate. Mais pourquoi avait-il tenu longtemps ?

Ensuite, il ne cessait de repenser à ce qui s'était passé après avoir repris connaissance. Pourquoi s'était-il senti si faible face elle ? Pourquoi avait-il eu la sensation qu'une carapace en lui venait d'être brisée ?

De plus, venait-il de découvrir qu'il fantasmait sur les jambes d'Ecarlate ? Oui. Cela devait être cela, car à chaque fois qu'il pensait à elle désormais, la première image qui lui revenait, était celle de ses jambes. S'en suivait après, son regard. Il avait eu l'habitude des regards d'Ecarlate : peu importait les nuances, il y avait toujours cette once d'indifférence, comme si elle se croyait supérieur à tout être vivant. Mais celui qu'elle lui avait lancé à son réveil l'élevait au même piédestal qu'elle et cela le rendait encore confus. Surtout, que l'embarras avait totalement paralysé ses pensées. A chaque fois qu'il pensait aux seins de l'être étoile, il agitait la tête pour s'effacer l'image de la tête.

Le ciel, désormais noir, était accompagné d'une suite de vents garnis de neiges qui annonçaient l'intemperie à venir. Des flocons essayaient même de s'incruster sous l'écharpe d'Ethan qui, trop occupé à reconstruire ses pensées, ne prêtaient pas aux phares d'un groupe de véhicule qui sortait d'Erland et montait la route sur laquelle il marchait.

En s'en rendant compte, il crut d'abord qu'il s'agissait des camions chasse-neiges qui déblayaient le terrain. Il s'arrêta alors pour essayer de distinguer les véhicules. Mais avec la sombre nuit associée aux phares aveuglants des véhicules, il ne pouvait que couvrir ses yeux jusqu'à ce que le groupe de quatre roues s'arrête à son niveau.

Le temps que les yeux d'Ethan se ressaisissent, Astrid sortait déjà de la voiture de tête. Elle avait une tête laissant émaner une expression de rigueur et de joie, comme pour dire : « Cette fois, je te tiens. ».

Lorsque les yeux d'Ethan se rétablirent, il put distinguer clairement cinq voitures de polices dont une Astrid Sven qui s'avançait vers lui.

- Tu n'es pas facile à dénicher hein... lui dit-elle. Où est-elle ?

- Pardon ?

- Ne joue pas à ce jeu, tu veux bien ? Tu sais de qui je parles.

- Mais...

- Ethan... cette fois, je ne vais pas te laisser filer si facilement. T'as intérêt à alléger ta peine.

Ethan tourna son regard vers la droite du shérif, et vit deux autres policiers descendre de leur véhicule et s'avancer vers lui, comme s'ils se préparaient à lui tomber dessus. Il ne tarda donc pas à comprendre : Ils étaient là pour l'arrêter, et étaient prêt à user de la force s'il le fallait.

- J'imagine qu'elle est avec Barth en ce moment ?

- Je n'adresse plus la parole à Barth, répondit-il.

- Tu mens, Ethan. Dis-moi la vérité. Tu en cours gros et je te l'assure. (Elle posa un genou à terre, et lui serra les épaules tout en lui lançant un regard dominateur.) Tu vas me dire la vérité maintenant, sinon tu le regretteras. Car je ne suis plus d'humeur. Alors tu vas me dire : « OÙ EST-ELLE ?! »

Le ton qu'elle prit montrait clairement qu'elle était déterminée à obtenir des réponses, allant même à user de la brutalité. Ethan sentait d'ailleurs qu'elle faisait pression sur son épaule en serrant ses ongles. Ce qui lui arracha une petite grimace.

- Un meurtre, c'est la pendaison ici, t'es au courant de ça ?!

- Shérif, lui dit l'un de ses hommes. Ce n'est qu'un enfant.

Astrid Sven, se rendant compte qu'elle allait loin, soupira, lâcha Ethan et se releva en rentrant dans son véhicule.

- Arrêtez-le, ordonna-t-elle. Je m'occuperai de lui après. Les autres, vous venez avec moi, on va aller rendre une petite visite à Barth.

Les soldats s'exécutèrent. On embarqua Ethan qui ne se débattit pas comme ils s'y attendaient, pendant qu'en compagnie de trois autres véhicules, Astrid s'en allait rendre des comptes avec Barth.

Durant le trajet, Ethan ne dit aucun mot. Menotté contre le siège arrière, il ne pouvait qu'admirer le paysage enneigé de la nuit à travers la vitrine.

- T'es dans la merde, petit, lui fit savoir le policier conducteur.

- Le shérif est de très mauvaise humeur, ajouta son partenaire, et j'ai bien peur qu'elle ne se décharge sur le vieil assassin.

Ethan ne répondit pas.

- Mon fils me parle souvent de toi. Il dit que tu es bizarre. C'est normal, ta mère t'a utilisé pour obtenir de l'argent de ton père et une fois qu'elle n'a plus eu besoin de toi, elle t'a abandonné. C'est ça non ?

Suite à cette remarque de l'officier, Ethan faillit s'emporter, mais se réprima de lui cracher à la nuque.

- Tu n'es pas très bavard, on dirait...

- Il a peut-être peur, le petit. C'est la première fois qu'il va dans un commissariat. Et vu la situation dans laquelle il s'est mêlé, accompagné de l'humeur massacrante du shérif, il encourt la prison ou même la pendaison.

Ethan se retint de réagir durant tout le trajet, préférant se mordre les lèvres plutôt que de répondre à leurs provocations. Il sentait en lui que c'est ce qu'ils attendaient. Qu'ils se débattent pour pouvoir le maîtriser avec force. Occasion qu'il ne leur offrit pas.

Arrivé dans le commissariat, l'un des officiers le plaqua violement contre les barreaux de la cellule pendant que son collègue l'ouvrait. Une fois fait, ils le poussèrent dans sa cellule à coup de pied au fesse, manquant à EEthan, de se prendra la tête contre un mur.

Les officiers ricanèrent et refermèrent la grille. Ethan ne réagit pas et s'assit sur le pavé sans leur prêter la moindre attention.

ECARLATEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant