Il n'y avait plus d'électricité dans toute la ville. Et en même temps, personne ne semblait conscient de la tempête qui se rapprochait. Peut-être parce qu'elle était encore loin.
Au département de gestion côtière, c'était le chaos. Car presque tout dépendait de la technologie, alors que plus rien ne marchait. Le réseau téléphonique, les machines électriques, les lumières. Et même l'entreprise chargée de règlementer le port et la pêche n'était pas en reste.
Des rumeurs, des plaintes et des murmures avaient pris le contrôle de l'atmosphère d'Erland. Les habitants, n'ayant pas la moindre idée de l'origine de la surcharge.
Mickaël avait pris le téléphone fixe de son bureau pour demander des comptes au maire, mais le téléphone avait aussi grillé. Comme tous les appareils de la ville.
— Ethan, dit-il en se levant. Tu peux m'attendre ici ? J'en ai pour quelques minutes.
— Je viens de loin, juste pour te parler. Et...
— Je reviens, je te le promets.
— Quand ? Dans trois jours ?
— Tu n'es pas venu me voir uniquement par courtoisie, c'est ça ?
— On en parle après. J'espère que ça peut attendre.
— De quoi est-ce que tu veux me parler ?
— De rien. Au revoir.
Mickaël, agacé, mais curieux, hésita entre ouvrir la porte et aller mesurer l'étendue de la situation, ou encore écouter ce que son fils avait à dire. Ce dernier ne le regardait plus, préférant fixer à travers la fenêtre, la mer.
— Donne-moi cinq minutes.
— Pas la peine. Finalement, je rentre. Je suis fatigué.
À contrecœur, Mickaël ouvrit la porte et s'en alla. Ethan engrangea le pas, mais à sa sortie, Ecarlate n'était plus là. Il soupira alors de frustration et lança un regard panoramique au couloir, pendant que différents groupes de personnes s'y engouffraient, cherchant probablement une solution.
— Elle est partie où ? ragea-t-il. C'est surement elle qui a fait ça.
Il sortit du département et s'en alla en direction de la crête de la colline de roches, espérant la voir. Mais aucune trace d'elle. Il ne voyait que l'entrepôt, le port avec ses bateaux arrivant et ses différents ponts, la mer envahie par la brume, mais toujours aucune trace d'elle. Il se précipita ensuite sur son vélo, et avec maladresse, redescendit la pente de la colline dans l'espoir de la trouver.
— Où peut-elle bien être ?
L'écho d'un tonnerre lointain gronda. Obligeant Ethan à tourner son regard vers la mer. Et là, il vit la tempête à peine visible qui s'approchait.
— Je n'ai pas signé pour ça.
Distrait par ce qu'il voyait, il fit un faux pas. Ce qui occasionna sa glissade le long de la pente en compagnie de son vélo. Il n'eut pas le temps de réagir qu'il se retrouvait déjà sur le sol rocheux, avec une petite ouverture au niveau du coude droit. Mais son vélo ne fut pas aussi chanceux que lui.
— Hum, soupira-t-il en s'approchant. Et maintenant ? Quel autre horrible sort la poisse, me réserve-t-elle ?
— Je ne serais pas si négatif à votre place, lui répondit une voix derrière.
Ethan sursauta et tourna son regard. Liv Ivar se tenait là, lui barrant la vue à l'entrepôt et au port, de sa chevelure en queue de cheval. Son même sourire aux lèvres et son regard bienveillant.
— Qui êtes-vous ? Et qu'est-ce que... ?
— Je marchais, lui reprit-elle. Je me suis dit : « Pourquoi pas une ballade ? Le temps que mes hommes finalisent tout. ». Visiter un peu la ville quoi.
— De quoi vous parlez ?
— Oh ! Je vous demande pardon, jeune homme. Je peux vous appeler, jeune homme ?
— C'est vous qui voyez ?
— Oh ! On dirait que vous avez eu une rude journée. Vous voulez que je vous donne un secret ? Peu importe ce qui vous arrive, dites-vous qu'il peut arriver pire.
— Euh... Merci. Je dois m'en aller maintenant. (Il se pencha pour redresser son vélo, mais le pneu avant dérapa pour partir se jeter à la mer.)
— Oh ! Si tôt ! J'appréciais déjà votre compagnie.
— Vous êtes flippante, vous savez ?
— Oh ! Même mon sourire ne suffit pas à vous rassurer ?
— Je ne veux vraiment pas vous manquer de respect. Je ne veux...
— Chut... chut... (Elle s'approcha du vélo.) Je connais exactement ce dont vous avez besoin, jeune homme. (Elle fronça sa mine.) Ça ne vous ennuierait pas de me donner votre petit prénom ? Parce que je me sens un peu mal à l'aise de vous appeler « jeune homme ».
— Hum...
— Je ne vais pas vous draguer, voyons. Pourquoi d'ailleurs ? J'ai carrément le triple de votre âge. Je veux juste faire connaissance avec un habitant d'Erland. Est-ce mal ?
Ethan avait du mal à la cerner. Ni à comprendre ce qu'elle voulait précisément. Tout ce qu'il demandait, c'était de se renfermer dans sa chambre et d'écrire pour se déstresser de la journée qui lui avait paru rude. « Après tout, Ecarlate sait se défendre. Elle n'aurait pas dû partir sans prévenir. C'est maintenant son problème. » Avait-il pensé en abandonna l'idée de la retrouver.
— Si vous voulez, nous pouvons vous raccompagner chez vous. Vu l'état de votre vélo, je ne pense pas que vous y arriverez avant la tempête. Et votre téléphone ne passera à cause de la coupure. Alors... ? Qu'est-ce que vous en dites ?
Ethan lança un regard aux épais nuages sombres qui arrivaient, et le remit sur le visage souriant de Liv. Elle avait raison sur un point : « Se mettre à l'abri avant l'arrivée de la tempête. » Mais en même temps, ce sourire le rendait méfiant.
— Vous me ramenez chez moi ? Pas de détour ?
— Indiquez-nous juste l'adresse, et on vous ramène. On pourra même réparer votre vélo en route et soigner votre plaie.
Ethan soupira, et à contrecœur, la suivit jusqu'à leur fourgon.
Pendant qu'il la talonnait, Ecarlate, au bas de la colline, les observait au loin. Nils s'en était allé bien avant, la laissant seule sur l'un des ponts. Elle ne sut pas comment réagir à ce moment. Elle voyait juste Ethan disparaître de son champ de vision avec une trentenaire.
Un avant-gout de la tempête vint faire valser sa longue chevelure blonde, ainsi que ses vêtements.

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ECARLATE
ActionEthan, jeune adolescent passionné d'écriture et ayant pour projet d'enfin commencer un véritable roman, voit ses plans changés par la venue d'une créature céleste à l'apparence féminine qui le soupçonne de savoir où se dissimule son éclair. Pendant...