37. Paix avec sois

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Les jours qui avaient suivi n'étaient pas des plus faciles, des bribes de mémoire me revenaient lorsque je dormais. Je me réveillais en diaphorèse, la respiration rapide, le cœur palpitant et parfois vomissant dans la chaudière que j'avais gardée près de mon lit. Je me sentais comme une merde et je ressemblais à une merde. J'ai demandé une semaine de congé à mon employeur et puisqu'il m'en devait une, j'avais réussi à l'obtenir. Je mangeais peu, ma mère s'inquiétait en silence, mon teint était pâle et je ne faisais que regarder le plafond de ma chambre allongé sur mon lit.

Mon téléphone était éteint, je ne voulais pas parler avec lui ou avec l'autre, je ne leur devais rien et je n'avais de compte à rendre à personne. J'entendais souvent ma mère répondre à la porte, chaque fois elle refusait l'entrée à la personne qui tentait de me voir. Elle ne m'en faisait jamais part, ne mentionnant pas qui essayait de prendre contact avec moi. Je savais parfaitement qu'elle aurait laissé Armin entrer alors, je croyais savoir qui était l'inconnu persistant.

Je passais le plupart de mon temps dans la salle de bain, si je n'étais pas dans ma chambre, me regardant dans la glace, voyant mes cernes, mes cheveux gras, ma peau pâle, mon corps trop maigre. J'avais toujours froid, peu importait ce que je portais, je frissonnais. J'étais dans le bain, recroquevillé sur moi-même lorsque ma mère toqua à la porte. Je la laissai entrer, de toute façon elle m'avait vu sous toutes mes coutures depuis bien longtemps. Elle s'assit au sol et elle entreprit de me laver les cheveux.

- Tu sais Eren...

- Maman, je ne crois pas...

- Laisse-moi parler.

- ...

- Je sais que tu as lu le journal de ton père, je ne sais pas pourquoi tu connais Pixis et je sais que Levi n'est pas un enfant de cœur, mais je suis ta mère. Je n'ai pas eu une vie merveilleuse, mais Grisha m'a donné un magnifique trésor qui a maintenant vingt-trois ans et je l'aime plus que tout au monde. Je sais que son cœur appartient à quelqu'un de difficile et je sais que cette personne essai chaque jour de lui parler.

Elle prit une pause, continuant de frotter mes cheveux puis, de les rincer délicatement, elle soupira et me fit un sourire triste.

- Je ne suis pas restée avec la personne dont j'étais réellement amoureuse et je ne veux pas que tu commettes la même erreur que moi Eren. Il est inquiet et tu lui manques, tu ressembles à une loque humaine fils et il n'est pas dans un meilleur état que toi. Si tu as des choses à te sortir de la tête fais comme ton père à fait, écris-les, écris tout puis, brûles les. Tu te sentiras plus léger et tu vas peut-être arrêter d'hurler durant les petites heures du matin.

Je ne répondis rien à ma mère, elle savait et comprenait ce qui se passait, elle me laissait avancer à mon rythme et je l'adorais pour la franchise qu'elle venait d'avoir avec moi. La semaine se terminait et je devais arrêter de me morfondre, ma vie n'était pas merveilleuse et je n'avais pas fait les meilleurs choix. Maintenant, je devais assumer mes choix et faire un pas vers l'avant. J'allais devoir avancer petit à petit, l'idée de ma mère n'était pas si mauvaise, peut-être que les images allaient quitter ma tête.

En sortant de la salle d'eau, je m'installai dans ma chambre avec un carnet moleskine et je commençai à écrire, encore et encore, je décrivais tout dedans, du jour un au moment de ma désintoxication. Toutes les émotions y passaient, la douleur, la tristesse, le dégoût, la joie, l'anxiété, la peur, l'envie, la jalousie, j'avais été une âme perdue croyant pouvoir me retrouver dans ce monde qui n'était pas le miens, j'étais abîmé et personne n'était là pour me retrouver au lieu de cela, on m'avait poussé plus loin, on m'avait rangé dans un placard et enfermé pour que je n'en sorte plus. À la fin de mon écriture ma main élançait, mon poignet était en compote et mon cœur n'était pas plus léger, bien au contraire. Je sortis à l'extérieur avec mon carnet et y mis feu dans la cours.

Le regardant brûler trop rapidement pour l'effort que j'y avais mis, ma bouche désirait un goût qui avait été trop longtemps absent, je soufflais, passant ma main dans mes cheveux et de l'autre regardant si j'avais mon portefeuille, mes clés et mon téléphone. Tout y était alors, mes pieds partirent vers le centre-ville, prenant le métro et je rentrais dans le premier bar que je croisais. Je m'installais sur le tabouret de bar et commandais ce que mes papilles me réclamaient. Un, deux, trois puis, quatre verres, ma tête se mis à tourner et je partis pisser.

J'ouvris mon téléphone étant sortis prendre l'air pour calmer mon tournis et mon téléphone sonna immédiatement faisant retentir la chanson miss Jackson, qu'elle ironie, c'était lui qui m'appelait. Je rigolais, c'était de sa faute si j'étais brisé, j'avais réussi à tout oublier et lui et sa queue avait tout remis sur le tapis. Lui et ses beaux yeux, lui et son odeur enivrante, lui et son jeu de séduction, sa voix envoutante, je l'aimais et le détestais. Je lui répondis.

- ...

- Eren?

- ...

- S'il te plaît ne raccroche pas!

- ...

- Je ne sais pas ce qui se passe, pour une fois je ne comprends rien. Dis-moi Eren, qu'est-ce qui s'est passé dans le bain, on avait un bon moment non? Je crois que non puisque tu t'es sauvé en courant...

- Cé de ta fote. Tu ha toute remis dans moi.

- Eren tu es saoul?

- Qué-ce que ten ha foutre.

- Eren tu es où?

- En enfer!

- Ne bouge pas d'accord.

Je lui raccrochais au nez, il m'avais mis en enfer ou peut-être était-ce le purgatoire, je n'en savais rien, tout ce que je comprenais était que mon reflet me dégoûtait à nouveau et que je ne fonctionnais plus correctement, j'étais brisé et personne n'allait réussir à recoller mes morceaux. Je ne voulais pas que l'on me dise que tout allait bien aller, je savais que la vie était une pute et moi aussi par la même occasion. L'homme que j'aimais était un menteur compulsif et il savait me charmer pour ensuite me broyer le cœur et me rappeler la merde que j'étais.

Mes pieds partirent vers l'endroit le plus près que je connaissais et qui me mettrait en sécurité, j'ignorais mon téléphone qui sonnait et avançait pas à pas, toujours plus loin, vers cet immeuble, cette porte qui allait s'ouvrir pour me laisser entrer et me mettre à l'abris. Avec l'alcool que j'avais ingéré, je savais que ma nuit allait être sans cauchemar pour une fois en six jours.  

HollowOù les histoires vivent. Découvrez maintenant